A la découverte du busway Nantais

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Nantes Métropole expérimente depuis trois ans un nouveau mode de transport en commun, le busway. Un essai, grandeur nature que l’association Transcités, à l’occasion de sa commission « Grandes Villes », nous a proposé de visiter sur le terrain. Au menu également de ces deux journées, trois tables rondes, dont une portant justement sur un premier bilan, trois ans après son lancement de cette innovation.

Pour un élu, s’il est toujours instructif de voir de visu la réalité des choses, il ne faut pas  perdre de vue, que le copier coller ne peut être LA solution. Comparaison n’est pas raison, nous y reviendrons, et s’il existe plus que des nuances entre chaque contexte territorial (taille, moyens financiers, infrastructures déjà en place …) l’organisation des transports en commun en Ile de France est trés différente de celle de la Province, du fait notamment de la présence du STIF.

Ces deux journées ont présenté également l’intérêt d’une confrontation des expériences locales de collectivités (outre Nantes, Grenoble, Strasbourg ou Montpellier) ayant un réel bagage, une expérience avérée sur ces questions et déjà des retours d’expérience enrichissants.

Nantes était surtout connue pour son tram, en plein développement. L’inauguration de la dernière ligne du tram en 2000 a pourtant marqué un point d’arrêt, ce qui ne devait être qu’un terminus provisoire, s’est révélé être de fait, du moins pour le moment, la dernière station de tram du réseau. La raréfaction des deniers publics et le désengagement financier de l’État aux collectivités locales ayant quelque peu transformé la donne, d’autant que la fréquentation attendue de la ligne ne nécessitait pas  un Tram.
Ce contexte économique a amené les élus Nantais a envisagé un mode de transport plus accessible financièrement, celui d’un bus à haut niveau de service (ou BHNS); concept qu’ils ont poussé à l’extrême afin de se rapprocher le plus possible des standards qualitatifs du tramway afin de développer une offre réellement attractive pour les usagers. Ils ont élaboré à partir d’une charte co rédigé avec les usagers, une innovation, pour l’instant unique en France,: le busway, possédant une forte identité visuelle.

Avant de décrire plus précisément ce nouveau type de transport en commun, certaines données de cadrage. Rappelons que l’agglomération nantaise  est la 7eme de France (Nantes, 6eme ville nationale), qu’elle regroupe 24 communes, soit 580 000 habitants (dont 50 000 étudiants). SEMITAN, la SEM délégataire (Nantes métropole 65%, Transdev 15%)en charge du réseau des transports en commun. Elle gère 2,5 millions de déplacement / jour : 3 lignes de tramway sur 42 km, 1 ligne de busway sur 7 km, 7 lignes de bus articulés (BHNS) et 52 lignes autobus standards.

Prix de revient de la ligne de busway, 75 millions € (pour 7 km): 60 pour l’infrastructure, 11 pour le matériel roulant. Chaque bus revenant à 500 000 euros (soit 50 000€ de plus que le modèle de base). A retenir également, les 7 kilomètres de la ligne du TCSP étant implanté sur une ancienne autoroute, permettant d’accueillir les 8 mètres d’emprise de ce réseau.

Rappelons également que contrairement à l’Ile de France, en Province, l’Autorité Administrative de Transport est l’agglomération, dans ce cas de figure, Nantes Métropole et ce depuis de longues années. Point de STIF donc, mais une gestion directe des élus locaux sur cette problématique.

Nous reviendrons dans une prochaine note sur les tables rondes portant sur la rationalisation de l’offre et sur la tarification sociale du réseau et sur d’autres particularités de l’expérience Nantaise.

Mais qu’est ce que concrètement, un « busway » ?

 

 

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La solution retenue repose sur un bus articulé à grande capacité de 18 mètres roulant au gaz naturel de ville, roulant sur un espace dédié  (selon le principe du Transport à commun sur site propre, ou TCSP), baptisé busway en référence au tramway.
Basé sur la même plate forme qualitative: aménagements internes, accessibilité maximale (palettes, plancher bas, portes coulissantes…), fermeture centralisée des portes, présence de rampes d’accés dans chaque véhicule, fréquence de passage (toutes les 3 minutes 30 en heure de pointe), priorité au carrefour, vitesse commerciale de 20 km, stations abritées équipées de systèmes d’information en temps réel et de distributeurs automatiques de titres …

Enfin et c’est certainement le plus particulier, 90% de la ligne est sur site propre spécifique.

Pour l’usager, la ligne de bus classique est à des années lumière, on est très proche du tram, une station est d’ailleurs commune au deux réseaux. Chaque bus dispose, à l’intérieur, d’un schéma dynamique de la ligne, d’un équipement multimédia (ambiance sonore et 4 écrans d’informations) et de sièges grand confort.

Le succès a été au rendez vous, la ligne a rencontré un succès très vif auprès des usagers. Les 13 mille passagers / jour d’avant la création du busway, sont trois ans après 28 000 ! Réussite qui présente également certains inconvénients, le manque de capacité se faisant ressentir durant les heures de pointe. Deux solutions sont envisagées : une fréquence de 3 minutes au lieu des 3,30 et un véhicule de 24 mètres (soit 30% de capacité supplémentaire) pouvant faire voyager 200 passagers. Attention toute fois, ce bus bi-articulé, qui sera expérimenté en 2010 n’est pour l’instant pas homologués pour le réseau français; ce qui n’est pas qu’une formalité, loin s’en faut !

L’accessibilité de chaque station est facilitée par une nouvelle organisation des chemins piétons à ses abords immédiats et par la création d’une zone 30 pour les véhicules. Notons également la présence de 6 Parkings Relais P+R, offrant plus de 1 250 places de stationnement gratuit, faisant partie intégrante du service transport.

Notons un taux de panne supérieur à la normale (principalement trois causes : rampe, moteur, porte), ce qui semble logique les « rames » ou « bus » étant ceux des lignes régulières et non prévues à l’origine pour cet usage. Soulignons l’excellent  taux de report modal équivalent à celui du tram, soit 38%. Le ration usager / investissement étant très proche de celui du tram.

Car si  au niveau de l’addition, si le busway est revenu trois fois moins cher qu’un tram, il transporte trois fois moins de passagers !

Nous reviendrons prochainement sur le volet économique et financier de ce type d’investissement, car dans ce domaine comme dans beaucoup d’autres, les points clivants sont souvent à ce niveau !

 

 

To be or not to be ?

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That is the question …

Une problématique toute personnelle que l’actuel Ministre de l’immigration et de l’Identité Nationale (il fallait vraiment vouloir assumer la responsabilité d’un ministère portant cet intitulé) doit apparemment se poser dans son fort intérieur …
Car pour exister, du moins médiatiquement, il se donne un mal de chien, ou de ministre, cet homme, en multipliant les initiatives les plus diverses et en courant le moindre plateau télé … sans grand succès ma foi, et heureusement, car au niveau exemplarité …

Un de nos philosophes les plus fameux a écrit que l’identité est une trajectoire. Lorsque l’on voit la trajectoire fulgurante de ce Ministre, beaucoup se demandent jusqu’où s’arrêtera sur l’échiquier politique la dérive de celui qui donne de la politique une image aussi sulfureuse.
Comme quoi, parfois un homme est la proie de ses vérités …

Mais là n’est pas le problème. Le plus grave dans cette affaire est d’avoir mêler immigration et identité nationale au sein d’un même ministère. Une décision qui m’interpelle, me choque et me révulse. Il y a la question de l’immigration et il y a celle de l’identité, différentes par nature, elles méritent chacune des approches différenciées.
Si l’on se réfère à notre histoire contemporaine, les périodes où le politique a mêlé la question de l’identité et celle de l’immigration ne sont pas parmi les pages les plus glorieuses; pourtant, paradoxe, la France serait elle réellement la France, sans immigration ? 
Tous les Français, disait Braudel sont fils d’immigrés. La faute à l’histoire mais surtout à la Géographie qui a fait de notre pays un carrefour européen et méditerranéen …

Mener un débat sur l’identité nationale dans les préfectures à la demande du chef de l’état est une confusion des genres regrettable dont les  raisons politiciennes, à proximité immédiate des élections régionales, n’ont trompé personne. C’est pourquoi je ne me rendrais pas au débat organisé ce jour par le Sous Préfet.

Pourtant, cette problématique est centrale. Si la question identitaire est une interrogation majeure pour un individu, c’est une interpellation politique et philosophique essentielle pour une communauté. Y répondre collectivement nous éloigne de la fourmilière, et fait que l’homme est homme … Encore faut il mener sérieusement cette réflexion de fond. Ce débat exige profondeur, clarté et  sérénité. Il s’agit d’une quête identitaire qui transcende les  clivages politiques et peut se résumer en une phrase simple : que signifie aujourd’hui dans ce monde globalisé et éclaté dans lequel nous vivons  être français ?

Lors d’un interview l’historien Fernand Braudel a apporté une contribution lumineuse que je vous propose de lire ou relire … Une contribution parmi d’autres, car le sujet mérite que chacun s’y arrete, et apporte sa pierre à l’oeuvre collective, que l’on soit puissant ou non, « sachant » ou non …

 

 

L’identité française selon Fernand Braudel

 

mediterranee.jpgJe crois que le thème de l’identité française s’impose à tout le monde, qu’on soit de gauche, de droite ou du centre, de l’extrême gauche ou de l’extrême droite.
C’est un problème qui se pose à tous les Français. D’ailleurs, à chaque instant, la France vivante se retourne vers l’histoire et vers son passé pour avoir des renseignements sur elle-même. Renseignements qu’elle accepte ou qu’elle n’accepte pas, qu’elle transforme ou auxquels elle se résigne.

Mais, enfin, c’est une interrogation pour tout le monde.

II ne s’agit donc pas d’une identité de la France qui puisse être opposée à la droite ou à la gauche. Pour un historien, il y a une identité de la France à rechercher avec les erreurs et les succès possibles, mais en dehors de toute position politique partisane. Je ne veux pas qu’on s’amuse avec l’identité.

Vous me demandez s’il est possible d’en donner une définition. Oui, à condition qu’elle laisse place à toutes les interprétations, à toutes les interventions. Pour moi, l’identité de la France est incompréhensible si on ne la replace pas dans la suite des événements de son passé, car le passé intervient dans le présent, le « brûle ».

C’est justement cet accord du temps présent avec le temps passé qui représenterait pour moi l’identité parfaite, laquelle n’existe pas. Le passé, c’est une série d’expériences, de réalités bien antérieures à vous et moi, mais qui existeront encore dans dix, vingt, trente ans ou même beaucoup plus tard. Le problème pratique de l’identité dans la vie actuelle, c’est donc l’accord ou le désaccord avec des réalités profondes, le fait d’être attentif, ou pas, à ces réalités profondes et d’avoir ou non une politique qui en tient compte, essaie de modifier ce qui est modifiable, de conserver ce qui doit l’être. C’est une réflexion attentive sur ce qui existe au préalable. Construire l’identité française au gré des fantasmes, des opinions politiques, ça je suis tout à fait contre.

Le premier point important, décisif, c’est l’unité de la France. Comme on dit au temps de la Révolution, la République est « une et indivisible ». Et on devrait dire : la France une et indivisible. Or, de plus en plus, on dit, en contradiction avec cette constatation profonde : la France est divisible. C’est un jeu de mots, mais qui me semble dangereux. Parce que la France, ce sont des France différentes qui ont été cousues ensemble. Michelet disait : c’est la France française, c’est-à-dire la France autour de Paris, qui a fini par s’imposer aux différentes France qui, aujourd’hui, constituent l’espace de l’Hexagone.

La France a dépensé le meilleur de ses forces vives à se constituer comme une unité ; elle est en cela comparable à toutes les autres nations du monde. L’oeuvre de la royauté française est une oeuvre de longue haleine pour incorporer à la France des provinces qui pouvaient pencher de notre côté mais avaient aussi des raisons de ne pas désirer être incorporées au royaume. Même la Lorraine en 1766 n’est pas contente de devenir française. Et que dire alors des pays de la France méridionale : ils ont été amenés dans le giron français par la force et ensuite par l’habitude.

II y a donc dans l’identité de la France ce besoin de concentration, de centralisation, contre lequel il est dangereux d’agir. Ce qui vous suggère que je ne vois pas la décentralisation d’un oeil tout à fait favorable. Je ne la crois d’ailleurs pas facile. Je crois que le pouvoir central est tel que, à chaque instant, il peut ramener les régions qui seraient trop égoïstes, trop soucieuses d’elles-mêmes, dans le sens de l’intérêt général. Mais c’est un gros problème.

La seconde chose que je peux vous indiquer, c’est que, dans sa vie économique, de façon curieuse, depuis la première modernité, la France n’a pas su réaliser sa prospérité économique d’ensemble. Elle est toujours en retard, pour son industrialisation, son commerce. Cela pose un problème d’ordre général. Et d’actualité, si cette tendance est toujours valable. Comme si, quel que soit le gouvernement, la France était rétive à une direction d’ordre étatique.

Or la seule raison que je vois qui soit une raison permanente est que l’encadrement capitaliste de la France a toujours été mauvais. Je ne fais pas l’éloge du capitalisme. Mais la France n’a jamais eu les hommes d’affaires qui auraient pu l’entraîner. Il y a un équipement au sommet, au point de vue capitaliste, qui ne me semble pas parfait. Nous ne sommes pas en Hollande, en Allemagne, aux Etats-Unis, au Japon. Le capitalisme est avant tout, pour moi, une superstructure et cette superstructure ne réussit pas à discipliner le pays jusqu’à sa base. Tant mieux peut-être ou tant pis, je n’en sais rien. Mais l’inadéquation de la France à la vie économique du monde est un des traits de son identité.

Dernier trait : la France ne réussit pas au point de vue économique ; elle réussit au point de vue politique de façon limitée parce qu’elle triomphe, précisément, dans ses propres limites. Toutes ses sorties en dehors de l’Hexagone se sont terminées de façon malheureuse, mais il y a un triomphe permanent de la vie française, qui est un triomphe culturel, un rayonnement de civilisation.

L’identité de la France, c’est ce rayonnement plus ou moins brillant, plus ou moins justifié. Et ce rayonnement émane toujours de Paris. Il y a aussi une centralisation très ancienne de la culture française. Bien sûr, il existe bien d’autres conditions : triomphe de la langue française, des habitudes françaises, des modes françaises, et, aussi, la présence, dans ce carrefour que la France est en Europe, d’un nombre considérable d’étrangers. Il n’y a pas de civilisation française sans l’accession des étrangers ; c’est comme ça.

Le gros problème dans le monde actuel est de savoir comment la société française réussira ou non à accepter ces tendances et à les défendre si nécessaire ; si vous n’avez pas, par exemple, une politique de rayonnement à l’égard de l’Europe et du monde entier, tant pis pour la culture française.

La langue française est exceptionnellement importante. La France, c’est la langue française. Dans la mesure où elle n’est plus prééminente, comme ce fut le cas aux XVIIIe et XIXe siècles, nous sommes dans une crise de la culture française. Avons-nous les moyens de remonter la pente ? Je n’en suis pas sûr, mais j’ai quelque espoir. L’empire colonial que nous avons perdu est resté fidèle à la langue française. C’est vrai aussi des pays de l’Est, de l’Amérique latine.

L’identité française relève-t-elle de nos fantasmes collectifs ? Il y a des fantasmes et il y a autre chose. Si j’ai raison dans ma vision de l’identité française, quels que soient nos pensées, nos fantasmes, il y a une réalité sous-jacente de la culture, de la politique de la société française. J’en suis sûr. Cette réalité rayonnera ou ne rayonnera pas, mais elle est. Pour aller plus loin, je vous dirai que la France a devant elle des tâches qu’elle devrait considérer avec attention, avec enthousiasme. Elle est devenue toute petite, non parce que son génie s’est restreint, mais en raison de la vitesse des transports d’aujourd’hui. Dans la mesure où, devenue toute petite, elle cherche à s’étendre, à agripper les régions voisines, elle a un devoir : faire l’Europe.

Elle s’y emploie, mais l’Europe s’est accomplie à un niveau beaucoup trop haut. Ce qui compte, c’est de faire l’Europe des peuples et non pas celle des patries, des gouvernements ou des affaires. Et ce ne sera possible que par la générosité et la fraternité.

 

Cet entretien, publié dans les colonnes du Monde les 24-25 mars 1985, a été réalisé par Michel Kajman.

 

PLU : comment diminuer l’empreinte humaine ?

 

blog_immobilier_mur_vegetal_france.pngDernière ligne droite pour les travaux du Plan Local d’Urbanisme, du moins au niveau municipal, quelques derniers arbitrages, réunions et d’ici quelques semaines, le document sera dans les tuyaux !

Enfin aurais je tendance à dire d’une réflexion de fond ayant débuté début 2006. Outre l’intermède du aux élections municipales (presqu’une année), des raisons de fond, expliquent cette durée.
L’élaboration d’un document majeur pour le développement d’un territoire ne doit pas être prise à la légère, et il est nécessaire avant d’acter un document de cette importance, d’effectuer un tour d’horizon des réflexions en cours sur différentes échelles du territoire afin d’harmoniser lorsque c’est possible, la grande horloge des  mutations qui concernent les communes, les intercommunalités et plus globalement la société. Un réglage temporel qui permet d’intégrer à la réflexion en cours divers enjeux.

Citons, notamment  :

  • la montée en puissance de l’intercommunalité (réflexions autour du SCOT, du PLH et du PLD),
  • le développement de la gare SNCF en pôle d’échanges multimodal (surtout après le cadencement 2010),
  • nos obligations en matière de logement social
  • la priorité accordée au Développement Durable.

Cette priorité apparaît de manière évidente que ce soit dans les orientations générales du PADD (voir aprés) et du PLU (développement en cœur de ville afin de limiter l’étalement urbain et protéger la biodiversité), dans la nature des projets urbains en cours (création d’un éco quartier et d’un pôle multimodal d’échanges sur la gare SNCF) ou dans certaines mesures concrètes destinées à diminuer l’empreinte écologique sur le territoire de la commune.

Améliorer l’efficacité énergétique du bâti est une de ces mesures, le  bâtiment étant avec le transport une des causes majeures du réchauffement du à l’activité humaine. Jusqu’à aujourd’hui, la seule alternative pour les décideurs étaient de faire appel au sens militant et éco citoyen de certains pionniers (la notion d’avant gade) chez les constructeurs afin qu’ils acceptent de payer plus cher pour construire plus propre.

Il est impératif si l’on veut inciter le plus grand nombre à construire « écologique »de réduire cet écart financier. Car si cette solution constitue une bonne opportunité économique pour l’occupant (propriétaire ou locataire) du fait de la diminution des charges, pour le promoteur elle demeure toujours  un surcout, ce qui constitue un frein sérieux.

Alors, comment inciter le plus grand nombre à construire durable, alors que cela coute plus cher ? La bonification des droits à construire expérimentée sur le plan international par les Etats Unis (avec le « density bonus »,) et la  Suisse pour rendre acceptable les contraintes du label Minergie est une des pistes à explorer …

Pourquoi ?

 

 

 

Cet outil incitatif novateur repose sur un principe simple : récompenser les pratiques environnementales vertueuses des maîtres d’ouvrages en donnant des mètres carrés constructibles supplémentaires leur permettant d’atténuer le surcout occasionné. Incidence : Le coût global se réduit, la valeur d’usage des bâtiments augmente et les futurs occupants bénéficient d’économies de charge significatives.

La loi POPE (programme fixant les orientations de la politique énergétique) autorise cette mesure. Les communes disposent désormais d’un outil réglementaire leur permettant de bonifier le COS (voir après) dans la limite de 20 % pour les constructions répondant à des exigences énergétiques précises. Une logique « gagnant / gagnant » qui devrait s’imposer peu à peu. L’arrêté du 3 mai 2007 (JO du 15 mai) précise les conditions à remplir permettant de bénéficier de ce dépassement, notamment avec une simple décision du conseil municipal. (cf document édité par l’ADEME, trés clair sur le sujet)

Cette mesure s’adresse aux particuliers comme aux collectifs. Un promoteur peut désormais avoir avantage à construire vertueux : il bénéficie de 20% de surface constructible supplémentaire, ce qui lui permet d’atténuer d’autant l’impact financier du prix du foncier.
ce qui se révèle intéressant pour le logement social, car là plus qu’ailleurs construire durable est important écologiquement et financièrement, du fait de la diminution directe des charges.
Pour être éligible à cette bonification, les constructions doivent répondre aux labels THPE (très haute performance énergétique) ou BBC (bâtiment basse consommation), ce qui devrait évoluer dans les prochains mois. Notre volonté est d’agir également sur deux autres cibles environnementales : récupération de l’eau et e végétalisation, notamment pour les toitures ou les façades, en jouant également sur le CES (voir après) si nécessaire.  Nous avons intégrer ces mesures dans le PLU sur l’ensemble des zones.

Trilport fait partie d’une structure nationale de réflexion et de proposition concernant cette problématique, le club « bonification et construction durable » animée par l’ADEME et l’ARENE. Instance destinée à explorer les perspectives ouvertes notamment par le Grenelle 2 et qui réunit des collectivités diverses, idisposant d’un acquis en matière de rénovations, constructions durables et approches innovantes.

Le projet de loi Grenelle 2 prévoit la possibilité de dépasser dans la limite de 30 % les règles relatives au gabarit, à la hauteur, à l’emprise au sol et à la densité d’occupation des sols. Un dépassement qui peut être modulé ou supprimé selon les secteurs. Ces dispositions se substitueront, en les élargissant, à celles du « COS bonifié ». Ces pistes intéressantes soulèvent cependant certaines interrogations : hauteur du bâti, possibilité d’autoriser la construction d’un niveau supplémentaire, peut on limiter la qualité de vie à la seule efficacité énergétique, nature des référentiels, labels ou niveaux de performance exigés, thématiques environnementales poursuivies (eau, bruit, qualité de l’air, richesse de la biodiversité » …).

Les travaux  autour du Grand Paris témoignent de cette tendance vers une densification accrue reposant sur une verticalisation croissante notamment dans les secteurs situés à proximité des transports collectifs, des orientations qui accompagnent le concept de ville durable préconisé par nombre d’urbanistes.

Autant il faut reconnaître l’efficacité énergétique de ces choix, autant sur la densification, il est important de l’adapter au contexte local,  de diversifier les modes d’organisation urbaines et les confronter à nos villes actuelles, afin que celle ci gardent l’identité qui fait leur charme. Cette question d’appartenance, de quête identitaire, chacun en conviendra est une donnée à ne pas négliger. C’est ce qui différencie une fourmilière, ou une ruche et nos villages.

Voilà qui nous promet une période d’innovation architecturale et technique, mais où les urbanistes et le architectes devront placer au premier plan de leurs priorités l’épanouissement des futurs habitants, qui ont besoin de lumière, de végétal et de perspectives, dans tous les sens que revêt ce terme !

 

Outils d’urbanisme

L’article 30 de la loi POPE.

! L’article 30 de la loi POPE a complété le code de l’urbanisme par un chapitre VIII ainsi rédigé :

! Art. L. 128-1. ! Le dépassement du coefficient d’occupation des sols est autorisé, dans la limite de 20 % et dans le respect des autres règles du plan local d’urbanisme, pour les constructions remplissant des critères de performance énergétique ou comportant des équipements de production d’énergie renouvelable.

Un décret en Conseil d’Etat détermine les critères de performance et les équipements pris en compte.

La partie de la construction en dépassement n’est pas assujettie au versement résultant du dépassement du plafond légal de densité.

! Art. L. 128-2. ! Les dispositions de l’article L. 128-1 sont rendues applicables dans la commune par décision de son conseil municipal.

 

Arrêtés de Mai 2007

 

Qu’est-ce que le COS ?

Le Coefficient d’Occupation des Sols est la valeur qui détermine sur un terrain la possibilité maximale de réalisation de SHON. Exemple : Pour un terrain de 600 m² avec un COS de 0,6 (qui est la valeur classique en zone résidentielle), l’opération est la suivante 600 x 0.6 = 360 m² de SHON. Pour un terrain de 270 m² avec un COS de 1,8 (zone plus urbaine), le résultat est le suivant 270 x 1,8 = 486 m² de SHON.

 

Qu’est-ce que le CES ?

Le CES ou coefficient d’emprise au sol est un coefficient fourni par l’administration (Mairie, DDE) permettant de définir la surface constructible de chaque parcelle. Le CES , comme le COS ,peut être différent sur deux parcelles contigues ou sur une même parcelle.

Le PLU ou plan local d’urbanisme définit la zone dont dépend votre parcelle et donne les orientations de constructibilités. Sur le réglement dont dépend votre parcelle, il sera certainement indiqué le CES (Coefficient d’Emprise au Sol) autorisé. Le C.E.S. est une manière de restreindre le bétonnage totale d’une parcelle, ce C.E.S. ou Coefficient d’Emprise au Sol est établi pour conserver des espaces verts. Le Coefficient d’Emprise au Sol est très souvent couplé à la définition d’une surface minimale d’espaces verts de pleine terre (1m de hauteur au minimum) à conserver sur la parcelle.

 

Qu’est-ce que le PADD ?

Le PADD,Projet d’Aménagement et de Développement Durable, est un des documents constitutifs du dossier du Plan local d’Urbanisme (PLU) et du dossier du Schéma de Cohérence Territoriale (ScoT). Il définit les grandes orientations d’urbanisme et d’aménagement retenues par la commune, notamment en vue de favoriser le renouvellement urbain et de préserver l’environnement et de favoriser la qualité urbaine et architecturale.

Ce document comprend deux parties :

  1. Une partie obligatoire qui exprime les orientations générales d’urbanisme et d’aménagement du territoire communal ou de l’ensemble de communes concernées si le PLU porte sur plusieurs communes. Cette partie peut être relativement courte et synthétique.
  2. Une partie facultative qui peut définir d’une manière plus précise les orientations et prescriptions particulières concernant des espaces ou des quartiers ou des actions publiques soit thématiques soit sectorisées (par quartier, ilôts, immeubles…). Cette partie est plus technique mais souvent plus détaillée.Son objectif est d’introduire dans les documents locaux d’urbanisme une plus grande réflexion sur l’avenir de la commune à moyen et long terme. Les grandes orientations qu’il définit peuvent concerner différents domaines : le développement ou la préservation des centres-villes,la restructuration ou la réhabilitation d’îlots, de quartier ou de secteurs, le traitement des rues et des espaces publics, la sauvegarde de la diversité commerciale des quartiers, l’aménagement des entrées de ville et la préservation des paysages.

 

2010 promet d’être coton

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La période des voeux a débuté .. Tradition républicaine s’il en est, mais également moment privilégié pour faire le point, esquisser la feuille de route de l’année à venir pour une collectivité, remercier et célébrer toutes les énergies qui permettent le « mieux vivre ensemble ».

Force est de constater, que plus que la crise cette année c’est le contexte national qui pèse, comme rarement … L’hallali des collectivités territoriales a t’il commencé ? Nul ne le sait encore … Mais le climat est quelque peu délétère, dans l’attente d’une  décision, venant d’ailleurs, tout en haut …

2009 laisse cependant comme un goût amer dans la bouche, la crise économique bouleverse nos repères. Entre les milliards d’euros des déficits présents ou à venir, les aides financières accordés aux banques et nos budgets, il y a pire qu’un décalage, un abîme …
Car pour la majorité d’entre nous, un euro reste un euro, toujours aussi difficile à gagner.

Si personne ne remet en cause l’action en faveur du système financier, il fallait intervenir, on ne peut que s’étonner de l’absence absolue de garanties exigées  : aucune … Il y a les mots et les actes …  La crise n’est pas encore terminée (cf l’excellent article de Michel Rocard) car aucune remise à plat réelle n’a été encore engagée, les mêmes causes produiront les mêmes effets, nous sommes toujours dans la nasse.

Aujourd’hui, citoyens et collectivités sont soumis à une triple peine : payer pour le sauvetage des banques, considérablement, subir de plein fouet la baisse des dépenses publiques et sociales, voir leurs dépenses d’investissement même essentielles remises en cause. Car la tentation sera grande pour certains politiques de faire régler aux seuls ménages et collectivités l’addition !

Trois enseignements sont à mes yeux, à retenir de cette séquence :

  • La nécessité absolue de réguler le système financier. Il a plus que besoin de gouvernance publique et de régulation vu les risques inconsidérées et irresponsables pris par une minorité avec l’argent des autres … Force est de constater qu’aujourd’hui,  rien n’a changé !
  • Souligner le rôle joué par notre système de protection sociale qui a permis à la France de mieux amortir la crise. Certes il est à ajuster, à améliorer, mais ses fondements sont à préserver, à des années lumière du bouclier fiscal. Il en va de notre cohésion sociale, élément indissociable de notre patrimoine national, je n’ai surtout pas parlé d’identité laissant cette notion aux démiurges ou aux spécialistes,
  • Constater la fragilité du monde réel et la nécessité de privilégier un des axes fondateurs du Développement Durable, le principe de responsabilité. Une notion globale qui dépasse le simple cadre économique, intégrant le moyen et le long terme, et ce jusqu’à la survie de notre planète …

Il est savoureux de constater sur ces différents points la conversion de certains de nos politiques qui revêtent aujourd’hui devant les sunlights des médias planétaires, la tunique de l’évangélisateur lavant plus blanc que blanc … de quoi les rendre en théorie un peu plus humbles, quoique …

Force est de constater pourtant que malheureusement, cette conversion n’est qu’apparente. …

 

 

 

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Rappelons en ces périodes de crise que les collectivités locales ont assuré prés de 80% de l’investissement public. Si je prends l’exemple de ma commune, outre les dépenses habituelles, avec les travaux du gymnase (2 millions d’euros HT) elle  a participé  à cet effort, capital pour le maintien de l’économie et la sauvegarde de l’emploi, en faisant travailler sur ce chantier durant de long mois plus de treize entreprises. Chantier que nous n’aurions d’ailleurs pu lancé sans l’aide de la Région et du Département (prés de 60% de subventions au total).

Hormis ces dépenses d’investissement, les collectivités au quotidien sont en première ligne pour limiter la casse et aider nos concitoyens. C’est véritablement d’un  bouclier social dont ils ont besoin !

Autant dire que, je réfute ce mauvais procès fait aux élus locaux … A en croire Nicolas Sarkozy, ils seraient  trop nombreux, peu efficaces et onéreux pour l’économie nationale … Bonjour la démagogie !
Je conçois que certains soient nostalgiques d’une France médiévale ou napoléonienne (cf la création du Conseiller Territorial), moi pas. Des pistes d’économies à réaliser existent pourtant, au delà des niches fiscales et du bouclier fiscal réservées aux « happy few », notamment au sommet de l’exécutif, beaucoup plus critique sur les dépenses des autres que sur les siennes; notamment sur les dépenses de communication de l’Elysée (7,5 millions € à en croire le Parisien).

Mon propos n’est surtout pas de dire que rien n’est à changer ou que la Taxe Professionnelle est couverte de vertus. Il est au contraire urgent de clarifier les compétences entre structures, d’améliorer l’articulation territoriale et surtout de remettre à plat une fiscalité locale qui n’est plus adapté et inéquitable encore faut il privilégier méthode, sérénité et concertation.
L’obsession de l’effet d’annonce et de la prise de décision sans débat, au forceps, en cherchant des boucs émissaires, véritable  marque de fabrique de ce gouvernement laisse peu à peu des traces durables et a montré ses limites.

Il en va désormais de notre modèle social, partie intégrante de notre identité nationale (juste histoire de dire), autant dire que dans les semaines à venir, nous serons vigilant, car je crains fort qu’après les régionales, le couperet ne tombe : déficit à combler, retraites, santé publique, les mois qui vont suivre risquent de devenir difficiles …

2010 sera une année déterminante pour les collectivités et pour le maintien de notre modèle social … J’espère que le dialogue, la sérénité et le bon sens prévaudront, c’est l’heure des voeux, non ?

Après également, ce qu’il faut bien appeler l’échec de Copenhague, nous ne sommes pas encore « Dans le Monde d’après », plus que jamais, notre responsabilité sera grande. Du coup, la citation extraite du discours d’Albert Camus, en 1957,  lors de la remise de son Nobel, prend un aspect  prémonitoire …

 

« Chaque génération, sans doute, se croit vouée à refaire le monde … La mienne sait pourtant qu’elle ne le refera pas.

Mais sa tâche est peut-être plus grande. Elle consiste à empêcher que le monde ne se défasse. « 

 

 

Sisyphe

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Chaque génération, sans doute, se croit vouée à refaire le monde.

La mienne sait pourtant qu’elle ne le refera pas.

Mais sa tâche est peut-être plus grande.

Elle consiste à empêcher que le monde ne se défasse. « 

 

Albert Camus
Discours de Suede
10 décembre 1957


 

Discours intégral et fragment de l’épitaphe de Sartre à la mort de Camus

 

Discours prononcé devant l’Académie Royale de Suède,

le 10 décembre 1957

dédié à son instituteur, Louis Germain

 

 

 

giacometti.jpgEn recevant la distinction dont votre libre Académie a bien voulu m’honorer, ma gratitude était d’autant plus profonde que je mesurais à quel point cette récompense dépassait mes mérites personnels.

Tout homme et, à plus forte raison, tout artiste, désire être reconnu. Je le désire aussi. Mais il ne m’a pas été possible d’apprendre votre décision sans comparer son retentissement à ce que je suis réellement. Comment un homme presque jeune, riche de ses seuls doutes et d’une œuvre encore en chantier, habitué à vivre dans la solitude du travail ou dans les retraites de l’amitié, n’aurait-il pas appris avec une sorte de panique un arrêt qui le portait d’un coup, seul et réduit à lui-même, au centre d’une lumière crue ?
De quel cœur aussi pouvait-il recevoir cet honneur à l’heure où, en Europe, d’autres écrivains, parmi les plus grands, sont réduits au silence, et dans le temps même où sa terre natale connaît un malheur incessant ?

J’ai connu ce désarroi et ce trouble intérieur. Pour retrouver la paix, il m’a fallu, en somme, me mettre en règle avec un sort trop généreux. Et, puisque je ne pouvais m’égaler à lui en m’appuyant sur mes seuls mérites, je n’ai rien trouvé d’autre pour m’aider que ce qui m’a soutenu, dans les circonstances les plus contraires, tout au long de ma vie : l’idée que je me fais de mon art et du rôle de l’écrivain. Permettez seulement que, dans un sentiment de reconnaissance et d’amitié, je vous dise, aussi simplement que je le pourrai, quelle est cette idée.

Je ne puis vivre personnellement sans mon art. Mais je n’ai jamais placé cet art au-dessus de tout. S’il m’est nécessaire au contraire, c’est qu’il ne se sépare de personne et me permet de vivre, tel que je suis, au niveau de tous.
L’art n’est pas à mes yeux une réjouissance solitaire. Il est un moyen d’émouvoir le plus grand nombre d’hommes en leur offrant une image privilégiée des souffrances et des joies communes.
Il oblige donc l’artiste à ne pas s’isoler ; il le soumet à la vérité la plus humble et la plus universelle. Et celui qui, souvent, a choisi son destin d’artiste parce qu’il se sentait différent, apprend bien vite qu’il ne nourrira son art, et sa différence, qu’en avouant sa ressemblance avec tous.

L’artiste se forge dans cet aller-retour perpétuel de lui aux autres, à mi-chemin de la beauté dont il ne peut se passer et de la communauté à laquelle il ne peut s’arracher. C’est pourquoi les vrais artistes ne méprisent rien ; ils s’obligent à comprendre au lieu de juger. Et, s’ils ont un parti à prendre en ce monde, ce ne peut être que celui d’une société où, selon le grand mot de Nietzsche, ne régnera plus le juge, mais le créateur, qu’il soit travailleur ou intellectuel.

 

Le rôle de l’écrivain, du même coup, ne se sépare pas de devoirs difficiles. Par définition, il ne peut se mettre aujourd’hui au service de ceux qui font l’histoire : il est au service de ceux qui la subissent. Ou, sinon, le voici seul et privé de son art. Toutes les armées de la tyrannie avec leurs millions d’hommes ne l’enlèveront pas à la solitude, même et surtout s’il consent à prendre leur pas. Mais le silence d’un prisonnier inconnu, abandonné aux humiliations à l’autre bout du monde, suffit à retirer l’écrivain de l’exil, chaque fois, du moins, qu’il parvient, au milieu des privilèges de la liberté, à ne pas oublier ce silence et à le faire retentir par les moyens de l’art.

Aucun de nous n’est assez grand pour une pareille vocation. Mais, dans toutes les circonstances de sa vie, obscur ou provisoirement célèbre, jeté dans les fers de la tyrannie ou libre pour un temps de s’exprimer, l’écrivain peut retrouver le sentiment d’une communauté vivante qui le justifiera, à la seule condition qu’il accepte, autant qu’il peut, les deux charges qui font la grandeur de son métier : le service de la vérité et celui de la liberté. Puisque sa vocation est de réunir le plus grand nombre d’hommes possible, elle ne peut s’accommoder du mensonge et de la servitude qui, là où ils règnent, font proliférer les solitudes. Quelles que soient nos infirmités personnelles, la noblesse de notre métier s’enracinera toujours dans deux engagements difficiles à maintenir — le refus de mentir sur ce que l’on sait et la résistance à l’oppression.

Pendant plus de vingt ans d’une histoire démentielle, perdu sans secours, comme tous les hommes de mon âge, dans les convulsions du temps, j’ai été soutenu ainsi par le sentiment obscur qu’écrire était aujourd’hui un honneur, parce que cet acte obligeait, et obligeait à ne pas écrire seulement. Il m’obligeait particulièrement à porter, tel que j’étais et selon mes forces, avec tous ceux qui vivaient la même histoire, le malheur et l’espérance que nous partagions.

Ces hommes, nés au début de la première guerre rnondiale, qui ont eu vingt ans au moment où s’installaient à la fois le pouvoir hitlérien et les premiers procès révolutionnaires ont été confrontés ensuite, pour parfaire leur éducation, à la guerre d’Espagne, à la deuxième guerre mondiale, à l’univers concentrationnaire, à l’Europe de la torture et des prisons, doivent aujourd’hui élever leurs fils et leurs œuvres dans un monde menacé de destruction nucléaire. Personne, je suppose, ne peut leur demander d’être optimistes. Et je suis même d’avis que nous devons comprendre, sans cesser de lutter contre eux, l’erreur de ceux qui, par une surenchère de désespoir, ont revendiqué le droit au déshonneur, et se sont rués dans les nihilismes de l’époque. Mais il reste que la plupart d’entre nous, dans mon pays et en Europe, ont refusé ce nihilisme et se sont mis à la recherche d’une légitimité. Il leur a fallu se forger un art de vivre par temps de catastrophe, pour naître une seconde fois, et lutter ensuite, à visage découvert, contre l’instinct de mort à l’œuvre dans notre histoire.

Chaque génération, sans doute, se croit vouée à refaire le monde. La mienne sait pourtant qu’elle ne le refera pas. Mais sa tâche est peut-être plus grande. Elle consiste à empêcher que le monde ne se défasse.
Héritière d’une histoire corrompue où se mêlent les révolutions déchues, les techniques devenues folles, les dieux morts et les idéologies exténuées, où de médiocres pouvoirs peuvent aujourd’hui tout détruire mais ne savent plus convaincre, où l’intelligence s’est abaissée jusqu’à se faire la servante de la haine et de l’oppression, cette génération a dû, en elle-même et autour d’elle, restaurer à partir de ses seules négations un peu de ce qui fait la dignité de vivre et de mourir. Devant un monde menacé de désintégration, où nos grands inquisiteurs risquent d’établir pour toujours les royaumes de la mort, elle sait qu’elle devrait, dans une sorte de course folle contre la montre, restaurer entre les nations une paix qui ne soit pas celle de la servitude, réconcilier à nouveau travail et culture, et refaire avec tous les hommes une arche d’alliance. Il n’est pas sûr qu’elle puisse jamais accomplir cette tâche immense, mais il est sûr que, partout dans le monde, elle tient déjà son double pari de vérité et de liberté, et, à l’occasion, sait mourir sans haine pour lui. C’est elle qui mérite d’être saluée et encouragée partout où elle se trouve, et surtout là où elle se sacrifie. C’est sur elle, en tout cas, que, certain de votre accord profond, je voudrais reporter l’honneur que vous venez de me faire.

Du même coup, après avoir dit la noblesse du métier d’écrire, j’aurais remis l’écrivain à sa vraie place, n’ayant d’autres titres que ceux qu’il partage avec ses compagnons de lutte, vulnérable mais entêté, injuste et passionné de justice, construisant son œuvre sans honte ni orgueil à la vue de tous, toujours partagé entre la douleur et la beauté, et voué enfin à tirer de son être double les créations qu’il essaie obstinément d’édifier dans le mouvement destructeur de l’histoire. Qui, après cela, pourrait attendre de lui des solutions toutes faites et de belles morales ? La vérité est mystérieuse, fuyante, toujours à conquérir. La liberté est dangereuse, dure à vivre autant qu’exaltante. Nous devons marcher vers ces deux buts, péniblement, mais résolument, certains d’avance de nos défaillances sur un si long chemin. Quel écrivain dès lors oserait, dans la bonne conscience, se faire prêcheur de vertu ? Quant à moi, il me faut dire une fois de plus que je ne suis rien de tout cela. Je n’ai jamais pu renoncer à la lumière, au bonheur d’être, à la vie libre où j’ai grandi. Mais bien que cette nostalgie explique beaucoup de mes erreurs et de mes fautes, elle m’a aidé sans doute à mieux comprendre mon métier, elle m’aide encore à me tenir, aveuglément, auprès de tous ces hommes silencieux qui ne supportent dans le monde la vie qui leur est faite que par le souvenir ou le retour de brefs et libres bonheurs.

Ramené ainsi a ce que je suis réellement, à mes limites, à mes dettes, comme à ma foi difficile, je me sens plus libre de vous montrer, pour finir, l’étendue et la générosité de la distinction que vous venez de m’accorder, plus libre de vous dire aussi que je voudrais la recevoir comme un hommage rendu à tous ceux qui, partageant le même combat, n’en ont reçu aucun privilège, mais ont connu au contraire malheur et persécution.

Il me restera alors à vous en remercier, du fond du cœur, et à vous faire publiquement, en témoignage personnel de gratitude, la même et ancienne promesse de fidélité que chaque artiste vrai, chaque jour, se fait à lui-même, dans le silence.

 

 

 

La réaction de Sartre après la mort de Camus


[…] Nous étions brouillés lui et moiune brouille, ce n’est rien – dût-on ne jamais se revoir – tout juste une autre manière de vivre ensemble et sans se perdre de vue dans le petit monde étroit qui nous est donnéCela ne m’empêchait pas de penser à lui, de sentir son regard sur la page du livre, sur le journal qu’il lisait et de me dire : “Qu’en dit-ilQu’en dit-il EN CE MOMENT?”

(…) Il représentait en ce siècle, et contre l’Histoire, l’héritier actuel de cette longue lignée de moralistes dont les œuvres constituent peut-être ce qu’il y a de plus original dans les lettres françaisesSon humanisme têtu, étroit et pur, austère et sensuel, livrait un combat douteux contre les événements massifs et difformes de ce tempsMais inversement, par l’opiniâtreté de ses refus, il réaffirmait, au cœur de notre époque, contre les machiavélismes, contre le veau d’or du réalisme, l’existence du fait moral.

Il était pour ainsi dire cette inébranlable affirmationPour peu qu’on lût ou qu’on réfléchît, on se heurtait aux valeurs humaines qu’il gardait dans son poing serréil mettait l’acte politique en question.

(…) cet homme en marche, nous mettait en question, il était lui même une question qui cherchait sa réponse; il vivait au milieu d’une longue vie, pour nous, pour nous, pour les hommes qui font régner l’ordre et pour ceux qui le refusent, il était important qu’il sortit du silence, qu’il décidat, qu’il conclut

Prix National Art Urbain 2009

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La ville de Trilport était une des six villes sélectionnées pour la finale  du Prix National de l’Association pour l’art urbain, qui se déroulait à la Maison de la RATP, avec pour thème 2009 « le Centre urbain et son environnement accessible à tous ».

Précision utile, c’est le jury de cette association qui nous avait contacté, conséquence directe je pense du buzz émanant de la commune, suite aux réalisations et à la démarche environnementale initiée sur le terrain malgré les nombreuses contraintes rencontrées. Ce même jury, après une visite sur site d’une journée nous incitant à participer à leur édition 2009.

Cette soirée a permis au nombreux public présent d’accomplir un véritable tour de France en moins d’une heure, vu le mode opératoire imposé par les organisateurs. Le concours tenant plutôt du speed dating, chaque candidature disposant de « 8 minutes pour convaincre » sur la base d’un diaporama (deux minutes de présentation de la commune, par le Maire, six minutes pour décrire l’opération présentée, par un technicien). Avant de revenir plus en profondeur sur notre candidature, soulignons la diversité des situations présentées : tant au niveau de la localisation, que de la taille des communes ou de leur nature, touristiques ou pas (je pense notamment à Pèzenas et Plan d’Aups).

Soutenu par le CAUE 77 pour ce prix national, nous avions placé notre candidature sous le signe du « Petit Prince ». Ayant finalement opté pour la démarche globale initiée, y compris avec ses imperfections, plutôt que pour la description d’une réalisation aboutie « exemplaire », comme celle du gymnase HQE de la Noyerie, modèle du genre au niveau accessibilité.

Pour être très rapide indiquons que le Grand Prix 2009 a été remporté par la commune de  La Rivière (38), Trilport remportant lui  la catégorie « respect de l’environnement », le jury ayant du être sensible à la démarche globale inititiée .

 

Revenons un peu sur la « ballade du Petit Prince » qui nous a valut cette distinction …

 

 

 

 

Rapide rappel des épisodes précédents :

Dans le cadre d’un projet de territoire mené en partenariat avec le Conseil Général, la municipalité avait engagé dés 2002, une grande concertation destinée à déterminer un mode de développement à privilégier et les besoins prioritaires à satisfaire en tenant compte des moyens financiers de la commune.
Première pierre, la construction du centre de loisirs H.Q.E  » Le Petit Prince », premier du genre dans la région qui a provoqué une véritable révolution culturelle qui s’est propagée non seulement dans la ville, mais bien au-delà (c’est suite à cette réalisation que depuis la CAF majore ses aides aux projets H.Q.E), au regard de l’intérêt suscité par cette réalisation novatrice.
Une des particularités de cet équipement n’avait été pas perçu à l’époque: sa polyvalence. Qualité qui lui a permis rapidement de devenir un élément important de cohésion sociale dans la ville, accueillant (outre le Centre de Loisirs) nombre de réunions, expositions ou concerts.

 

Trois axes  illustrent la démarche globale privilégiée par la municipalité, ce qui vu les contraintes financières n’était pas aussi aisée à mener que certains veulent le faire croire aujourd’hui :
– Développement de la Haute Qualité Environnementale (Centre de loisirs, bâtiment scolaire, gymnase) et de l’Eco habitat afin de lutter contre le réchauffement climatique et d’améliorer l’accessibilité en ville,
– Approche environnementale de l’Urbanisme initiée à partir des travaux du PLU (très novateur au niveau environnemental) et de l’Agenda 21 afin de limiter l’étalement urbain et de protéger la bio diversité,
– Choix d’une mixité sociale et multi générationnelle,épanouie basée sur une ambition qualitative.

 

Je ne reviendrais pas sur le réalisé, notamment le programme d’équipements mené depuis 2004, dont ce blog s’est souvent fait l’écho,mais rappeler que les objectifs poursuivis se propagent depuis et essaiment au delà des autres équipements construits par la municipalité (école de la Charmoye, Gymnase de la Noyerie), jusqu’à l’espace public, avec la création d’une Commission Extra Municipale « Accessibilité », le lancement d’un FISAC permettant de moderniser les commerces de proximité, la désignation d’un référent accessibilité, le PACT ARIM, et élaboration d’un parcours test « accessibilité maximale ».
Depuis la réalisation du «Petit Prince », c’est une véritable relecture de la ville qui est entreprise : mise en accessibilité de la Mairie et des espaces culturels, de la Place de l’église et de l’ensemble des  arrêts bus, aménagement prochain d’un itinéraire piétonnier « référence », emprunté par nombre d’usagers dont les écoliers fréquentant le « Petit Prince » et se rendant au restaurant scolaire de l’école Prévert et réalisé avec la collaboration du Pact Arim, référent accessibilité de la commune.

 

Quelques invariants se dégagent, tenant compte de la contrainte financière, ce qui dans le contexte actuel n’est pas si anodin, ils peuvent être utiles à un essaimage de certaines des pratiques environnementales initiées sur la commune et citées par Dominique Bonini, du CAUE77 lors de sa présentation :

« 1>La force de la concertation menée en amont, elle permet d’obtenir un équipement coproduit,plus fonctionnel, évolutif et mieux utilisé.
2>L’intégration au site, première des 14 cibles de la démarche HQE, elle est essentielle dans la relation entre le bâtiment et son environnement extérieur. Elle reste la source d’une réelle harmonie architecturale et contextuelle.
3>L’efficacité énergétique, très dépendante de l’intégration au site, elle reposera avant tout sur une isolation optimum et des choix judicieux de matériaux pérennes. Les considérants techniques n’intervenant qu’en second lieu !
4>La gestion de l’eau, répondra aux deux approches complémentaires : l’infiltration naturelle et la récupération pour réemploi de l’eau pluviale, notamment pour les chasses d’eau de sanitaires,
5>La polyvalence et la mutualisation des espaces chercheront à répondre aux besoins d’aujourd’hui tout en intégrant les conditions de réponses aux besoins futurs, le principe de mutualisation venant réduire les m2 produits, il est utile de réfléchir également en amont sur la reversibilité des usages
6>Enfin l’accessibilité pour tous : relevant certes d’une obligation légale il importe de la placer au coeur même du programme de l’équipement en sa capacité de catalyseur de la qualité d’ensemble.

Pour ce qui est de la qualité d’ensemble, se souvenir que l’équipement public ne peut trouver sa justification que dans le service rendu et que la plus grande preuve de réussite c’est le lien social intergénérationnel qu’il est capable de faire naître.

Des perspectives enfin ! car on l’a compris, la ballade du petit prince ne s’arrête pas aujourd’hui. La ballade accompagnera le projet d’un éco-quartier de 300 logements ouverts à la mixité fonctionnelle et sociale. Situé à 300 mètres du centre ville, le projet est soutenu par la région Ile de France et l’Etat. Le futur quartier durable profitera de la proximité de la gare SNCF, celle-ci fait l’objet d’une réflexion pôle gare issue du plan de déplacement urbain régional et vise à une desserte bus améliorée, à une diminution de l’utilisation de la voiture et à un renforcement des circulations douces sécurisées en direction de la gare prolongeant le chemin des écoliers.

Ainsi la démarche de qualité conduite par la ville de Trilport, partie d’un équipement pour être généralisé à l’ensemble urbain, saura à n’en pas douter, répondre à la sollicitation revisitée du Petit Prince

« S’il te plait dessine-moi une ville durable agréable à vivre et accessible à tous ». »

 

 

Palmares 2009

 

 

« Centre-village, porte du Parc »
La Rivière (38)
PRIX arturbain.fr
2009
« Molière en sa ville accessible à tous»
Pézenas (34)
Mention Qualité Architecturale
« Coeur de village pour tous»,
Plan d’Aups Sainte Baume (83)
Mention Qualité de la Vie Sociale

et

Meilleure Communication

« La ballade du Petit Prince»,
Trilport (77)
Mention Respect de l’Environnement
« Boulevard en circulations douces»
Parthenay (79)

 

Mention

et

Prix Internet du Public

« Gare RER accessible »
RATP, Lognes (77)
 

Mention

 

 

 

Qui était Robert Auzelle ?

– sur le site arturbain

– sur le site de la cité de l’architecture