Dimanche je voterais en mon âme et conscience et sans réserve contre le Front National.
J’aime trop la république, les valeurs que mes grands parents et parents m’ont inculqué pour me tromper de combat …
A ceux qui à droite, pronent le « Ni Ni », je répondrais simplement que l’histoire ne leur a rien appris, que les valeurs de la république ne se négocient pas, qu’ils ne s’honorent pas en prenant ainsi une position à des années lumière de l’idéal gaulliste, entrenant un flou qui ne peut les mener in fine qu’à leur perte.
Aux électeurs de gauche, qui interloqués et révoltés par le non positionnement honteux de l’UMP, se refusent à choisir entre « peste et choléra », je leur conseille de lire la tribune de Boris Cyrulnik, le père du concept de résilience nous y parle surtout de résistance, son histoire personnelle donne quelque peu de poids à ses propos …
Je comprends le désarroi de trop d’électeurs désabusées qui avec le sentiment d’être des oubliés de la république se tournent en désespoir de cause vers les promesses sans lendemain du parti frontiste. Je me refuse à les juger en m’arrêtant aux conséquences, je préfére m’attaquer directement aux causes du mal qui ne sont pas uniquement irrationnelles, mais malheureusement aussi très concrètes.
Je veux simplement leur rappeler qu’un scrutin local n’est pas un sondage d’impopularité nationale. Dimanche prochain, les électeurs désigneront des élus chargés de gérer, dés le lendemain de l’élection, des départements, dont le mandat est destiné à améliorer le quotidien des habitants, ce que trop souvent aveuglés par une colère que je peux comprendre, certains ont tendance à oublier et en désespoir de cause se tournent vers une photo d’inconnus dont ils ne connaissent rien et un simple logo… perspectives pour le moins réductrices …
Le vote de la semaine dernière illustre la fracture croissante entre Politique et citoyen, fracture béante et angoissante, dont les états majors parisiens doivent saisir à la fois la gravité, l’urgence et le risque démocratique.
La politique plus que jamais doit, non seulement se rapprocher de la vie réelle, mais en être l’incarnation, et ne plus rester la chasse gardée d’un sérail d’élèves de grandes écoles et de collaborateurs de cabinet isolés dans leur bulle médiatique et égotique, laissant à une technostructure hors sol la maitrise des dossiers.
Aussi, je n’ose imaginer la situation dans toutes ces villes et villages, notamment les plus pauvres, lorsque les baisses de dotations successives auront ébranlé durement ou détruit les digues de solidarité que les élus locaux s’efforcent de maintenir encore, envers et contre tous, malgré les aléas ou coups du sort que nous réservent certaines décisions en provenance de Paris !!!
Pour finir sur une note plus poétique, quelques vers de la magnifique poésie de Louis Aragon : « La rose et le réséda », repris hier par Christiane Taubira :
« Quand les blés sont sous la grêle
Fou qui fait le délicat
Fou qui songe à ses querelles
Au coeur du commun combat
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n’y croyait pas »
La vie de Boris Cyrulnik « dérape quand, alors qu’il a 2 ans, son père s’engage dans le 22e régiment des volontaires étrangers. A partir de ce moment-là, sa mère se retranche en elle-même. Elle le confie à l’Assistance publique, avant d’être arrêtée le 18 juillet 1942.
Ses parents mourront au camp d’extermination d’Auschwitz. « Comment vivre avec eux puis soudain sans eux ? Il ne s’agit pas d’une souffrance ; on ne souffre pas dans le désert, on meurt, c’est tout », analyse-t-il. De ces années, il ne se souvient de rien. Enorme trou noir de non-vie. Ses souvenirs reviennent quand son institutrice vient le chercher à l’Assistance. « Pour m’apprivoiser, elle avait apporté une boîte de morceaux de sucre et m’en donnait. »
« J’ai connu des régimes totalitaires, pendant et après la Seconde Guerre mondiale. On sait maintenant comment ils se préparent : il faut d’abord désigner des boucs émissaires de façon à orienter l’agression contre les étrangers et les parasites sociaux en affirmant que le gouvernement précédent les a laissés s’installer. Quand l’émotion est ainsi provoquée, les foules subjuguées sont faciles à manipuler.
Les discours totalitaires agissent sur les sentiments bien plus que sur la raison. Ils ne tiennent pas compte de la réalité qui est toujours plus nuancée et difficile d’accès.
A l’opposé, les débats démocratiques donnent la parole à plusieurs conceptions du monde. Ils sont plus laborieux, ils exigent des échanges et parfois des compromis, mais ils évitent les dictatures et les radicalisations sociales.
Je ne pensais pas qu’un jour, j’entendrais à nouveau des discours totalitaires qui renaissent dans le monde et en France.
Il est plus que jamais nécessaire de prendre position pour défendre nos valeurs républicaines. »
Boris Cyrulnik – 24 mars 2015