Energie: passer de la culture « pastèque » à celle « des groseilles »

pierre-radanne.jpgJ’ai participé à la conférence « Quelles énergies pour demain ? » organisée par le Cercle Condorcet à Trilport, avec Pierre Radanne pour invité. Cette association issue de la Ligue Française de l’Enseignement cherche à développer l’esprit critique et le débat citoyen, autant dire que ce débat a répondu à cette double exigence. Acteur incontournable des problématiques climatique et énergétique, Pierre Radanne en connaît tous les rouages, qu’ils soient institutionnels, économiques, scientifiques ou encore politiques : ancien Président de l’ADEME, consultant indépendant auprès de nombreux pays et de collectivités, expert international, créateur de l’association 4D, membre de Terra Nova, il est non seulement un homme influent et d’influence, mais également un défricheur et un agitateur d’idées qui fait avancer incontestablement les lignes. Particularité et non des moindres, il se situe tant dans le champ du concret que dans celui des possibles, considérant que lorsque le global ne s’incarne pas dans le local et la proximité avec le citoyen, il reste lettre morte.

L’époque est cruciale, notre génération est placée face à des choix qui engagent non seulement le présent mais hypothéquerons également l’avenir et le destin de nos enfants. Il nous faut surmonter nombre de défis qui peuvent devenir de véritables bombes à retardement : réchauffement climatique, crises énergétique, croissance démographique, fracture alimentaire et développement des pays émergents… Les réponses à apporter seront à la fois : globales, le réchauffement climatique ignore les frontières des nations, locales, car elles doivent être concrètes et rapides, mais également individuelles, la moitié des émissions de gaz à effet de serre provient directement des habitants.

La question du changement climatique ne pourra être résolue sans l’adhésion de chacun, encore faut il qu’il soit en capacité d’accepter ces contraintes et la crise économique et financière qui secoue actuellement nos pays constitue en fait une véritable mutation, nous sommes dans le structurel dur et non le conjoncturel et devons prendre les décisions qui s’imposent, d’autant que le volet énergétique est une composante de cette mutation, et que la part de l’énergie dans nos déficits actuels (budget, balance commerciale) est significative.

Pierre Radanne résume simplement l’enjeu énergétique pour le 21e siècle : «Comment passer de la culture du pastèque, à celle des groseilles …

C’est le sens de son intervention et de pas mal d’idées communes en matière que je vais tenter de restituer … 

 

pierre radanne.jpg

 

Pour la première fois depuis son apparition sur terre, l’homme arrive à un point de non retour, le « toujours plus » grignote désormais les limites physiques de la planète, aucune civilisation n’était jusque là arrivé à un tel stade. La croissance depuis la révolution industrielle est la quête des pays développés, elle a permis de multiplié des richesses dont la répartition qui a été à l’origine d’une confrontation entre responsables économiques et acteurs sociaux (lutte des classes) s’est transformé progressivement en compromis politique et social. Mais beaucoup oublient que ce développement s’est effectué au dépend de pays qui veulent désormais y accéder, volonté qui bouleverse les équilibres d’antan.

Mais depuis les années 80, une nouvelle donne émerge : le réchauffement climatique. D’abord hypothèse théorique, puis scénario plausible, peu à peu au rythme des études scientifiques il devient une certitude avéré, avec pour origine principale les effets anthropiques sur les écosystèmes des émissions de CO2 dues principalement aux énergies carbonés. Dans le même temps les écarts de richesse entre pays riches et pauvres s’accentuent, même si le développement des BRICI (Brésil, Russie, Inde, Chine et Indonésie) bousculent cet équilibre. La croissance continue et exponentielle de ces pays exerçant une pression très forte sur la ressource énergétique et les matières premières.

Le paysage énergétique présent depuis les années 1960, s’érode progressivement, pourtant l’omniprésence du pétrole est toujours aussi forte, mais à l’image du pommier, ce sont les fruits placés sur les branches les plus basses qui ont été cueillis, désormais il faut accéder aux plus hautes branches, moins accessibles, ce qui demande plus d’efforts et revient plus cher (offshore, schistes … ). Les équipements et infrastructures réalisés à cette époque approchent d’une fin prochaine et vont nécessiter dans la prochaine décennie des investissements considérables. Spécificité française, les centrales nucléaires datant principalement des années 70 nécessitent des interventions techniques importantes pour prolonger leur existence. Elles sont à l’origine de l’électricité comme choix énergétique majoritaire de nos concitoyens, une spécificité mondiale. Conséquence évidente, le prix de l’énergie qu’elle soit carbonée ou électrique va continuer d’augmenter sensiblement dans les prochaines années et mettre dans le rouge beaucoup de nos concitoyens. La précarité énergétique concerne de plus en plus de foyers (lorsque plus de 10% des revenus est consacré aux dépenses énergétiques) selon les derniers sondages, près de 11% des Français (3 millions de foyers) reconnaissent avoir eu récemment des difficultés à payer leur facture d’électricité. L’augmentation devient vite insupportable pour les ménages vivant dans des passoires thermiques que sont encore de trop nombreux logements, souvent le stress puis la précarité énergétique se transforme en précarité tout court. Rappelons que le tarif (hors TVA) de l’électricité a augmenté de 20% en cinq ans, moins que le gaz (+80% depuis 2005), mais devrait augmenter de 30% de plus d’ici 2016, selon la Commission de régulation de l’Energie (CRE).

Nous avons l’impératif de reconsidérer notre approche énergétique en explorant simultanément les pistes d’une sobriété renforcée, des énergies renouvelables et d’un nouveau mix énergétique. Relecture qui doit intégrer les réalités techniques, économiques mais aussi géo politiques. Il s’agit d’effectuer les bons choix stratégiques d’investissements, ceux qui se révèleront les meilleurs pour le réchauffement climatique, les plus pérennes,  puis mettre en place de nouvelles filières et réseaux de distribution et effectuer une véritable révolution copernicienne. Passer d’une « économie pastèque », monoproduit (électricité ou pétrole), sophistiquée (notamment avec le nucléaire), porté par un réseau distributif descendant et centralisée, pilotée par de grands opérateurs (EDF), à une « économie groseilles », composé d’une multitude de sources d’énergies, de petits acteurs, par définition délocalisés, reposant sur des réseaux intelligents transitant l’énergie dans les deux sens. Les investissements à réaliser dans les prochaines années sont capitaux, il s’agit non de créer de faux éco systèmes ou des bulles spéculatives sans fondement (photovoltaïque) mais de développer de nouvelles filières pérennes, ce qui nécessite du politique des choix éclairés puis surtout constance et stabilité ensuite.

Une évidence cependant, l’énergie la plus économique est bien celle que l’on ne consomme pas. Nous devons développer une société plus sobre, dans nos investissements (développement de l’efficacité énergétique, transport en commun, éco quartiers…)  mais agir de manière très volontariste dans la rénovation thermique du bâti, en direction des ménages vivant dans des logements mal isolés, qui le plus souvent ne peuvent supporter le cout d’une telle rénovation.  La frange francilienne et le péri urbain sont des secteurs ou le bâti est énergivore. Une telle politique est à la fois bonne pour l’emploi et l’économique mais également pour la réduction de nos déficits. Il faut l’ériger en politique publique prioritaire et déplacer le seuil de rentabilité de telles rénovations en prenant en compte la précarité énergétique des ménages qu’ils soient locataires ou propriétaires et agir vite, en ce domaine un euro de dépenses génèrent plusieurs euros d’économies et de baisse de la consommation. Nous pouvons également inverser le point de vue. : à combien s’élèvera l’addition énergétique si nous n’agissons pas ? Les sources de  financement à explorer peuvent être des incitations fiscales, financières (intervention du réseau bancaire) ou des intervention publiques directes. Mieux vaut combler directement les passoires thermiques que continuer à verser notre contribution au tonneau des danaïdes que constitue une part de notre dépenses énergétique !

Notre pays possède dans le domaine de l’efficacité énergétique un potentiel incroyable : matériaux bio sourcés, présence de forêts dans chaque grande région, qui lui donne la possibilité  de mettre en place des stratégies différenciées dans chaque territoire en tenant compte des différents éléments de contextualisation. Il lui faut organiser des réseaux transversaux alliant monde de la recherche et de la formation, entrepreneurs, acteurs publics et placer la question énergétique au premier rang des priorités du pays. Elle est créatrice d’emplois locaux, de richesses, et agit directement sur les déficits. Il faut privilégier les réponses locales, en privilégiant le développement de modes de vie plus sobres. Comme le souligne Pierre Radanne «Promouvoir la transition énergétique revient à défricher des solutions adaptées aux réalités des territoires ».

Le développement des Plans Climat Energie Territoriaux constitue en ce domaine une opportunité très prometteuse. Pierre Radanne conseille d’ailleurs certaines collectivités en ce domaine (Région, grandes villes …). Chaque territoire porte en lui les germes d’une solution authentique et légitime, le monde change c’est une évidence, l’approche urbaine comme nos modes de vie doivent changer également en intégrant les ferments d’un développement à la fois plus durable et solidaire. Le politique doit être à la hauteur d’enjeux qui engage le présent mais également le futur proche et lointain. La lutte contre les émissions de gaz à effets de serre, l’adaptation au réchauffement climatique et la protection de la bio diversité et des ressources planétaires doivent être la ligne de conduite commune.

Le prochain mixt énergétique (mais il émerge déjà peu à peu) sera composite, mêlant sources d’énergie dite intermittentes (solaire, éolien), à des plus régulières : hydraulique (production fil de l’eau, éolienne offshore), biomasse, cogénération, méthanisation et une part décroissante de nucléaire, en intégrant des solutions spécifiques au chaffage et à la production d’eau chaude sanitaire : pompes à chaleur, géothermie. Sans oublier les pistes que la recherche consolide peu à peu : hydrogène, pile à combustible, stockage de l’énergie produite et développement des Smart grids.

Cette nouvelle donne ne doit pas privilégier une approche descendante (« top down ») mais ascendante (« bottom up ») reposant sur une évolution comprise, assumée et intégrée de chacun dans ses comportements individuels. Ce qui exige des décideurs qu’ils soient politiques ou acteurs économiques sens de la pédagogie, mise en place des mesures d’accompagnement adaptées permettant et facilitant une transition énergétique, pour toutes les catégories de la population en tenant compte des difficultés financières (pour les habitants) ou budgétaires (pour les collectivités). Il faut faire preuve de solidarité, tant nous sommes tous liés.

Nous devons passer de la culture « pastèque » d’antan et d’aujourd’hui à la culture « groseilles », en précisant que chaque groseille revêt une saveur, une couleur ou une taille différente selon les contraintes des latitudes. Mais pour que la greffe réussisse, il faut cultiver l’adhésion et l’implication des populations, en matière d’énergie et de réchauffement climatique, seul l’usage fait sens.

Comme le souligne Pierre Radanne « il y a un infini dans un monde fini » en faisant référence au progrès scientifique et au développement de la relation à l’autre avec les nouvelles potentialités ouvertes par l’informatique.

 « Un enfant aura dans sa vie qui s’étirera sur tout ce siècle, avec son téléphone portable et internet, accès à plus de personnes, à plus de connaissances et à plus d’expressions culturelles que toutes les générations qui l’ont précédé ».

« Un nouvel horizon s’ouvre. La communication, la culture, l’accès aux autres constituent la nouvelle voie de développement, le nouveau champ d’expansion de l’aventure humaine ».

« Nous passons d’une société de consommation, prédatrice à l’encontre de la planète à une société relationnelle ».

C’est une vision humaniste et citoyenne du progrès qu’il privilégie dans son approche de la mutation énergétique, espérons que les faits lui donneront raison, encore faut il ne pas trop tarder pour s’engager dans cette voie …

Sus aux groseilles !

Un festival du vent, bien nommé …

mini-calvi-1.jpgL’approche des fêtes de Noel ou bien celle de la fin du Monde (chacun son choix) m’incite à mettre ce blog à jour, d’autant que j’ai oublié de publier la  note écrite sur un événement auquel j’ai eu l’honneur de participer début novembre à Calvi, le 21 eme Festival du vent (ou festiventu,  « Courants d’art et inspirations écolos »).

L’édition 2012 a fait honneur à son nom, au regard de la violence de la tempête qui s’était abattue sur l’ïle de Beauté, le vent était bien au rendez vous, au grand dam des organisateurs, des compagnies aériennes comme de leurs passagers. L’atterrissage sur Bastia a constitué un grand moment d’émotion et d’anthologie tant l’avion a tangué et c’est fait chahuté dans les cieux avant de se poser. Des sensations fortes dignes des plus terrifiantes attractions de Dysneyworld !

De Dysney le festiventu est pourtant à des années lumière, fort heureusement d’ailleurs ! Créé il y a plus de vingt ans par Serge Orru [l’ancien directeur général du WWF France] son concept est à la fois original et simple : provoquer à Calvi durant l’arrière-saison touristique, des rencontres mêlant personnalités venues de tous les horizons (artistes, sportifs, humanitaires, écologistes, scientifiques, journalistes …) et des manifestations artistiques ayant pour thématique centrale, l’écologie.
Force est de constater que le coktail a fonctionné, ce qui est certainement la conséquence de la qualité de ses racines environnementales, durables et profondes comme à celle  de son terreau, la fertile terre de Balagne.

Un succés jamais démenti depuis, du à la qualité de l’organisation, bon enfant mais efficace, et à  l’engagement des 600 bénévoles qui animent la manifestation et font vibrer les 40.000 festivaliers qui s’y rendent chaque année. Il faut y ajouter également d’autres paramètres comme celui de la magie des lieux, des participants et des instants rares qu’une telle alchimie provoque … Une chanson en est né, « la ballade de chez Tao » d’Higelin …
De nombreux  artistes ou intellectuels français et étrangers s’y donnent rendez vous chaque année, histoire de partager quelques jours de cette ambiance particulière, attachante et unique. Si malheureusement le cru 2012, du fait des éléments déchainés, n’a pas eu le succès populaire habituel, la qualité a été fidèle à la tradition, avec la présence de deux invités vedettes : Yann Arthus-Bertrand et Pierre Rabhi. 

Revenons sur cette 21 eme édition et trois belles rencontres que j’ai eu le plaisir d’y faire …

François, Yann, Pierre et les autres, tous les autres …

 
 

 

mini-calvi-2.jpg

J’ai été invité à ce festival afin de participer à une table ronde qui avait pour thématique :  « L’ÉCO-CONSTRUCTION AU SERVICE DU LOGEMENT SOCIAL »

Sur la pénurie en logement, le constat de la Fondation Abbé Pierre est sans nuance. Une situation d’autant plus préoccupante qu’elle est liée au mal logement et à la précarité énergétique. Le rapport de la fondation se positionne également sur lce dernier point. La précarité énergétique existe dés que l’o, l’on consacre plus de 10% de ses revenus à l’énergie, une charge qu’il est important d’intégrer au coût du logement, tant la notion de cout global est essentielle notamment en situation de crise économique et sociale.

Autre réalité, l’évolution sociétale et le nombre croissant de familles monoparentales ou de ménages ne comportant plus qu’une seule personne (séparations, maintien des personnes âgées à domicile, etc.). Cette tendance indique que le parc de logements doit s’accroître d’autant, y compris pour maintenir uniquement le même nombre d’habitants (ce que l’on appelle le point mort).

Le débat a porté sur ce constat dramatique, grâce au représentant de la Fondation de l’Abbé Pierre mais aussi sur des pistes de solutions innovantes à y apporter, autour de deux expériences : celle du Chênelet (voir aprés), et celle du projet d’éco quartier de l’Ancre de lune, qui fait désormais parler de lui, y compris hors Ile de France.

Point commun à ces deux initiatives : permettre aux familles défavorisées d’accéder à des bâtiments performants afin qu’elles soient en capacité de réduire leurs charges et d’accéder à un réel confort en préservant la santé de leur famille. Un des arguments que j’ai développé a été repris par la presse «s’il faut respecter la loi SRU (qui impose aux villes de disposer de 20% de logements sociaux) il ne faut pas transiger sur la qualité du logement. Faire bien demande un minimum d’attention et de temps, cela coûte plus cher que faire médiocre si on prend en compte le coût immédiat, mais si l’on regarde à 30 ou 40 ans, c’est l’inverse.»

Cette table ronde a été également l’occasion de rencontrer un sacré bonhomme, le créateur et le fondateur du Chênelet, François Marty …

 

 François

mini-calvi-3.jpg

François se décrit comme un patron « écolo, catho, membre du Medef », je rajouterais un brin provoc, un mixt des plus improbable qui prend, grâce à la gouaille, l’humour et le sens de la répartie du bonhomme.

 Son parcours d’entrepreneur est pour le moins « atypique »; après une scolarité « difficile » dans la banlieue parisienne, il est accueilli à 17 ans par une communauté de moines trappistes. Ces derniers lui apprennent un métier, chauffeur routier, et le respect de valeurs clés qui le marqueront à jamais.
Il monte alors un atelier de construction de palettes et fonde avec l’évêque d’Arras,  une communauté près de Calais qui accueille les exclus de la vie (sortants de prison, réfugiés, jeunes au chômage …) le Chênelet qui deviendra par la suite, la première entreprise d’insertion de France.

Avec le soutien de la Millez’s connection et l’appui des patrons du groupe Auchan, il passe un MBA à HEC, passant ainsi de « bac-15 à bac+7 » et devient entrepreneur social. Un parcours et une réussite qu’il complétera en rejoignant le Secrétaire d’Etat à l’Economie solidaire du gouvernement Jospin, Guy Hascoet dont il devient le chef de cabinet. A cette responsabilité, il a été un des principaux rédacteurs des textes de lois sur l’épargne solidaire et les société coopérative d’intérêt collectif. Depuis sa boite a fait son chemin et François assume totalement la contradiction apparente d’être un Vert encarté au Medef. Si l’activité de base du Chênelet reste la production de palettes en bois par un public en insertion, cette entreprise sociale construit désormais des logements sociaux éco-conçus et solidaires, une activité soutenue par les banques, fonds éthiques et grandes entreprises démarchés par François Marty. Originalité de la démarche initiée : réaliser des maisons en bois plus chères mais à très faibles charges (jusqu’à 50 % de dépenses en moins en eau et électricité).
Un projet qui a permis de relancer l’activité forestière de sa région et qu’il cherche désormais à développer un peu partout dans le pays grâce à la société foncière qu’il a créé. Soulignons qu’au Chênelet, le rapport entre les plus bas salaires et ceux des dirigeants n’est que de 2,5. 

« On construit à l’inverse de la logique low cost, pour donner du confort aux ménages les plus pauvres et leur éviter de tomber dans le piège du surendettement. Telle est notre vision de l’habitat humaniste … Sur soixante ans, la construction ne représente que 17 % du coût réel d’une habitation. Les 83 % restant sont des charges. Le vrai moyen de faire de l’habitat social c’est de baisser ces charges, de consommer moins d’énergie, donc d’être écolo.  » 

 

Yann

 

mini-calvi-4.jpg

 

Je ne vais certainement pas faire le portrait du photographe Yann Arthus-Bertrand, qu’on ne présente plus, tant le personnage est connu de tous.
Il poursuit sa quête d’absolu en survolant la planète et à partir de ses photographies aériennes qu’il nous fait partager, belles, esthétiques mais surtout pleines de sens, il nous amènent à réfléchir sur l’évolution du monde et le devenir de nos enfants. 

A Calvi il a présenté deux documentaires, « La soif du monde », et « océans », afin de faire un tour du monde et d’horizon des enjeux autour de l’eau: l’agriculture, la surpopulation, la pauvreté …
Son travail me rappelle le slogan historique de Paris Match : « le choc des photos, le poids des mots ». Dans le cas de Yann, il faudrait également préciser, des chiffres, tant les statistiques sur le triste état de la planète qu’il rappelle à chaque cliché prennent un nouveau relief et donne le tournis.

Au festiventu, il a voulu mettre en lumière l’action de sa fondation GoodPlanet, qui agit pour sensibiliser et éduquer le public à l’environnement. D’abord connue pour son programme « Action Carbone », destiné à réduire et compenser nos émissions de gaz à effet de serre, elle s’implique de plus en plus dans le domaine de l’éducation à l’environnement, en menant toute une série d’action dans les écoles mais également en animant des projets artistiques à vocation humanitaire.

Celui de « 7 billions others » ou plutôt de « 6 milliards d’Autres » est emblématique. Ce documentaire donne la parole à des milliers d’anonymes qui témoignent concrètement de l’état de la planète en décrivant avec des mots simples mais poignant,s le  bouleversement climatique en cours. La mise en image et en scène sobre, esthétique, simple et lumineuse, la qualité et le rythme de leur prise de parole, comme le choix des exemples qu’ils donnent pour donner du sens à leur intervention apporte un poids supplémentaire et une rélle authenticité aux mots prononcés dans leur langue d’origine.

 

Pierre

 

mini-calvi-5.jpg

 

La venue de Pierre Rabhi au Festival du vent était attendue comme un véritable événement, d’autant que Serge Orru, créateur du Festival du vent, lui a dédié son dernier ouvrage « Pierre Rabhi le fertile ». Ce petit homme de 74 ans et de «52 kilos tout mouillé.» a été réellement l’invité vedette du festival, tant la ferveur était au rendez vous. Gourou ou passeur, le doute était permis devant l’attitude de certains auditeurs pas très loin de l’état extatique voire même de l’apesanteur.

Il a disser – té sur la place de l’humain dans une socié-té dominée par les mots en «-té»? :  productivi-té, rentabili-té, comptabili-té, à opposer à «amabili-té, humani-té, fraterni-té». 

Pierre Rabhi  a marqué le mouvement écologique, avec un parcours de vie également singulier. Fils d’un forgeron du sud algérien, confié à l’âge de 5 ans après le décès de sa mère, à un couple d’Européens qui lui inculquent une éducation française dans le respect de sa culture d’origine, il arrive dans notre pays, travaille comme OS à Paris dans une chaîne de montage, rencontre sa femme et décide de bouger, de casser le moule et de … transgresser …  

«Soit on accepte d’être dans un moule, et on ne bouge pas, soit on est dans la transgression, je persiste à dire qu’il ne peut pas y avoir de changement de société sans changement humain.».

Il quitte la capitale et s’installe en Ardèche comme ouvrier agricole. Il récuse la logique productiviste appliquée à l’agriculture et s’imprègne d’une autre agriculture, plus  biologique et écologique. Après trois ans de pratique, il devient paysan et se lance dans l’élevage caprin en appliquant avec succès ces nouvelles méthodes dans la petite ferme qu’il a acquis avec sa femme.

Il cultive sa terre d’adoption ardéchoise, aride et rocailleuse en refusant par conviction l’utilisation de produit phytosanitaire ou d’engrais, et réussit à créer de la fertilité, grâce à une agriculture biodynamique fondée sur les cycles naturels.
Ses résultats le conduisent vers l’enseignement afin de diffuser et partager sa pratique. Il devient chargé de formation à l’agro-écologie du CEFRA (Centre d’études et de formation rurales appliquées) puis transmet son expérience dans divers programmes en France, Europe et Afrique, notamment au Burkina Faso.
Appuyé par Thomas Sankara, Président à l’époque de ce pays , il pilote le 1er programme d’agroécologie, alternative et véritable planche de salut pour les paysans locaux face à la sècheresse et au prix des produits phyto sanitaires (engrais et pesticides); depuis 100 000 agriculteurs de ce pays pratiquent l’agroécologie.

Il est reconnu comme un expert international pour la sécurité alimentaire et a participé à l’élaboration de la Convention des Nations Unies pour la lutte contre la désertification. Ce philosophe paysan est le créateur du «mouvement du colibri». 

Selon une légende amérindienne, il y eut un immense incendie de forêt. Tous les animaux terrifiés, atterrés, observaient impuissants le désastre.

Seul le petit colibri s’activait, allant chercher quelques gouttes avec son bec pour les jeter sur le feu. Après un moment, le tatou, agacé par cette agitation dérisoire, lui dit : « Colibri ! Tu n’es pas fou ? Ce n’est pas avec ces gouttes d’eau que tu vas éteindre le feu ! » Et le colibri lui répondit : « Je le sais, mais je fais ma part. »

Devenu au fil des ans, un auteur reconnu, le paysan philosophe appelle de sa voix douce et menue à « l’insurrection des consciences ». Il s’est également lancé en 2002, dans la campagne des Présidentielles …

Parcours atypique avions nous écrit …

 

mini-calvi-6.jpg

 

 


 
 

Notre contribution à la démarche « éco quartier »

ancre-de-lune.jpgCe blog suit la progression de l’éco quartier de l’Ancre de lune (voir note précédente) dont nous vous rendons régulièrement compte. Nous en sommes désormais à l’analyse des propositions des quatre sociétés d’aménagement qui ont postulé et d’ici quelques semaines le nom de l’aménageur sélectionné sera connu, nous aurons l’occasion d’y revenir d’ici là …

Pour nous, un éco quartier se doit de respecter une exigence absolue : limiter les émissions de Gaz à Effet de Serre, tant au niveau du bâti, des mobilités, que des usages de ses habitants ou usagers, mais doit également apporter des réponses concrètes aux besoins sociaux du territoire.
Il faut souligner que tout quartier est par nature multidimensionnel : espace géographique connecté à des proximités territoriales, espace social, culturel, historique ou économique, mais qu’il constitue surtout un espace vécu, la dimension des usages revêt donc une importance essentielle !

Ce serait une grave erreur de considérer un éco quartier comme un « objet » figé ou duplicable à l’infini. Pour privilégier la voie de la sobriété énergétique (tant au niveau du bâti, des mobilités que des usages), il se doit d’intégrer le contexte environnant, les contraintes ou potentialités locales, le besoin d’adaptabilité de la ville, sa capacité à respirer, évoluer, fonctionner et se régénérer (métabolisme urbain), ce qui impose de ne pas le réduire à une simple opération urbaine et à ne pas faire abstraction de sa dimension sociale qui en constitue par nature le socle incontournable.

Une des finalités assigné à  l’Ancre de lune depuis son origine, est de « rétro agir» sur son territoire, si ce projet  constitue un lieu de diffusion et d’innovation, tant sociale qu’environnementale, il n’est surtout pas un périmètre d’exception.
L’Ancre de lune Notre éco doit essaimer les ferments de la Ville Durable, tant ce morceau de ville ne peut être isolé ou déconnecté du territoire dans lequel il se développe. C’est avec cette volonté que le site internet de l’Ancre de lune inauguré en juillet dernier a été conçu : cette « vitrine » présentant les particularités de la démarche initiée, joue le rôle également d’une « boite noire » informant acteurs ou habitants de l’évolution de cette aventure collective et constitue une banque de ressources qui permet de partager les avancées ou innovations expérimentées.

Le travail réalisé depuis le lancement de l’initiative, l’originalité de la démarche initiée qui repose sur  une expertise plurielle et pluri disciplinaire, grâce au réseau de partenariats constitué, et intégre acteurs  et habitants, a non seulement intéressé la Région, mais également le Ministère de l’Ecologie, du Développement Durable et de l’Energie.
Trilport est un des 14 sites nationaux sélectionnés pour tester le futur label Eco Quartier,  et le Bureau de l’aménagement opérationnel durable (AD4) du Ministère, pilote national de la démarche éco quartier  lui a consacré sa dernière lettre mensuelle !

Il nous a semblé important que l’énergie dépensée, le travail capitalisé, les innovations expérimentées et progrès réalisés essaiment, tant ils constituent des pratiques urbaines dignes d’intérêt, innovantes, respectueuses des hommes, de la biodiversité et de l’environnement.
C’est une des raisons qui nous a mené avec des partenaires tel le CAUE 77 ou le CETE Ile de France a mené une réflexion collective qui a aboutit à l’élaboration du « référentiel durable » de l’Ancre de lune (disponible sur le site en téléchargement), réflexion intégrant la nécessité de se positionner sur différentes temporalités, dont celle du temps long, ce qui passe nécessairement par une pérennisation des usages, tant cette démarche particulière se doit de proposer aux habitants ou usagers des perspectives afin de leur permettre de se projeter dans un futur proche, est de devenir ainsi un véritable espace de projet. 

Mais un référentiel durable, pourquoi faire ?

 

 

 
 
Pour mener à bon port ce projet il est indispensable que chaque acteur impliqué soit en capacité de se situer dans la démarche initiée (temps, espace, domaines d’action), intègre ses spécificités ou particularités et dispose des informations et éléments pertinents lui permettant d’agir en cohérence avec le projet politique initié.
 
Vu le mode de gouvernance mis en place, collaboratif et dynamique, la nécessité de dégager les fondamentaux et invariants de la démarche (son « ADN »), d’assimiler principes fondateurs, méthode de travail engagées, ou logiques de fonctionnement s’est rapidement imposée.
La mise en œuvre d’un outil, méthodologique et pédagogique, est apparue essentielle pour mener une démarche collective « partagée », respectant les ambitions poursuivies, les niveaux d’exigence attendus, tout en menant un processus itératif favorisant le pilotage et la gouvernance de l’éco quartier. 
 
La mise en place et le pilotage d’un éco quartier, nécessitent réactivité, adaptabilité, et sens de l’anticipation. Il est indispensable pour ce faire, que ce « morceau de ville et de vie » s’intègre dans une stratégie globale qui aille au delà de ses simples limites, afin de pouvoir être en cohérence et en résonance avec le développement du territoire et que l’évaluation en continue soit un impératif absolu de la gouvernance.
Autant d’impératifs qui ont incité les décideurs à privilégier l’élaboration d’un référentiel, plutôt que celui d’un livret de « bonnes pratiques» ou d’une « charte de l’éco quartier ». Notre volonté étant de placer au cœur du projet, les logiques de «process» et de gouvernance. Afin de faciliter l’appropriation de la démarche, l’appréhension des exigences et des objectifs poursuivis, et permettre à chaque acteur de se repérer en toute connaissance de cause dans la stratégie globale engagée, le référentiel a été bâti selon des principes clairs : aller du général au particulier, du conceptuel au concret.
 
Autre utilité de cette réflexion : constituer au  moment du choix de partenaires clés, tel l’aménageur de la ZAC support de l’éco quartier, un outil utile favorisant l’analyse des candidatures grâce à une grille de lecture innovante et sélective, respectant pleinement les objectifs transversaux et globaux de la ville durable.
 
 

Présentation du référentiel durable

 
Pour plus de commodités et de cohérence, le référentiel a été divisé en trois volets complémentaires, correspondant chacun à une phase clé : 
 
Le document cadre
Véritable « ADN » de la réflexion, il rappelle fondamentaux du projet, origines, développement … Il présente les particularités de la gouvernance choisie et les priorités qui ont guidé la démarche. De portée générale, il situe l’importance et la priorité des enjeux auxquels doit  répondre l’éco quartier, qu’ils soient globaux et d’ordre environnemental ou sociétal, ou simplement locaux.
 
Le document stratégique
Prolongement naturel du document cadre, il aborde concrètement chaque thématique, rappelle contexte et enjeux, souligne les ambitions poursuivies et le niveau d’exigence attendu. Il fixe les grandes lignes de la stratégie et du plan d’action à mettre en place, souligne les moyens mis en œuvre ou engagés, aborde le mode opératoire des procédures d’évaluation favorisant le pilotage de la démarche : indicateurs de suivi, d’évaluation, modalités d’inter action ou de rétroaction …
 
Le document opérationnel
Déclinaison localisée du plan d’action mis en œuvre, sera enrichi du dialogue constructif établi entre les équipes des différents acteurs impliqués (aménageur de la ZAC, bailleurs, association en responsabilité des jardins familiaux …).
 
 
Nous partageons cet outil méthodologiqueéférentiel, car il peut inspirer d’autres démarches sous d’autres cieux ou latitudes. Cependant il convient de distinguer les éléments qui peuvent être considéré comme des invariants, et à ce titre susceptibles sinon d’être reproductibles, du moins transposables de ceux liés à l’histoire particulière du projet ou au contexte local, que l’on peut considérer comme des «variables », et qu’il serait problématique de transposer sans précaution.
 
Un impératif absolu demeure cependant, chacun des acteurs qui fait le territoire doit garder en tête que la ville se doit d’être avant tout, désirable et désirée pour être acceptée et durable.
 
C’est ce que nous recherchons avec l’Ancre de lune, c’est dire l’ambition du projet.
 
 

L’Ancre de lune lève l’ancre …

mini-pres-referentiel-4-j2m.jpgL’éco quartier de l’Ancre de lune lève l’ancre, ou du moins il commence à se dévoiler avec le lancement de son site internet : www.lancredelune.fr.

Nous avons organisé à l’occasion du lancement du site internet de l’éco quartier, un moment de convivialité afin de remercier les partenaires qui nous accompagnent depuis le début de notre projet, dans ce que nous pouvons désormais appeler une véritable aventure.
Nous avons également profité de l’occasion pour présenter dans le même temps le «référentiel durable » élaboré avec la collaboration étroite du CAUE 77 et du CETE Ile de France, sur lequel nous aurons l’occasion de revenir tant ce travail mérite qu’on s’y intéresse. Etait également convié à cette manifestation, 
les quatre aménageurs ayant postulé à l’appel d’offres afin de leur présenter en avant première l’ambition d’un projet, quelque peu hors norme.

Avant d’être un simple projet d’aménagement urbain, l’Ancre de lune est une aventure humaine au service du lien social de proximité, qui témoigne d’une prise de conscience collective de la responsabilité de l’homme envers son environnement mais aussi envers son territoire et les besoins qu’il abrite. Notre volonté est de faire de ce morceau de ville et de vie, non un territoire d’exception, mais une terre de diffusion et de partage, ayant la capacité non seulement de rétroagir sur la ville, mais qui soit « en résonnance » avec son, ou plutôt ses territoires.

Remarque préalable, cette aventure ne peut être que collective et partagée, tant la réalité du terrain impose toute sa complexité. Une ville ne peut être considérée comme un objet fini, mais résulte d’une alchimie mêlant histoire, géographie, morphologie urbaine, environnement naturel ou culturel,  politique (grande ou petite), habitudes et usages … Tout s’entremêle et interagit …

Par essence, un quartier est un condensé de vie, collective et sociale, qui respire, se développe, évolue, mute, se régénère, et obéit aux règles complexes d’un véritable  «métabolisme urbain». Un quartier est également par nature multidimensionnel : espace géographique, culturel, historique, économique, mais surtout, espace vécu et lié ou relié (connecté ?) à des réseaux de proximité, qu’elles soient sociales ou spatiales.*
Il doit pour exister encore demain, proposer de véritables perspectives à ses habitants afin de leur permettre de se projeter dans un futur proche et de devenir ainsi un véritable espace de projet.

Par définition, un éco quartier ne peut être considéré comme un objet figé, s’il privilégie la voie de la sobriété énergétique, que ce soit  au niveau du bâti, des mobilités ou de ses usages, il doit également intégrer le besoin d’adaptabilité de la ville et faciliter ainsi sa capacité à « respirer », fonctionner ou se régénérer; ce qui impose de ne pas faire abstraction de ses dimensions humaine et sociale qui en constituent par nature le socle incontournable.

C’est tout cela que nous voulons restituer, avec le site lancredelune.Fr et actualisé au fil du temps qui file …


blog1.jpg



Pourquoi avoir pris tant de temps depuis 2009 ?

Entre l’idée de créer cet éco quartier (2007), sa formalisation publique (lors des élections municipales de 2008), et le succès à l’appel à projet régional (2009) des « Nouveaux Quartiers Urbains », ce projet a considérablement évolué, notamment au niveau de ses ambitions, qu’elles soient environnementales, sociales mais également méthodologiques.
Cela a pu être possible, grâce au soutien financier de la Régionau titre des «Nouveaux Quartiers Urbains » dont la ville de Trilport est lauréat de l’appel à projets. Cette aide nous a permis de mener une véritable démarche pluridisciplinaire et collaborative, en fédérant des expertises multiples, ce qui nous a permis de bousculer et décloisonner les schémas traditionnels qui jusque là prévalaient.

Conscients de la problématique rencontrée, mais aussi de l’opportunité de conduire sur ce site clé une opération de rénovation urbaine pouvant devenir une référence et être utile à leur territoire, les élus ont décidé d’en faire non le projet d’un aménageur quelconque, mais bien celui d’une ville et d’un territoire, en privilégiant une démarche partagée et collective et en définissant en amont,  un projet social et environnemental ambitieux autour de cet éco quartier.
La place prise dés l’origine par le politique, initiateur et porteur de la démarche, a permis de mettre en place bien avant le choix de l’amenageur des structures de gouvernance, et de fédérer une équipe pluridisciplinaire composée d’acteurs du terrain, de techniciens et de partenaires institutionnels représentatifs du territoire, dont l’apport collectif a permis de faire évoluer en profondeur le projet initial, et ce, bien avant le choix de l’aménageur.

Autre caractéristique forte, l’importance donnée à la problématique de la cohésion sociale et intergénérationnelle comme à la volonté politique de privilégier une approche globale mêlant urbanisme, environnement, lien social. Ce qui a favorisé l’émergence d’une démarche collective et partagée bénéficiant des approches et points de vue de chacun des différents partenaires, et permettant d’obtenir ainsi une vision plus complète des contraintes et potentiels du site, ce qui a permis d’appréhender toute la problématique urbaine du territoire, ses besoins, les fonctions inhérentes au quartier et les potentialités à réveiller.

L’ancre de lune présente la particularité de concentrer sur ses six sites, à peu près l’essentiel des thématiques liées à la limitation des émissions de GES, à la cohésion sociale, au renouvellement urbain, à la ville et son extension, mais aussi paradoxalement et en contrepoint au devenir des espaces ouverts.

C’est dire que les enseignements tirés de l’expérience menée, les innovations méthodologiques, environnementales ou sociales expérimentées, les difficultés et les freins rencontrés ou au contraire les synergies potentielles à créer ou les leviers à activer peuvent intéresser au delà su seul périmètre de cet éco quartier.

Mais l’urbanisme n’est il pas l’art de dépasser sa parcelle ?


mini-pres-referentiel-9-site.jpg


Les agro carburants épinglés

hausse impots cour des comptes rapport.jpgUn rapport récent de la Cour des Comptes vient confirmer les réserves que j’avais exprimé dans mes précédentes notes consacrées à la filière  agro carburant (agro carburant plutôt que Bio carburant, les bio carburants sont ils écolos).

Mais avant d’aller plus loin et afin de dissiper tout éventuel malentendu, je veux insister sur l’intérêt, la nécessité même, de trouver de nouveaux débouchés à l’activité agricole. Les champs de nos campagnes constituent un gisement potentiel considérable d’activités et d’emplois à développer, en termes de production alimentaire, mais pas seulement.
Au regard de la croissance démographique en cours et des 9 milliards d’habitants que notre planète abritera en 2050, chacun mesure l’importance de sauvegarder une agriculture performante, productive, qui soit également respectueuse du cycle des saisons comme de la biodiversité.

Les espaces agricoles sont aujourd’hui victimes de différents types d’agression qui les fragilisent et menacent leur existence (consommation foncière , fragmentation, mitage, les pollutions  …), ils ne seront d’autant plus aptes à se défendre qu’ils constitueront un enjeu stratégique et économique pour le territoire. Toute la question de leur maintien dépend de cette réalité économique.  

Mais je ne pense pas que le développement des agro carburants soit la bonne réponse, contrairement à l’émergence de filières locales dédiées, notamment, aux éco matériaux (j’y reviendrais dans une prochaine note).

Pourquoi autant de réserves sur les agro carburants ?

 

 

0xha5cpo.jpg

 

Les politiques en faveur des biocarburants ont d’abord été liées aux politiques agricoles, puis ont visé l’indépendance énergétique, et enfin ont eu pour objet de répondre aux préoccupations environnementales.

Qu’en est il …

 

Avant d’aborder ces objectifs, quelques données de cadrage …

Les biocarburants qui sont actuellement sur le marché, sont utilisés en mélange avec les hydrocarbures. En France, ils sont distribués pour la circulation automobile sous deux formes, le biodiesel en addition au gazole, le bioéthanol en addition à l’essence.

Le biodiesel est fabriqué en France à partir d’huile extraite du colza et du tournesol, qui poussent sur place, du soja et du palmier qui sont importés, mais également à partir de graisses animales ou d’huile alimentaires usagées.

La place des agro carburants est en France encore minoritaire, à peu prés environ 2,5 % du total des carburants utilisés pour le transport routier, notre pays est cependant devenue le quatrième pays producteur d’agrocarburants.

L’un des objectifs de cette politique pour le moins volontariste était de conforter notre indépendance énergétique vis à vis des pays producteurs de pétrole et surtout de gazole, qui dans notre pays est largement développé du fait d’une politique fiscale très avantageuse, notamment pour les poids lourds.

L’Agence européenne de l’environnement indique que si l’on souhaite recourir à la biomasse pour couvrir 20 à 50 % des besoins énergétiques mondiaux dans les décennies à venir, il faudrait tripler la récolte planétaire. Pour couvrir les besoins de l’UE, les surfaces cultivées pour les biocarburants devraient augmenter de prés de 2 millions d’hectares d’ici à 2020, selon un rapport de l’Institut international de recherche sur les politiques alimentaires, ainsi que les importations d’huile de soja et de palme.

Les biocarburants utilisent en France pour la culture de leur matière première un peu moins de 6 % de la surface agricole utile, c’est-à-dire 1,7 Mha en 2010, dont 1,45 Mha pour le biodiesel et 250 000 ha pour le bioéthanol.
Soyons honnête,  les biocarburants sont partis d’un a priori positif, cela n’a pas duré, plusieurs raisons expliquent ce revirement, tant économiques, qu’environnementales …
Au niveau économique …
Il est bon de rappeler que les deux filières de l’agro carburant (éthanol et biodiesel) ont bénéficié, en 5 ans  de près de 2,65 milliards d’euros de défiscalisation de l’Etat (au titre de l’exonération partielle de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques , l’ex-TIPP), manque à gagner « essentiellement supporté par les consommateurs », selon le rapport.  Le plan de soutien aux agrocarburants a permis de développer considérablement cette industrie, grâce à des investissements massifs de 1,5 milliard d’euros, dans ce cadre, la filière biodiesel a bénéficié de soutiens dont le montant est supérieur à celui de ses investissements.
Constat, les biocarburants contiennent moins d’énergie par volume que les carburants classiques. Il faut en consommer plus pour effectuer un kilométrage donné. Une situation qui si elle rapporte plus de taxes à l’Etat, coûte plus cher à l’automobiliste qui doit mettre plus de carburant pour parcourir la même distance. Le bioéthanol permet ainsi de parcourir 68 km contre 100 pour l’essence, et le biodiesel 92 km contre 100 avec du gazole.
Au regard de ces performances, l’impact en termes d’indépendance énergétique n’est pas significatif, il faudrait pour cela que les taux d’incorporation soient plus élevés, ce qui exigerait deux contre parties : adapter les moteurs mais aussi étendre la superficie des surfaces dédiées aux agro carburants  pour satisfaire les besoins.
Au niveau environnemental …
Les changements d’affectation des sols (directs et indirects), entre des espaces autrefois occupés par des forêts notamment primaire (Amérique du Sud, Asie, Indonésie) ou de l’agriculture alimentaire, entraine une concurrence avec l’alimentation humaine, des atteintes considérables à la biodiversité, une déforestation qui diminue les capacités planétaires de capturer le carbone et ainsi augmente les émissions de gaz à effet de serre (GES).
D’après un rapport de Greenpeace, le biocarburant vendu en France, serait composé de 30 % d’huile de soja et d’huile de palme, importées d’Amérique du Sud.
L’envolée du prix des matières premières agricoles en 2008 a instauré une concurrence entre la production de biocarburants et celle de la nourriture pour les hommes ou animaux. Ce qui a causé un débat  vif opposant « nourriture contre biocarburants ». Notamment sur la priorité de l’affectation des sols, un débat qui n’est pas qu’hexagonal concernant également les terres des pays en développement au détriment des cultures alimentaires locales. Un rapport récent de la FAO dénonçait ainsi la responsabilité de cette industrie dans la hausse considérable des prix des denrées alimentaires depuis 2008. 40 % du maïs produit aux Etats-Unis et les deux tiers des huiles végétales de l’UE y seraient absorbés, selon la branche alimentaire de l’ONU.

La production des agro carburants entraine une agriculture de type intensive et polluante, que ce soit en termes d’émissions de CO2 ou en utilisation d’intrants afin d’optimiser les rendements des sols. Autre élément à prendre en compte, dans ce cadre les voitures et les camions continuent de privilégier du fait de l’utilisation d’agro carburant les énergies fossiles et les moteurs à explosion, roulent autant qu’avant, ce qui au niveau des émissions de GES est problématique car elles continuent à croitre !

Le constat de la Cour est qu’au terme de 15 ans de politique en faveur des biocarburants, les seuls équilibres  réellement modifiés par ces politiques sont de nature agricole. En ce qui concerne  l’indépendance énergétique ou la réduction des émissions de gaz à effet de serre, les résultats ne sont pas probants.

Les auteurs du rapport recommandent  « l’arrêt des subventions soutenant la production de biocarburants » et suggèrent d’accélérer la réduction de la défiscalisation actuelle, jusqu’à son extinction qu’il conviendrait d’envisager sans nouvel agrément pour 2015.

Autre préconisation : satisfaire les exigences de transparence vis-à-vis des citoyens, consommateurs et contribuables, en faisant clairement savoir à l’opinion si la politique en faveur des biocarburants est une vraie composante d’une politique de protection de l’environnement ou un simple volet d’une politique agro-industrielle, ce qui souligne les réserves exprimées par les sages de la rue Cambon.

Pour en savoir un peu plus 

Communiqué de presse

La synthèse du rapport

Le rapport

Genése d’une Appellation d’Origine Contrôlée

corto-ville-lune.jpgTout porteur de projet d’aménagement, qui s’implique réellement dans ce dernier, connaît le même dilemme … Quel nom ou dénomination attribuer à un morceau de ville et de vie dans lequel s’épanouiront des générations d’habitants ou d’usagers ?

C’est de fait une responsabilité très particulière.

Une ville ne peut pas être considérée comme un objet fini, mais bien comme le produit d’une véritable alchimie, toujours en cours, qui mêle tout à la fois histoire, géographie, culture, morphologie urbaine, environnement naturel, usages et imaginaire … Le tout s’entremêle et interagit …

Si par essence, un quartier est un condensé d’histoire et de vie collective et sociale, il respire et vit au quotidien, évolue, mute, se développe, se régénère quelquefois …

 

On ne dessine pas une ville, tel un objet fini, (cf le « dessine moi  … une ville » du Petit Prince au renard), on en représente plutôt le ressenti, reflet d’une histoire commune et partagée ou non, à un moment présent, éphémère, et pour tout dire intemporel.

Le projet d’éco quartier qui nous anime (voir billet du blog), possède entre autres particularités, une implication forte de ses acteurs et une volonté effective et assumée de rétro agir vers le territoire.

Avant d’être un projet urbain, cet éco quartier est déjà avant tout et surtout une aventure humaine collective, au service du lien social de proximité, témoignant également d’une réelle prise de conscience de la responsabilité particulière de l’homme envers son environnement.
Nous aurons l’occasion d’en reparler en 2012 dans ce blog, tant les choses ont évolué depuis ces derniers mois.

Les valeurs portées par ce projet sont tournées vers l’humain (habitat, liens sociaux et multi générationnels) avec une aspiration à atteindre une meilleure qualité du vivre ensemble dans un environnement plus harmonieux.

 

Alors quel nom justement pour cet Eco quartier ?

 

 

 

dedicace_pratt_banque_dessinee-212.jpg

 

 

Attribuer l’appellation « d’un lieu dit » aurait pu constituer une solution éventuelle ; mais un lieu dit définit par essence, un site avec son passé, son histoire, sa puissance évocative … or ce projet est multisites, sa finalité étant de rétro agir sur le territoire justement …

Il était important pour nous que le nom soit signifiant, et « porte » littéralement les valeurs initiales du projet, sans pour autant avoir de lien avec le concept finalement technique, connoté et réducteur d’éco-quartier (significative sans doute aujourd’hui mais demain ? ).

Ce projet, comme tant d’autres, se définit, se situe et se projette dans un présent qui est déjà, de fait, un futur proche «n’écrit on pas l’avenir aujourd’hui ?».
Il faut compter avec une certaine d’intemporalité, celle du temps qui passe …  Une ville est par essence un lieu où ce confronte les époques, les histoires mais qui constitue également un lieu de défis et de dépassement du soi « collectif » comme du présent vécu au quotidien …

Nous voulions pour ce nom, une vraie légitimité, voir une réelle autenticité, et non qu’il soit le fruit de l’imagination et du talent créatif d’un communiquant destiné à vendre un produit. Nous avons proposé à un panel d’élus et d’agents territoriaux de nous suggérer une liste de noms, ce qui a été fait …

 « l’Ancre de lune » est sorti du chapeau et du lot …

 

Aprés discussion, il a semblé à ce panel difficile de choisir un « nom descripteur », tant le risque était grand d’enfermer le projet, ses valeurs, atouts, potentiels et incertitudes dans des limites restrictives … Si la ville peut être évoquée de manière réaliste, ce qui fait sa force est avant tout sa dimension humaine et les perspectives qu’elle ouvre à ses habitants.
Notre panel a préféré s’éloigner des « canons traditionnels, et choisir un nom qui impulse une dynamique imaginative, représentative pour eux, d’un projet qui reste de l’ordre de l’hypothétique, de l’imaginaire, du rêve et qu’il faut rattacher, « ancrer », à la réalité. 

Avoir choisi un nom poétique pour ce quartier, c’est suggérer une histoire intemporelle restant encore et toujours à écrire, notamment par ses futurs habitants, afin qu’ils se l’approprient peu à peu.
Parler de sa ville de façon poétique, c’est avant tout insérer l’humain au coeur du projet,  et évoquer en contrepoint la vie, les peurs et les rêves de chacun et de tous.
Une ville ne peut être réduite à une liste sommative d’aménités, elle est aussi urbanité, civilité, humanité et proximité, avec les uns et les autres,  la nature, les bois et les champs qui l’entoure, les rythmes du jour et de la nuit ponctuant inexorablement le temps qui passe …

Ils nous ont proposé de placer la barre, sacrément haut, jusqu’à la lune, c’est dire !
Non pour la «décroisser», comme le chantait le Grand Jacques, mais bien pour l’ancrer un peu plus à notre quotidien, afin d’être à l’écoute de la planète, de ses cycles naturels et perpétuels, et de bâtir ensemble, aujourd’hui et demain, de nouvelles perspectives plus respectueuses d’une nature qui nous environne, nous protège et nous domine, mais qui demeure avant tout fragile, nous devons le retenir.

L’Ancre fait également référence, pour d’autres, à un pilotage à l’ancienne, qui au delà des aléas (vent, courant, marées, tempête …), permet de tenir le cap, en harmonie et en relation avec les étoiles, la nature et ses cycles, histoire de ne pas perdre le nord qu’il soit magnétique ou polaire …

Cap vers « l’Ancre de lune », afin d’ancrer un peu plus d’idéal dans nos quotidiens d’aujourd’hui et de demain …

Cela ne fait pas de mal, non, un peu d’idéal, surtout en ces périodes pour le moins moroses ?