L’Oasis, lieu de tous les possibles …

Certaines inaugurations marquent plus que d’autres, ce n’est pas l’ampleur de la réalisation qui en font la valeur mais bien d’autres critères. Celle de L’Oasis, à bien des égards, est de cet acabit et restera longtemps dans ma mémoire, tant ce lieu souligne notre capacité collective à rebondir face à un aléa malheureux (ici la faillite d’une usine), agir pour sauvegarder un élément symbolique et important de notre patrimoine, oser innover, le faire collectivement en embarquant nos partenaires et concitoyens autour de valeurs communes afin de construire, ensemble, de nouvelles perspectives.

L’Oasis est située au cœur du site Nugue, friche industrielle depuis 2022, alors que cette usine, témoignage précieux de l’architecture du siècle dernier et du dynamisme d’une France industrielle exportait autrefois ses produits et sa technologie partout sur la planète. Elle a été durant plus d’un siècle un des cœurs battants du territoire, un site véritablement emblématique de Trilport : par sa valeur patrimoniale, sa qualité architecturale et urbaine, comme sa localisation : en cœur de ville, à proximité directe de la gare et d’un sentier de grande randonnée (GR 15).
Il faut souligner également la singularité du lieu, issue de son histoire, de la configuration plus que particulière de son environnement, d’une architecture industrielle laissant une large place à la lumière naturelle.
Nous y avons créé un lieu partagé, placé à la convergence de problématiques sociales et sociétales aussi majeures que celle des usages du numérique, du lien social, de l’aménagement du territoire ou de l’action culturelle. Originalité, une dimension hybride et ouverte totalement assumée et revendiquée qui nécessite cependant d’être en résonance avec son territoire.

Ce projet souligne la valeur ajoutée de deux programmes nationaux dans lesquels Trilport est totalement engagée : le programme « Petites Villes de Demain » et le Plan « France Numérique Ensemble » dédié à l’inclusion et à la maîtrise des usages numériques dont l’Oasis constituait une des actions phares.
Pour mettre sur orbite son lieu partagé, la ville a candidaté avec succès à l’appel à projet de la Région Île-de-France sur les Tiers Lieux et obtenu de la CAF de Seine-et-Marne l’agrément « Espace de vie sociale ».

Quelques mots justement sur le modèle économique, nous l’avons voulu résilient, privilégiant la robustesse à la performance. Nos communes se doivent d’anticiper le vent mauvais qui risque de souffler de plus en plus fort d’ici peu, en recherchant et déployant de nouveaux formats, plus hybrides, agiles et sans doute attractifs, mais surtout robustes et sobres. De nouveaux formats qui doivent avoir gravé dans leur ADN la capacité à s’adapter aux contraintes croissantes : budgétaires, logistiques, administratives ou humaines.
Il nous faut privilégier le temps long, étendre le champ des possibles grâce aux synergies suscitées, à la polyvalence et à la mutualisation des ressources ou usages, favoriser l’émergence d’une économie collaborative et circulaire avec des alliances parfois improbables. Nous devons oser et innover, y compris au niveau social, en suscitant la fertilisation croisée des approches et en fédérant différentes communautés d’usagers potentiels.

La concrétisation de ce projet est une réussite avant tout collective et résulte d’un travail collaboratif avec toute une pléiade de partenaires.
La sauvegarde du site, niché en cœur de ville juste face à la gare, est due à l’intervention déterminante des équipes de l’Établissement Public Foncier qui ont acquis l’ensemble du foncier, permettant ainsi à l’ancienne fabrique de coffre forts de poursuivre son activité économique, puis devant la liquidation judiciaire de la société, de protéger ce magnifique patrimoine de la convoitise des promoteurs.
Ainsi nous avons pu faire émerger un projet d’intérêt général mettant à la disposition des habitants du territorie trois équipements sur le même site : un espace de vie sociale, des locaux de coworking et un FabLab :

  • L’espace de vie sociale est le fruit d’un travail commun de fond entre la commune et la CAF de Seine et Marne, auquel a été associé les Trilportais grâce à une concertation mené sur plusieurs mois ;
  • L’espace de coworking propose aux entreprises, auto-entrepreneurs, télétravailleurs ou étudiants, juste face à la gare SNCF, des ressources numériques et un cadre bienveillant pour travailler en toute sérénité ;
  • Le FabLab « Meaux Factory » implanté également sur le site donne accès à l’univers de la fabrication numérique, au monde des « makers » et du « DO It Yourself ». Il multiplie le champ des possibles et favorise l’émergence de nouvelles synergies ;


Revenons à la méthode déployée. Elle nous a permis d’apporter une réponse concrète à l’interpellation « Où atterrir ? » en développant un modèle innovant et hybride (« autres temps, autres lieux ») à bien des égards reproductibles.

Je vous propose de revenir sur cette méthode …

L’équipe municipale s’est interrogée sur le modèle économique à mettre en place comme l’utilité globale et sociale du projet. Dans ce cadre nous avons mené un diagnostic territorial en profondeur, en concertation, qui nous a permis de contextualiser constats, approches, perspectives, de relever et identifier écueils potentiels ou courants porteurs …
Nous avons ensuite développer une « matrice » d’aide à la décision à partir de trois points clés : accessibilité, utilité, désidérabilité.


L’accessibilité au lieu.

Il faut prendre cette notion dans sa dimension la plus globale :
• Localisation, et ce autour de deux dimensions : l’hyper proximité auprès des usagers potentiels (habitants du quartier ou de la ville) et connectivité de l’équipement avec les structures de transports publics, telle une gare dans le cas de Trilport ;
• Inclusivité, la structure en place peut elle recevoir les publics pressentis : générations (seniors ou petite enfance), handicap ;
• L’amplitude et la fréquence des horaires d’ouverture correspond t’elle aux contraintes des différents publics cibles ?


L’Utilité globale de l’offre

Ce sentiment doit répondre à des critères objectifs, en dynamique comme en prospective. Il dépend directement des capacités de l’équipement à apporter des réponses aux besoins de ses différents usagers et à des enjeux clés : dynamique économique et sociale du territoire (télétravailleurs, TPE, auto entrepreneurs …), innovation, formation, inclusion et maitrise des usages numériques, cohésion, accès à la culture, environnement, mobilités …
D’autant que la structure doit avoir la capacité de s’adapter et évoluer dans un monde en mouvement et répondre aux besoins de différents publics cibles (chronotopie).

Désidérabilité (désirabilité) ou comment donner envie d’avoir envie

L’Oasis se doit d’apporter une valeur ajoutée, un supplément d’âme, de s’adresser aux sens et à la notion de plaisir, de désir individuel et collectif du fait de l’ambiance qui émane du lieu, de sa qualité, de la place de la lumière naturelle, de l’organisation des espaces de travail, du design de son aménagement et de sa faculté à être porteur de « bien-être » et d’interactions.
La qualité, l’originalité et la chaleur de son aménagement comme de son mobilier contribuent à cette quête, doivent correspondre à l’identité et l’esprit des lieux, faciliter sa dimension hybride et modulaire, garante de la polyvalence des usages, de la mixité fonctionnelle du Lieu partagé t de sa mutualisation.

Ajoutons à ces critères la complémentarité du projet avec les dynamiques présentes sur le territoire, déployées et mises en œuvre par la ville (petite enfance, seniors, inclusion numérique …).

Nous considérons que la dimension culturelle, dans toute sa plénitude et ses nuances, constitue un axe central du développement des dynamiques et des solidarités locales, porteuse par essence de cohésion. Elle donne sens et consistance à un projet de territoire destiné à produire du commun autour de perspectives partagées et constitue un véritable vecteur d’émancipation.


Quelques perspectives …

L’oasis a trouvé son rythme de croisière grâce à une programmation variée allant du Café IA, aux projections ciné, à des ateliers céramiques, aux soirées jeux, au gaming, à l’accueil du Repair’Vélo et j’en oublie … C’est plus d’une cinquantaine d’animations qui ont été ainsi proposés depuis mai dernier.
La nouvelle programmation (septembre à novembre) explorera de nouveaux horizons : conférence littéraire, spectacle de théâtre interactif, ressourcerie éphémère, art floral, sans oublier les initiatives des nombreux bénévoles embarqués dans cette belle aventure collective.

Dans le domaine des mobilités évitées, nous travaillons avec la Poste au déploiement d’une consigne multi services fonctionnant à l’énergie solaire afin de faciliter la vie des habitants ou usagers se rendant à l’Oasis ou à la gare. Elle étoffera l’offre de services proposée visant à faire du site un véritable hub de services pour les habitants.
D’autres projets et partenariats sont à venir, vu la proximité directe avec les chemins de grande randonnée et la gare SNCF qui constituent autant de potentialités et ouvrent bien des champs d’actions.

Nous avons signé une convention avec Orange renforçant l’offre en ateliers numériques gratuits et ouverts à tous, favorisant le développement de l’inclusion numérique et des compétences digitales.

Trilport a été cet été un des 30 lauréats nationaux de l’appel à projet « Proxitravail – Relais d’entreprises » de la Banque des Territoires qui permettra à L’Oasis de rejoindre un réseau national dédié au télétravail destiné à le développer afin de contribuer à la réduction de l’empreinte environnementale du territoire.

Nous savons que cette inauguration ne constitue que la 1ere étape de la reconquête et de la reconversion totale de la friche industrielle Nugue. Il nous faudra encore dépolluer, sécuriser, rénover, imaginer d’autres projets d’intérêt général autour du lien social et de l’accès à la culture, car comme l’a si bien écrit Andrée Chédid

« Un monde en germe nous invite, à d’autres semailles, d’autres labours, d’autres récits … »