14-18, terrible source d’inspiration

onze-novembre.jpgLes commémorations sont des moments utiles qui contribuent à forger la citoyenneté d’une nation, mais plus encore de ses jeunes habitants qui en ont grandement besoin.
Ces instants de recueillement national sont précieux, pour l’unité du pays mais constituent aussi un devoir de mémoire et une marque  de respect envers tout ceux qui sont tombés donnant leur sang à leur patrie, qu’elle soit d’une rive du Rhin ou de l’autre.

L’occasion également de souligner que le terrible et dramatique conflit qu’a été la guerre de 1914 1918, a paradoxalement inspiré toute une génération d’artistes, avant, pendant et après le champ de bataille …

Du néant peut quelquefois sortir la lumière … La faute à la vie quotidienne dans les  tranchées, à ces journées interminables rythmées par le vacarme incessant des obus qui tombent et explosent aux alentours immédiats, à la présence d’une peur tenace, inséparable des terribles nuits des poilus, à la proximité quasi charnelle de la mort, compagne lancinante au combien fidèle, autant d’éléments qui constituent des sources d’inspiration puissantes.
Sans omettre l’aventure humaine qui se joue à chaque seconde dans les tranchées, véritable condensé des sentiments exacerbés qui se mêlent et s’entrecroisent, ou l’atroce voisine le grotesque voir le pathétique, ou le rire flirte avec l’émotion et le drame tutoie la légèreté… Beaucoup d’hommes, le soir, à la veillée, dans les casemates ou les tranchées, qu’ils soient illustres ou anonymes, ont évacué comme ils le pouvaient leurs idées noires grâce à la création artisanale ou artistique.

Ces créateurs, comme tous les soldats du front, étaient de nationalité française ou non, leur couleur de peau comme leur lieu de naissance importait peu, car tous étaient français de cœur et de sang versé ! Tel le suisse Blaise Cendrars, ou encore le russe d’origine polonaise, Wilhelm Apollinaris de Kostrowitzky, plus connu chez nous depuis sous le nom de Guillaume Apollinaire, qui a tout fait pour être en première ligne. Il restera à jamais le blessé à la tête bandée immortalisé par Picasso, suite à l’éclat d’obus reçut à la tempe en mars 1916 au pied du Chemin des Dames.
Ils ont donné à notre pays, comme toute ces générations sacrifiées, jeunesse, joie et espérance, mais aussi trop souvent leur vie ! Leur sang étant l’encre indélébile qui a permis d’écrire des pages cruciales de l’histoire de l’Europe et du monde moderne.

Guillaume Apollinaire s’est éteint deux jours avant la signature de l’armistice du 11 novembre 1918, à l’âge de 38 ans, victime de la grippe espagnole …. Il a cependant pu, peu avant sa mort, publié un recueil de poésie : Calligrammes, « poèmes de la paix et de la guerre » dédié à un de ses amis tombé au chemin des Dames.
J’en ai tiré un poème « La Petite Auto » qui témoigne que la Grande Guerre n’a pas seulement était une tragédie, incontestable, véritable boucherie sans nom, mais qu’elle marque définitivement la fin d’une époque et l’arrivée d’un temps nouveau, ici comme partout sur la planète.

Ce centenaire sera, en 2014, l’occasion de rendre hommage, à tous les combattants de toutes les nations, qui sont tombés sur le champ d’horreur, de quelque coté qu’ils soient, afin de célébrer et porter, au nom de leur mémoire, un message de paix pour les générations futures.

 

 

 

 

guillaume appollinaire.jpg

 

La petite auto

 

Le 31 du mois d’Août 1914

Je partis de Deauville un peu avant minuit

Dans la petite auto de Rouveyre

Avec son chauffeur nous étions troi

Nous dîmes adieu à toute une époque

 

    Des Géants furieux se dressaient sur l’Europe

    Les aigles quittaient leur aire attendant le soleil

    Les poissons voraces montaient des abîmes

    Les peuples accouraient pour se connaître à fond

    Les morts tremblaient de peur dans leurs sombres demeures

    Les chiens aboyaient vers là-bas où étaient les frontières

 

    Je m’en allais portant en moi toutes ces armées qui se battaient

    Je les sentaient monter en moi et s’étaler les contrées où elles

    serpentaient

Avec les forêts les villages heureux de la Belgique

    Francorchamps avec l’Eau Rouge et les pouhons

    Région par où se font toujours les invasions

    Artères ferroviaires où ceux qui s’en allaient mourir saluaient encore

    une foie la vie colorée

    Océans profonds où remuaient les monstres

    Dans les vieilles carcasses naufragées

    Hauteurs inimaginables où l’homme combat

    Plus haut que l’aigle ne plane

    L’homme y combat contre l’homme

    Et descend tout à coup comme une étoile filante

 

    Je sentais en moi des êtres neufs pleins de dextérité

    Bâtir et aussi agencer un univers nouveau

    Un marchant d’une opulence inouïe et d’une taille prodigieuse

    Disposait un étalage extraordinaire

    Et des bergers gigantesques menaient

    De grands troupeaux muets qui broutaient les paroles

    Et contre lesquels aboyaient tous les chiens sur la route

 

    Et quand après avoir passé l’après-midi

    Par Fontainebleau

    Nous arrivâmes à Paris

    Au moment où l’on affichait la mobilisation

    Nous comprîmes mon camarade et moi

    Que la petite auto nous avait conduits dans une époque

    Nouvelle

    Et bien qu’étant déjà tous deux des hommes mûrs

    Nous venions cependant de naître »

Admettre le fait péri urbain

Trilport, une ville à la campagne, entre Marne et Forêts

Avec le vote du Schéma Directeur régional d’Ile de France, la création de la Métropole du Grand Paris, la publication de récents ouvrages ou l’envolée du vote FN dans certains territoires, le fait péri urbain est devenu une réalité incontournable qui fait désormais l’actualité. Indéniablement il existe, je l’ai rencontré, le vis au quotidien comme citoyen mais aussi élu local.

Prenons l’Ile de France, région la plus riche du pays (18% de la population nationale, 30% des richesses). Si toutes ses communes appartiennent à l’aire urbaine de Paris, plus des trois quart (85%) avec moins de 2000 habitants, notamment en Seine et Marne, sont considérées comme  péri urbaines. Peut on pour autant les classer en France métropole (note précédente)?
Non, un seine et marnais ne dispose pas tout à fait des mêmes facilités qu’un habitant de Paris ou de la Petite Couronne; et encore il existe une Seine et Marne des villes et une Seine et Marne des champs ! Ce département connait une croissance démographique ininterrompue depuis plus de 20 ans : foncier disponible, prix attractif, proximité apparente avec la région parisienne …

Autant d’arguments qui attirent de nombreuses familles, mais au quotidien, la réalité se révèle plus contrastée. La proximité avec Paris est toute relative, au regard de la congestion routière, du manque d’infrastructures en transport en commun, de la saturation d’un réseau ferré sous dimensionné et de l’absence quasi totale de multi modalité. L’organisation actuelle des transports remonte aux années 70, c’est dire, et ce, malgré les efforts déployés par le STIF depuis 2006. Trop souvent, dans le 77 se déplacer s’apparente à un parcours du combattant, que ce soit en voiture ou en transport en commun !

Comment en période de disette budgétaire rattraper 50 ans de sous investissement et financer dans le même temps le réseau du Grand Paris ?

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Schiste l’après décision du Conseil Constitutionnel

schiste.jpgEn 2010, le gouvernement Fillon avait accordé à certaines compagnies pétrolière américaines, Jean Louis Borloo était alors en responsabilité de ces dossiers, des autorisations leur permettant d’explorer le sous sol du pays afin de rechercher les gisements éventuels de gaz ou d’huile de schistes.
Ces compagnies avaient alors commencé leur travaux d’implantation afin de débuter leurs forages, sans informer au préalable populations et élus locaux.

Devant les risques environnementaux avérés, les associations de défense de l’environnement et les élus locaux, notamment en Seine et Marne (cf note précédente) se sont mobilisés en nombre. Cette prise de conscience collective a amené le gouvernement à faire machine arrière, ce dont nous nous sommes réjouis à l’époque et Christian Jacob a déposé une proposition de loi (loi n° 2011-835 du 13 juillet 2011) visant à interdire l’exploration et l’exploitation des mines d’hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique, abrogeant les permis exclusifs de recherches recourant à cette seule technique.

La société texane Schuepbach, une des compagnies concernés, dont deux des permis miniers avaient été annulés courant octobre 2011, a contesté la constitutionnalité des articles 1 et 3 de cette loi auprès du Tribunal Administratif de Cergy-Pontoise, via une question prioritaire de constitutionnalité transmise ensuite au Conseil d’Etat puis au Conseil constitutionnel. Ce dernier a rendu vendredi dernier sa décision.

Dans son arrêt il a précisé que le législateur « a poursuivi un but d’intérêt général de protection de l’environnement », et que « la restriction apportée tant à la recherche qu’à l’exploitation des hydrocarbures ne revête pas, en l’état des connaissances et des techniques, un caractère disproportionné au regard de l’objectif poursuivi ».

C’est un signal fort envoyé aux détenteurs de permis abrogés, aux lobbies de l’industrie pétrolière, mais également un soutien important pour les riverains des zones d’exploration ou d’exploitation potentielles, dont de nombreuses Seine-et-Marnais (Doue, Jouarre). Cette décision constitue également une garantie de protection pour la sauvegarde des nappes phréatiques, capital dans notre région, et le maintien de l’intégrité des terres agricoles, enjeu de premier plan pour notre pays, tant la fracturation hydraulique présente des risques sérieux pour la sauvegarde de l’environnement.

Il faut souligner que, dans l’attente de la révision du Code Minier (entièrement à revoir, notamment sur le volet concertation),  le texte actuel de la loi n° 2011-835 du 13 juillet 2011 n’écarte ni l’exploration des gisements, ni l’utilisation d’autres technologies que la fracturation hydraulique. Ce qui m’a amené a proposé le vote d’une Motion, en Conseil Municipal.

Je vous prie de trouver ci joint, le texte voté à l’unanimité, ce Vendredi 18 octobre

 

 

 

Motion votée par le Conseil Municipal de Trilport 

(unanimité)

 

« Mobilisés depuis 2010 dans la lutte contre l’exploration et l’exploitation des huiles de schiste par fracturation hydraulique, les élus du Conseil Municipal de Trilport se félicitent que le Conseil constitutionnel ait répondu à la Question Prioritaire de Constitutionnalité déposée par la société Schuepbach en validant la constitutionnalité des articles 1 et 3 de la loi n° 2011-835 du 13 juillet 2011, dite loi Jacob

Avec le souci de préserver le patrimoine naturel, la qualité des nappes phréatiques, l’activité agricole et de permettre aux habitants des territoires directement impactés par ces projets, dont de nombreux Seine et Marnais, de vivre en toute quiétude et sans crainte pour des éléments vitaux comme la qualité de l’eau ou de l’air, les élus de Trilport réunis en Conseil Municipal demandent :

 

o l’abrogation des permis d’exploitation et d’exploration des gisement d’huiles ou de gaz de schiste accordés y compris à titre expérimental, reposant sur la technique de la fracturation hydraulique

o que la plus grande transparence soit établie en matière de concertation et d’information, tant au niveau des élus locaux, que des populations directement et indirectement concernées, afin qu’ils puissent se positionner en totale connaissance des risques environnementaux ou sanitaires éventuels

o l’interdiction totale de tels forages, y compris à titre expérimental tant que la technique utilisée présente un risque environnemental avéré pour la qualité des eaux, l’intégrité des terres agricoles et naturelles, et ne soit un facteur de dégradation de la vie économique locale existante ou de risques pour les patrimoines publics et privés.

 

Ils soulignent également

o les limites du texte de loi actuel qui n’interdit que le recours à la technique de la fracturation hydraulique pour exploiter de tels gisements, autorisant de fait l’utilisation de tout autres technologies encore non-évaluées.»

 

 

La puissance d’un tweet

votre tele et vous.jpgC’est peu de dire que le manque de rigueur et d’éthique des journalistes de l’émission « Des paroles et des actes » dont l’invité était Christine Taubira m’a interpellé.
J’ai réagis en envoyant un tweet le soir même puis un mel le lendemain au médiateur de l’information de France Télévision, Nicolas Jacobs, afin d’exprimer le fond de ma pensée. Pour être tout à fait honnête, une telle réaction est une première pour moi, mais l’émission de Pujadas a été  la goutte d’eau de trop, un quasi point de non retour.

 A ma grande surprise Nicolas Jacobs m’a contacté suite à ce mel, puis après une longue discussion m’a proposé de participer à l’émission mensuelle animée par Marie Laure Augry sur la 3 « Votre télé et vous ».
Ce que j’ai accepté, étant très attaché à la télé publique, par culture et histoire personnelle. Ma conscience de citoyen s’est forgée en partie autour de certaines émissions des chaines publiques, notamment politiques, qui ont marqué ma jeunesse comme celle de tant d’autres. Les paroles mais aussi les silences, avait alors non seulement du poids, de la consistance, mais aussi et surtout, du sens. Pour l’interviewer, seules les réponses importaient alors, non ses questions.

De vrais temps forts structurant, éveillant les consciences, traitant du fond, apportant des clés de lecture et de décryptage utiles, évacuant la facilité, l’écume médiatique, le sensationnel, le superficiel ou le superflu… L’émission de Pujadas en est malheureusement à des années lumière.
C’est pour exprimer tout cela que j’ai participé à l’émission de Marie Laure Augry, dont les deux volets sont accessibles par internet  (émission et bonus internet du 25 septembre 2013).

Tout a en fait commencé par un tweet, c’est la force des réseaux sociaux :

«#DPDA #pujadas @chtaubira : Au secours Desgraupes ils sont devenus fous : l’indignité de Pujadas»

Mais, je vous propose d’aller un peu plus loin que ses 140 caractères …

 

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Deux cent ans après …

grognards4.jpgCe samedi, les grognards de l’empereur étaient de retour à Trilport : prise d’arme devant la Mairie (Place Albert Camus), défilé au son des fifres et tambours dans les rues de la ville. Ils y ont effectué une étape bienvenue avant de grimper jusqu’à Montceaux les Meaux et de redescendre ensuite, dans le même après midi, au village de Saint Jean Les deux Jumeaux.
Soulignons l’exigence et le soin apportée par les participants de cette reconstitution grandeur nature, que ce soit dans les costumes, l’exécution toute militaire des défilés, les attitudes, jusqu’aux chants accompagnant leur marche …  Ils nous ont offert un saut dans le temps pour le moins déroutant.
Ayons une pensée émue pour tous les fantassins qui, arborant de splendides bottes de sept lieux, risquent fort de se voir gratifier d’ici demain de magnifiques ampoules illuminées aux pieds.

Cette initiative originale, a été initié pour commémorer un épisode peu connu de la geste napoléonienne, celui de la bataille de la Marne de mars 1814, qui a été l’un des derniers combats de l’empereur. Cette idée invraisemblable, tout était à construire, François La Burthe, avocat passionné d’histoire Napoléonienne a su la faire partager au travers de l’association qu’il a créé « les Grognards de la Marne ». Avec son bâton de pèlerin, véritable bâton de maréchal, il a convaincu les différentes villes et villages de participer à l’événement, d’y contribuer même, en prenant le plus grand soin de préserver son coté populaire, fédérant autour de ce projet des compétences multiples et variées, allant de l’universitaire reconnu, au cavalier émérite et à la cantinière anonyme.
Nous avons soutenu cette initiative hors norme dés l’origine, contribuant comme tant d’autres, à la magnifique réussite de ce week end. Merci à toutes les chevilles ouvrières locales qui ont oeuvré avec beaucoup de coeur et de passion, avec une dédicace tout particulière à Geneviéve Leguay.

Cette commémoration a généré localement toute une série d’animations : conférences, dont une passionnante à Trilport il y a quelques mois, marche entre Trilport et Saint-Jean, bivouac à Montceaux-lès-Meaux, marché paysan, bal des officiers, expositions de peinture, pièces de théâtre et in fine une reconstitution grandeur nature de la fameuse bataille. Une initiative bienvenue qui aura eu également le mérite de préserver 5 emplois d’insertion (réalisation des costumes historiques) grâce à  l’activité de l’association Germinal.

Si c’est 2013 qui a été choisie plutôt que 2014, c’est afin d’éviter toute collision avec deux évènements qui nous attendent dans les prochains mois : les élections municipales mais aussi et surtout les cérémonies de commémoration de la grande guerre, qui a durement marqué notre territoire.

Je remercie les Grognards de la Marne d’avoir choisi Trilport comme ville étape. C’est effectivement ici, sur cette terre de Brie, qu’avec l’énergie du désespoir, les gardes nationaux, armée du peuple s’il en est, ont affronté et résisté longuement aux forces de la 6eme coalition, avant de plier …

Il y a quasiment deux cent ans.

 

 

grognards.jpg

La  Marne a depuis son origine bercée l’histoire de notre ville qui s’est développée à son contact. Tout d’abord grâce à l’aménagement d’un gué, puis d’un bac, et enfin de ponts reliant deux territoires voisins, hier opposés : les terres de Champagne et les terres de Brie.
C’est dire que Trilport a été durant des siècles un site hautement stratégique, du fait de son pont située directement sur la route d’Allemagne. La ville une des clés maitresses qui mènent a Paris a  vu passer durant les siècles, bien des armées étrangères en provenance de l’Est, qu’elles soient prussiennes ou allemandes.
Si la bataille  de la Marne reste associée à la Grande Guerre de 1914-1918, elle a été précédée, peu s’en souviennent, un siècle auparavant d’un épisode marquant les derniers jours du Premier Empire et qui ont constitué un véritable point de non retour pour Napoléon 1er, lors de la campagne de France qui s’est déroulée de janvier à avril 1814, elle a été capitale pour Napoléon Ier qui a tenté d’arrêter l’invasion du pays et de conserver son trône.

En février et mars 1814 des centaines de millier de soldats russes et prussiens font leur jonction à Saint-Jean-les-Deux-Jumeaux et Trilport avec l’objectif de franchir la Marne pour arriver jusqu’à Paris. Durant cette bataille, le Maréchal d’Empire MacDonald fait sauter le pont de Trilport dans la nuit du 9 au 10 février pour ralentir l’avance des assaillants, le pont de pierre étant remplacé par un pont de 8 bateaux. Malgré cette initiative, et contrairement aux terribles combats de la bataille de la Marne qui marqueront durablement et durement un siècle plus tard ce territoire, « les digues lâcheront », l’ennemi passera, franchira la Marne et atteindra Paris.

La poignée d’hommes, renforcée de la Garde Nationale locale composée des habitants des villes et villages locaux qui tente d’arrêter depuis le plateau de Saint Jean jusqu’à Trilport les troupes ennemies est de loin bien inférieure en nombre aux forces ennemies, diminuée vu les pertes humaines subies lors de la campagne de Russie et surtout trés inexpérimentée, principalement composé de jeunes conscrits, les fameux  « Marie-Louise ». Elle n’a pas malheureusement fait long feu et a du plié.

L’histoire retiendra que si Napoléon parvient à infliger plusieurs revers aux troupes ennemies, il sera submergé par les différentes armées de la 6eme coalition, dont certaines commandées par ses anciens généraux. L’entrée des troupes prussiennes et russes dans Paris, beaucoup ayant passé part Trilport marque sa défaire, il abdique le 6 avril 1814 à Fontainebleau avant de partir en exil.

L’expiation, par Victor Hugo

Lors de la célébration à Montceaux les Meaux, un des participants a déclamé un extrait de ces magnifiques vers. Moment magique, empli d’émotion, on entendait une mouche volé, à savourer sans modération tant la langue française est belle et a du sens lorsqu’elle est écrite ainsi …

Il neigeait. On était vaincu par sa conquête.

Pour la première fois l’aigle baissait la tête.

Sombres jours ! l’empereur revenait lentement,

Laissant derrière lui brûler Moscou fumant.

Il neigeait. L’âpre hiver fondait en avalanche.

Après la plaine blanche une autre plaine blanche.

On ne connaissait plus les chefs ni le drapeau.

Hier la grande armée, et maintenant troupeau.

On ne distinguait plus les ailes ni le centre.

Il neigeait. Les blessés s’abritaient dans le ventre

Des chevaux morts ; au seuil des bivouacs désolés

On voyait des clairons à leur poste gelés,

Restés debout, en selle et muets, blancs de givre,

Collant leur bouche en pierre aux trompettes de cuivre.

Boulets, mitraille, obus, mêlés aux flocons blancs,

Pleuvaient ; les grenadiers, surpris d’être tremblants,

Marchaient pensifs, la glace à leur moustache grise.

Il neigeait, il neigeait toujours ! La froide bise

Sifflait ; sur le verglas, dans des lieux inconnus,

On n’avait pas de pain et l’on allait pieds nus.

Ce n’étaient plus des cœurs vivants, des gens de guerre :

C’était un rêve errant dans la brume, un mystère,

Une procession d’ombres sous le ciel noir.

La solitude vaste, épouvantable à voir,

Partout apparaissait, muette vengeresse.

Le ciel faisait sans bruit avec la neige épaisse

Pour cette immense armée un immense linceul.

Et chacun se sentant mourir, on était seul.

 

– Sortira-t-on jamais de ce funeste empire ?

Deux ennemis! le czar, le nord. Le nord est pire.

On jetait les canons pour brûler les affûts.

Qui se couchait, mourait. Groupe morne et confus,

Ils fuyaient ; le désert dévorait le cortège.

On pouvait, à des plis qui soulevaient la neige,

Voir que des régiments s’étaient endormis là.

Ô chutes d’Annibal ! lendemains d’Attila !

Fuyards, blessés, mourants, caissons, brancards, civières,

On s’écrasait aux ponts pour passer les rivières,

On s’endormait dix mille, on se réveillait cent.

Ney, que suivait naguère une armée, à présent

S’évadait, disputant sa montre à trois cosaques.

Toutes les nuits, qui vive ! alerte, assauts ! attaques !

 

Ces fantômes prenaient leur fusil, et sur eux

Ils voyaient se ruer, effrayants, ténébreux,

Avec des cris pareils aux voix des vautours chauves,

D’horribles escadrons, tourbillons d’hommes fauves.

Toute une armée ainsi dans la nuit se perdait.

L’empereur était là, debout, qui regardait.

Il était comme un arbre en proie à la cognée.

Sur ce géant, grandeur jusqu’alors épargnée,

Le malheur, bûcheron sinistre, était monté ;

Et lui, chêne vivant, par la hache insulté,

Tressaillant sous le spectre aux lugubres revanches,

Il regardait tomber autour de lui ses branches.

Chefs, soldats, tous mouraient. Chacun avait son tour.

Tandis qu’environnant sa tente avec amour,

Voyant son ombre aller et venir sur la toile,

Ceux qui restaient, croyant toujours à son étoile,

Accusaient le destin de lèse-majesté,

Lui se sentit soudain dans l’âme épouvanté.

Stupéfait du désastre et ne sachant que croire,

L’empereur se tourna vers Dieu ; l’homme de gloire

Trembla ; Napoléon comprit qu’il expiait

Quelque chose peut-être, et, livide, inquiet,

Devant ses légions sur la neige semées :

« Est-ce le châtiment, dit-il. Dieu des armées ? »

Alors il s’entendit appeler par son nom

Et quelqu’un qui parlait dans l’ombre lui dit : Non.

 

 

Waterloo ! Waterloo ! Waterloo ! morne plaine !

Comme une onde qui bout dans une urne trop pleine,

Dans ton cirque de bois, de coteaux, de vallons,

La pâle mort mêlait les sombres bataillons.

D’un côté c’est l’Europe et de l’autre la France.

Choc sanglant ! des héros Dieu trompait l’espérance ;

Tu désertais, victoire, et le sort était las.

O Waterloo ! je pleure et je m’arrête, hélas !

Car ces derniers soldats de la dernière guerre

Furent grands ; ils avaient vaincu toute la terre,

Chassé vingt rois, passé les Alpes et le Rhin,

Et leur âme chantait dans les clairons d’airain !

 

Le soir tombait ; la lutte était ardente et noire.

Il avait l’offensive et presque la victoire ;

Il tenait Wellington acculé sur un bois.

Sa lunette à la main, il observait parfois

Le centre du combat, point obscur où tressaille

La mêlée, effroyable et vivante broussaille,

Et parfois l’horizon, sombre comme la mer.

Soudain, joyeux, il dit : Grouchy ! – C’était Blücher.

L’espoir changea de camp, le combat changea d’âme,

La mêlée en hurlant grandit comme une flamme.

La batterie anglaise écrasa nos carrés.

La plaine, où frissonnaient les drapeaux déchirés,

Ne fut plus, dans les cris des mourants qu’on égorge,

Qu’un gouffre flamboyant, rouge comme une forge ;

Gouffre où les régiments comme des pans de murs

Tombaient, où se couchaient comme des épis mûrs

Les hauts tambours-majors aux panaches énormes,

Où l’on entrevoyait des blessures difformes !

Carnage affreux! moment fatal ! L’homme inquiet

Sentit que la bataille entre ses mains pliait.

Derrière un mamelon la garde était massée.

La garde, espoir suprême et suprême pensée !

« Allons ! faites donner la garde ! » cria-t-il.

Et, lanciers, grenadiers aux guêtres de coutil,

Dragons que Rome eût pris pour des légionnaires,

Cuirassiers, canonniers qui traînaient des tonnerres,

Portant le noir colback ou le casque poli,

Tous, ceux de Friedland et ceux de Rivoli,

Comprenant qu’ils allaient mourir dans cette fête,

Saluèrent leur dieu, debout dans la tempête.

Leur bouche, d’un seul cri, dit : vive l’empereur !

Puis, à pas lents, musique en tête, sans fureur,

Tranquille, souriant à la mitraille anglaise,

La garde impériale entra dans la fournaise.

Hélas ! Napoléon, sur sa garde penché,

Regardait, et, sitôt qu’ils avaient débouché

Sous les sombres canons crachant des jets de soufre,

Voyait, l’un après l’autre, en cet horrible gouffre,

Fondre ces régiments de granit et d’acier

Comme fond une cire au souffle d’un brasier.

Ils allaient, l’arme au bras, front haut, graves, stoïques.

Pas un ne recula. Dormez, morts héroïques !

Le reste de l’armée hésitait sur leurs corps

Et regardait mourir la garde. – C’est alors

Qu’élevant tout à coup sa voix désespérée,

La Déroute, géante à la face effarée

Qui, pâle, épouvantant les plus fiers bataillons,

Changeant subitement les drapeaux en haillons,

A de certains moments, spectre fait de fumées,

Se lève grandissante au milieu des armées,

La Déroute apparut au soldat qui s’émeut,

Et, se tordant les bras, cria : Sauve qui peut !

Sauve qui peut ! – affront ! horreur ! – toutes les bouches

Criaient ; à travers champs, fous, éperdus, farouches,

Comme si quelque souffle avait passé sur eux.

Parmi les lourds caissons et les fourgons poudreux,

Roulant dans les fossés, se cachant dans les seigles,

Jetant shakos, manteaux, fusils, jetant les aigles,

Sous les sabres prussiens, ces vétérans, ô deuil !

Tremblaient, hurlaient, pleuraient, couraient ! – En un clin d’œil,

Comme s’envole au vent une paille enflammée,

S’évanouit ce bruit qui fut la grande armée,

Et cette plaine, hélas, où l’on rêve aujourd’hui,

Vit fuir ceux devant qui l’univers avait fui !

Quarante ans sont passés, et ce coin de la terre,

Waterloo, ce plateau funèbre et solitaire,

Ce champ sinistre où Dieu mêla tant de néants,

Tremble encor d’avoir vu la fuite des géants !

 

Napoléon les vit s’écouler comme un fleuve ;

Hommes, chevaux, tambours, drapeaux ; – et dans l’épreuve

Sentant confusément revenir son remords,

Levant les mains au ciel, il dit: « Mes soldats morts,

Moi vaincu ! mon empire est brisé comme verre.

Est-ce le châtiment cette fois, Dieu sévère ? »

Alors parmi les cris, les rumeurs, le canon,

Il entendit la voix qui lui répondait : Non !

 

Victor Hugo

Les Châtiments – Livre cinquième – L’autorité est sacrée

 

 

Etes vous France périphérique ou métropole ?

La-crise-qui-vient.jpgAvant l’été le résultat aux législatives de Villeneuve sur Lot, avec une poussée remarquée du FN avait fait couler beaucoup d’encre.
Il convient d‘aborder cette élection sans fausse pudeur, langue de bois ou recherche de boucs émissaires inutile, sous peine de voir les mêmes causes reproduire les mêmes effets. Qu’on le veuille ou non, ce vote est signifiant et pourrait n’être d’ici quelques mois qu’un signe annonciateur d’une évolution encore plus brutale.

Si le cas Cahuzac a joué,  tant il interpelle, déstabilise et écœure nombre d’électeurs (on le serait à moins !), le contexte économique et social a également compté. La crise touche au plus profond nos villes et campagnes (chômage, baisse du pouvoir d’achat, sinistrose), paradoxalement l’offre politique ne propose pas, ou peu, de perspectives visibles et crédibles.

Du fait de cette absence  nos concitoyens ont le plus grand mal à se projeter dans un futur « positif  et heureux». Réformer le pays, pourquoi pas estiment ils ? Mais comment ? Pour aller où et devenir quoi ? Tant que les partis traditionnels n’apporteront pas de réponses claires à ces questions simples, ils ne seront, ni crédibles, ni audibles.

Dans des registres différents des ouvrages récents (Christophe Guilluy, Laurent Davezies, Herve Le Bras), explorent les fractures sociales du pays et décrivent deux mondes littéralement opposés : la « France des métropoles », qui dispose des capacités à s’adapter à la mutation en cours, et les autres territoires, qu’ils soient péri-urbains (nous y reviendrons), ruraux ou industriels, fragilisés par l’impact des délocalisations, du chômage, ébranlés par la déliquescence des services public, ceux que Christophe Giully réunit sous l’appellation « France périphérique ».

Si cette « France » n’est pas encore perdue, elle est pour l’heure déconnectée. Les médias en parlent pas, ou peu, excepté les lendemains d’élection, tant ce pays « invisible » est éloigné des sunlights des leaders d’opinion ou des lieux de pouvoir.
Conséquence, ces terres constituent autant de points d’accroche pour les idées dites « populistes » et c’est le Front National qui en tire principalement avantage. Car ce nouveau contexte a été totalement assimilé par Marine Le Pen, il est même à l’origine du recentrage idéologique et des nouvelles positions sur les services publics et l’action de l’Etat du mouvement d’extrême droite. Climat favorisé par l’atmosphère anxiogène que certains s’évertuent à accentuer, nourrissant un terreau de plus en plus perméable au chant des sirènes des populismes de tout bord et des « Y’ qu’à « , «  Faut qu’on ».

 

 

La transformation en profondeur du pays accentue ces fractures, tant elle renforce les territoires forts et affaiblit à contrario les autres, qui accueillent de plus en plus de populations en difficulté. La réforme des collectivités en cours risque de renforcer ces inégalités dans un contexte de disette budgétaire qui fragilisera encore plus les « maillons faibles ».

La France périphérique apparaît comme le négatif de la France des Métropoles ; composée principalement de collectivités sans grands moyens financiers qui risquent d’être totalement déstabilisées par les restrictions budgétaires annoncées pour 2014 et 2015 qui obligeront les moins fortunées, non à tailler dans le gras des dépenses inutiles, mais dans le muscle de l’action publique, ce qui impactera inévitablement les politiques locales initiées et les investissement des collectivités.

Ce dualisme est il factice, schématique, artificiel, illusoire, ou erroné ? Où situer le péri urbain dans ces deux France ?

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