Qui n’a pas entendu parler du CDG express ?
Ce projet de liaison ferroviaire de 32 kilomètres entre Roissy Charles De Gaulle et la gare de l’Est devait permettre d’ici 2024 aux usagers fréquentant l’aéroport d’atteindre Paris en 20 minutes, pour 24 €, 365 jours sur 365, à raison de 4 rames / heure. D’un cout de 2,5 milliards d’euros, sa fréquentation potentielle est estimée à 6 millions d’usagers / an à sa mise en service (soit 20 000 / jours) pour atteindre 9 millions en 2050 (25 000 / jour).
La montée en puissance de l’aéroport de Roissy, avec la mise en service du futur Terminal 4, qui accueillira 80 millions de passagers en 2025, au lieu des 65 millions actuels, explique l’énergie déployée par ADP sur le dossier.
Tout semblait sur orbite, le CDG Express surmontant tous les recours déposés (tribunaux administratifs, Conseil d’Etat), enquêtes publiques, études, loi, prêt de l’Etat d’1,7 Mds € de l’Etat, travaux programmés, d’autant que l’attribution des JO 2024 est arrivé depuis.
Mais le projet connait actuellement un sérieux coup de frein. Critiqué depuis l’origine par des élus et associations de Seine-Saint-Denis, inquiets des nuisances occasionnées par 76 rames / jour supplémentaires, alors que les voyageurs ont toute opportunité d’utiliser aujourd’hui des taxis ou le RER B (30 minutes de voyages pour les directs), la fronde s’est élargie.
Une nouvelle levée des oppositions, alimentées par les conclusions de plusieurs rapports soulignant les impacts négatifs du chantier sur le quotidien des voyageurs des lignes K, E et P. Le seul RER B représentant 900 000 usagers quotidiens.
Beaucoup regrettent que les financements publics (SNCF Réseau, Caisse des Dépôts et Aéroports de Paris) alloués à une telle infrastructure ( 2,5 milliards), considérables, ne soient pas déployés et utilisés pour l’amélioration des trains du quotidien. Il est possible aussi que l’effet « gilets jaunes » et le coup de projecteur mis sur l’état désastreux des réseaux ferrés de proximité de la grande couronne francilienne aient joué.
Devant la levée de boucliers, Elisabeth Borne, Ministre des Transports a chargé le préfet de région Michel Cadot d’une mission de concertation, à l’issue de laquelle, il doit lui remettre un rapport en février.
Dans ce cadre, il recevait jeudi 24 janvier les collectifs d’usagers afin de les écouter et « de regarder l’ensemble des besoins de plages travaux, ou d’interruptions temporaires de circulation et de s’assurer qu’on ne va pas imposer des conditions intenables et dégradées aux usagers du RER B.
Mais les conséquences, si le CDG Express se confirme impacteront aussi considérablement le quotidien des usagers d’une ligne P, déjà bien malmenée !
L’objectif actuel poursuivit par le Préfet de Région ne semble pas être de remettre en cause la réalisation du CDG Express, mais plutôt « d’objectiver ces travaux et de voir si certains peuvent être décalés ou regroupés ». Il évoque même des bus de substitution, pas sur du tout que cela calme les opposants au projet.
Durant ses vœux, auxquels j’assistais, Valérie Pécresse, Présidente d’Île-de-France Mobilités (Autorité Organisatrice de Transports) a réaffirmé son « attachement au projet », tout en précisant qu’elle n’accepterait aucune dégradation de la qualité du service des transports quotidiens (sic).
Le Préfet Cadot tente de trouver des pistes rendant plus « compatibles » travaux du CDG Express et bon fonctionnement du RER B, quitte à recaler l’agenda de tous les chantiers ferroviaires au nord et à l’Est de Paris. Quand à l’acceptabilité, c’est une toute autre affaire.
Le CDG Express n’utilisant pas le tracé de la ligne P, en quoi peut il perturber ses usagers ?
Tout simplement, parceque c’est la gare de l’Est qui a été choisie pour accueillir le CDG EXPRESS et non la gare du Nord . Cette dernière, avec ses 200 millions d’usagers qui la place comme première gare européenne, est plus saturée que la gare de l’Est et ne peut accueillir dans des conditions optimales de confort un service destiné à la clientèle VIP en provenance de Roissy.
Qui peut croire que les 4 quais réquisitionnés et les 600 mètres de lignes utilisés par le CDG Express pour aller et venir dans la gare parisienne n’auront aucune incidence alors que celle ci abritant déjà difficilement des lignes TGV, des lignes TER et les lignes du quotidien dont la ligne P, dans un état lamentable tant au niveau des réseaux, du parc roulant que de la maintenance. Qui peut penser raisonnablement que la gare de l’Est n’est pas elle aussi, déjà saturée ?
Ce scenario ne tient pas compte des conclusions de l’excellent rapport du groupe de travail animé par Philippe Duron sur les infrastructures ferroviaires, qui avait fort justement souligné la saturation et la vétusté des nœuds ferroviaires des grandes gares parisiennes, dont Saint Lazarre ou encore la Gare de l’Est.
L’autre inquiétude, indirecte, mais tout aussi concrète, est la capacité « de faire » et de « mener de front », pour la SNCF et SNCF réseau ces 500 « travaux d’Hercule » : rénovation des lignes du quotidien, dans l’état de délabrement et de dégradation avancé que tout le monde connait, chantier du Grand Paris Express, il faudra bien un jour aborder les interconnections de ce véritable tonneau des Danaïdes, et celui du CDG Express.
Lorsque l’on constate la désorganisation actuelle autour des « petits » travaux de rénovation de la ligne P, la « qualité » de l’organisation et de la coordination, la « rapidité d’action » des opérations d’aménagement actuelles , on ne peut être qu’inquiets sur leur capacité d’agir et de faire.
En interne, beaucoup de responsables de l’entreprise, au regard du nombre d’ingénieurs et de techniciens à recruter, des sous traitants à trouver, doutent de leur capacité à réaliser « 500 projets entre 2018 et 2024 », et à mener de front les différents chantiers lancés.
Il y a fort à parier, qu’une fois encore et une fois de plus, ce soient les usagers du quotidien qui se retrouvent les dindons d’une farce qui n’a que trop durer.
Non effectivement, pour les usagers de la ligne P, le CDG Express ne constituent pas une priorité, tant que nos lignes de proximité n’aient pas retrouvé un état, simplement normal et serein …
D’un coté 2 milliards d’euros pour 10 minutes de gagner pour 20 000 usagers / jour, de l’autre des centaines de millions d’euros pour que cessent enfin la galère quotidienne d’un million d’usagers.
Le choix est on ne peut plus simple à faire
2 réponses sur “Pourquoi les usagers de la ligne P doivent ils craindre le CDG Express ?”
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