Le self inauguré à Trilport concrétise l’aboutissement d’un processus entamé il y a plus d’un an et marque une nouvelle étape dans notre approche de la restauration scolaire basée sur une vision globale des problématiques liées à l’alimentation et l’agriculture.
Nous avons, après un audit mené sans concession sur les pratiques en cours, élaboré un cahier des charges ambitieux, allant bien au delà de nos ambitions initiales. La société Elior, retenue, a su être à la hauteur des exigences fixées. Ce marché qui représente 55 000 repas annuel représente pour cette société une première incursion dans des territoires d’où ils étaient jusque là absents et qui ont grand besoin d’innovation en ce domaine.
Cette inauguration illustre notre engagement contre ce véritable fléau qu’est la malbouffe. Un fléau qui se traduit dans les assiettes (manque de saveur, de créativité et de diversité des menus, cuisine collective vite expédiée…), mais aussi plus en amont : aliments sans origine définie, produit on ne sait comment, sans prise en compte des émissions de gaz à effets de serre, de priorités sanitaires pourtant cruciales, ou encore de la sauvegarde de nos ressources naturelles.
Les conséquences pour les consommateurs que nous sommes en sont multiples : obésité, maladies, repas de plus en plus insipides, augmentation des déchets alimentaires…
Selon les conclusions d’un récent rapport du groupement d’experts britanniques « Global Panel on Agriculture and Food Systems for Nutrition », la malbouffe constitue désormais le risque numéro 1 pour notre santé. En France, le coût social en 2012 de la surcharge pondérale s’est élevé à 20 milliards d’euros, ce qui est comparable à celui de l’alcool (15 milliards d’euros), du tabac (26,6 milliards d’euros) et s’illustre par le développement de graves pathologies: hypertension artérielle, diabète, excès de cholestérol ou maladies cardio-vasculaires.
L’alimentation est un marché qui reste soumis à la loi d’airain de lobbies puissants et tres actifs, à Paris comme à Bruxelles, et qui agissent pour que surtout rien ne bouge, ne serait ce même qu’au niveau de l’étiquetage nutritionnel, c’est dire !
Le succès des émissions culinaires télévisées, la demande croissante en produits bio ou en provenance directe de la ferme, le développement de filières courtes ou la multiplication des AMAP illustre cependant une tendance sociétale de fond qui va à l’encontre de ces intérêts mercantiles.
Peu à peu une nouvelle économie émerge, enfin circulaire, créatrice d’emplois de proximité, j’ai le sentiment que c’est une véritable vague de fond qui peu à peu dans les pays développées s’imposera contribuant ainsi au mieux vivre et à un meilleur respect de la planète.
A l’école il est essentiel de « mieux manger pour mieux grandir » mais aussi de « retrouver le plaisir de déguster … ». Le plaisir est un enjeu éminent, notamment en milieu scolaire et ne se limite pas au seul repas : plaisir d’apprendre, d’enseigner, de découvrir … Le plaisir est un formidable moteur pour avancer.
Après les divers scandales alimentaires qui ont émaillé ces dernières années, illustrations concrètes d’une vision court termiste, productiviste, mercantile et irresponsable de l’alimentation, il nous faut désormais promouvoir la qualité, la traçabilité des produits servis dans nos cantines, et contribuer au développement de filières locales responsables et durables respectueuses de notre santé, de la nature et de ses cycles.
L’action initiée par les collectivités peut contribuer à faire bouger des lignes qui jusque là étaient figées, c’est cette volonté qui nous animé lors de la mise en place de cette réorganisation majeure de la restauration scolaire dans notre commune, avec trois objectifs concrets :
- Privilégier la qualité des produits,
- Faire du repas un moment de détente, de plaisir, de convivialité et d’autonomie,
- Contribuer à l’émergence d’une économie circulaire, afin de faire du déchet alimentaire une véritable ressource
Quelles réponses concrètes à apporter ?
Reconnaissons le, parents et enfants ont surtout été emballés par le coté disruptif et quelque peu chatoyant du « produit » self. Pour être honnête, je dois cependant témoigner que la préoccupation initiale majeure des élus était bien celle d’améliorer la qualité des repas servis et d’y introduire bio et produits locaux.
Privilégier la qualité des produits et des repas,
En appliquant le principe de précaution
- Interdiction pour les repas cuisinés de produits étiquetés OGM, de l’huile de palme ou de produits ionisés
- Limitation des acides gras trans
En choisissant la proximité
La cuisine centrale d’Elior est située en Seine et Marne, à trente minutes de Trilport. Important, c’est une cuisine dite « traditionnelle » avec des cuisiniers qui ne se limitent pas à décongeler des surgelés venus d’ailleurs mais font de la « vraie » cuisine ! La saveur passe aussi par le savoir faire et l’amour du métier.
Les produits proviennent en grande partie de producteurs locaux, basés en Seine et Marne ou dans les Yvelines. La volonté de notre fournisseur est d’étoffer son offre et son carnet d’adresses afin de travailler avec de nouveaux agriculteurs et d’obtenir une plus grande diversité et de meilleurs volumes.
C’est un paramètre important. Notre action contribue à consolider une véritable filière locale, reposant sur des circuits courts de distribution et ainsi à créer de nouveaux emplois durables dans nos territoires. Une nouvelle agriculture peu à peu émerge, reposant non plus sur un modèle basé sur la monoculture intensive, mais sur une diversification de la production (maraichage et verger) ou de l’élevage responsable.
C’est un premier pas vers le développement d’une filière locale bio.
En privilégiant la qualité, la traçabilité,
Toutes les viandes servies proviennent d’animaux (veaux, bœufs, porcs, agneaux, volailles) nés, élevés et abattus en France issus d’exploitations développant des méthodes d’élevage respectueuses (label rouge).
Les produits de la mer issus d’une pêche responsable sont privilégiés, afin de préserver la biodiversité marine et de contrer les ravages de la surexploitation. C’est un combat qu’il est vital de soutenir.
En respectant le rythme des saisons …
Pour avoir des produits plus frais, réduire la pollution liée aux transports des aliments importés comme à leur conservation, le gaspillage d’eau, de ressources naturelles ou d’énergie (culture sous serre), mais de contribuer au développement d’une filière maraichère locale, responsable et durable.
Faire du repas un moment de détente, de plaisir, de convivialité et d’autonomie et non plus de stress
Chacun le sait, il est important pour l’épanouissement des enfants de favoriser des rythmes de vie plus apaisés et sereins. La pause méridienne constitue un créneau pivot de leur journée scolaire, absolument stratégique.
Le repas doit (re)devenir un moment attendu, une pause gourmande, véritable école du gout, de la convivialité et des saveurs.
C’est tout l’enjeu du « self qui fait grandir » (cf vidéo). Ce concept, innovant à plus d’un titre, bouleverse toutes les procédures et représentations de la « cantine à l’Ecole primaire », en place jusque là. Il correspond à une attente implicite des enfants et des familles et favorise une véritable démarche de responsabilisation.
Les enfants effectuent un parcours entre les différents modules (meubles à plateaux, buffet froid, meuble de proximité, buffet chaud et table de tri), et ce, en toute autonomie. Les différents modules sont adaptés à leurs univers et à leurs tailles, mais aussi très communicants. Ils mangent à leur rythme, peuvent se servir selon leur appétit ou leurs gouts, ce qui limite d’autant le gaspillage alimentaire, dans le respect de leur équilibre nutritionnel.
Ce système présente d’autres avantages. Il fluidifie les flux d’élèves, les repas deviennent plus apaisés, moins bruyants, les enfants plus épanouis et détendus. Le repas redevient enfin, un moment de détente. Contexte qui favorise également les animations sur l’éducation au goût, la redécouverte de la saveur de légumes ou de mets oubliés, qui ont marqué les papilles de leurs grands parents.
Contribuer à l’émergence d’une économie circulaire, afin de faire du déchet alimentaire une ressource
A la fin du repas, les enfants déposent leur plateau et trient eux mêmes leurs déchets. Cette responsabilisation les sensibilise également au gaspillage alimentaire.
C’est ici, que le « self qui fait grandir », fait appel à la « gamification ». La table de tri est équipée d’une balance pèsent le poids des déchets organiques collectées, et créant les conditions d’une compétition « positive » entre les enfants.
Les déchets sont collectées par les camionnettes (circulant… au biogaz) d’une entreprise qui a été créée par un véritable pionnier de l’économie circulaire (intéressant notamment les médias étrangers lors de la COP 21 ).
Ils seront ensuite valorisés par méthanisation ou lombricompostage (cf vidéo). Une technique de compostage basée sur l’élevage de vers qui décomposent la matière et produisent un compost trés recherché, notamment en permaculture. Une ressource qui va enrichir les champs des producteurs locaux qui nous fournissent les aliments des repas …
La boucle est ainsi bouclée …