Vie de Maire

vie de Maire.jpgJ’ai participé à l’émission le « Docu-débat » (LCP-Public Sénat) de Claire Barsacq qui prolongeait la diffusion de l’excellent documentaire : ‘Vie de Maire ». Outre Pascal Carcanade, son réalisateur, étaient invités Fabienne Keller, sénatrice UMP et ancienne Maire de Strasbourg, Samir MAIZAT, candidat aux municipales d’Aubervilliers, animateur de la liste citoyenne « 100% Aubervilliers » et Anne MUXEL, Politologue au centre de recherche de Sciences Po, fil rouge du débat : le quotidien des élus locaux.

Quelques mots sur ce documentaire sensible, délicat et  plus que tout empreint d’humanité. Le réalisateur a su restituer autour de brefs moments de vie, saisis et croqués sur le vif, toute la diversité de nos 36 000 communes et le rôle de catalyseur sociétal qu’y joue l’élu(e) local. Six trajectoires personnelles, aux contextes radicalement différents, ayant pourtant comme points communs : l’amour du terrain, le gout de l’échange direct et un enracinement local authentique à leur territoire.
La simplicité et la passion qui les animent sont rafraichissantes, à des années lumière des logiques d’appareils, quelquefois hors sols, des états majors parisiens des partis, dans lesquels ambitions personnelles, rivalités, petites phrases assassines fournissent une matière première facile et commode à des médias complaisants, contribuant à donner une image déplorable du politique.
Ce film, véritable plaidoyer à l’engagement républicain, souligne le rôle des « petits élus locaux » qui s’activent au quotidien, quelque soit la taille de leur commune, pour « être utile à vivre et à rêver » et préserver coute que coute, le lien social, aujourd’hui si menacé,  indispensable pour faire société.
Ils sont les symboles d’une valeur essentielle, l’engagement. Valeur qui fait de ce mandat de Maire, particulier à plus d’un titre, le plus attachant de toute la vie politique.
L’importance qu’il prend dans leur vie, tout ce qu’ils y consacrent (en temps, énergie, passion, compétences, conviction), les sacrifices que ce mandat impose au niveau personnel ou professionnel ne sont pas la seule explication de l’ampleur de  leur détresse un soir de défaite électorale. C’est un véritable déchirement personnel qui est ressenti, ce que j’ai perçu l’an dernier auprès de quelques amis défaits,  curieux mélange ou se mêle injustice, sentiment d’abandon et surtout de profonde solitude.
Durant ce débat j’ai d’ailleurs pu constaté combien Fabienne Keller, ancienne Maire de Strasbourg, portait encore en elle cette fêlure, une blessure intime et cachée au plus profond, qui ne guérit jamais tout à fait.

Les élections départementales sont passées depuis, aussi aujourd’hui la réalité apparait quelque peu différente, même s’il ne faut jamais comparé un scrutin à un autre … La fracture entre élu et citoyen s’est encore aggravée, tant ce scrutin a été marqué par une forte abstention et la poussée du Front National.

Comment combattre ces deux tendances mortifères ?
A mes yeux, point de fatalité, mais de l’action concrète … Voici quelques pistes de réflexion, qui si elles sont personnelles, sont partagées par quelques acteurs du terrain …

 

 

 

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La déconnection croissante entre le vote et son objet est une réalité qui doit nous interpeller, tant elle est lourde en significations pour toute démocratie.
Un vote local ne constitue pas un sondage de popularité éphémère pour une émission de télé réalité d’ampleur nationale, mais désigne tout simplement des élus qui assumeront durant des années un mandat déterminé impactant directement la vie quotidienne des habitants.
Certains électeurs avec leur bulletin de vote ou leur abstention se sont tirés une balle dans le pied. Le zapping électoral peut les amener à choisir un slogan ou un logo sans incarnation ni projet, plutôt qu’un élu connu, quelquefois même apprécié, actif, combattif, à l’écoute, résolu, dynamique … Mais manifestement ils n’en sont plus là, c’est dire l’ampleur du traumatisme qui traverse dans certains territoires notre société !

Toute femme ou homme politique dont l’ambition est nationale, il y en a parait il, devrait non seulement s’ouvrir à la vie de ses concitoyens, mais surtout la partager pour s’en nourrir, s’en imprégner, et plus que tout la comprendre, avant que de vouloir la transformer !
Pour elle ou lui, mieux vaut sortir parfois de sa bulle militante ou de certains quartiers parisiens, histoire de respirer un peu d’air frais, tant ces périmètres, celui de la bulle et du quartiers sont réducteurs ! Rien ne vaut le monde réel pour s’y raccrocher, s’y enraciner, afin d’alimenter ses racines de la réalité du terrain, de la vie vécue tous les jours par les anonymes. La versatilité des urnes ne vient pas toujours que du citoyen, loin s’en faut …

Il est urgent de réhabiliter l’action politique, surtout lorsqu’elle a faillit sur certains territoires, ce que nul ne peut contester. Dire que les partis traditionnels ont aujourd’hui perdu une grande partie de leur aura et de leur crédibilité n’est qu’entre ouvrir une porte déjà bien ouverte. Ils ne sont plus audibles dans les terres oubliées, là où les habitants, désabusés, se sentent rejetés, déclassés …
Autant de ressentiments qui les mènent à la révolte citoyenne, qui s’exprime dans les urnes par l’abstention ou le vote extrémiste. Nous devons être vigilants, une fois que le pli est pris, tout peut arriver y compris le pire !  Nous devons et dans l’urgence,  remettre le bleu de chauffe, faire notre auto critique, nous remettre en cause, puis en piste, afin de relever ce défi républicain.

Le vote FN est il une fatalité ? Non, certainement pas … Encore faut il apporter à nos concitoyens des éléments de réponses concrets, visibles, et surtout bien palpables. Encore faut il les respecter en leur donnant le sentiment d’exister, en les prenant en considération, et pour ce faire,  maintenir absolument le fil, non seulement du dialogue citoyen, mais celui si fragile, du lien social …
C’est aussi pour cela que je suis mobilisé contre des baisses de dotations aveugles, qui mettent en péril, là ou elles sont les plus utiles, dans les territoires périphériques sans grands moyens financiers notamment, ces digues de solidarités et de destinée commune qui ne tiennent que grâce à l’énergie d’élus locaux menant des politiques publiques de proximité essentielles à la cohésion sociale, et qui n’en peuvent manifestement plus !

Le FN est un parti qui agit dans tous les milieux de la société désormais, jouant sur du velours, tant il surfe sans scrupule ni souci, sur la somme des douleurs, détresses, contradictions, révoltes d’un électorat sous pression, qui garde la nostalgie d’un passé autrefois heureux et porte en lui une terrible peur de l’avenir. Ce contexte anxiogène est le terreau du parti frontiste, il est alimenté par un contexte social et économique dégradé, un manque de résultats concrets, des annonces déconnectés de la réalité ressentie, et se nourrit du piètre spectacle de la division et de l’éparpillement des partis politiques traditionnels, ou les querelles de personne prennent le pas sur l’intérêt général, amplifiées par le prisme déformateur des médias !

Pour les politiques, le défi est immense … D’autant que le socialisme municipal qui a écrit de si belles pages dans nos territoires, grâce à l’émergence de générations d’élus passionnés, charismatiques et dévoués ayant réussit à changer la vie au quotidien de leurs concitoyens, arrive en fin de cycle et il a grand besoin d’un second souffle.
Faire de la politique, y compris au niveau local, ne peut se réduire à maitriser les dossiers et à une simple expertise en urbanisme ou gestion, d’ailleurs méfions nous de toute expertise qui nous éloignerait du citoyen (je l’ai appris quelquefois à mes dépens), surtout en période de crise ou de vent mauvais, sinon l’élu prend le risque d’apparaitre désincarné, fataliste, résigné et brise rêve.

Il faut préserver plus que tout notre capacité d’indignation, notre combativité, mener et provoquer des révoltes si nécessaire, dans le but de défendre nos territoires et tous ceux qui y vivent, lutter contre la fracture territoriale qui insidieusement entraine la fracture sociale, lutter contre l’inertie, l’aquabonisme  ou l’autisme technocratique de tant de moulins à vent ou à parole, sans âme ni perspective.
Nous devons agir pour initier ou irriguer les projets qui émergent et partent des citoyens, leur parlent et les impliquent, des projets qui doivent faire sens, forger la cohésion sociale, des projets qui autorisent des lignes de fuite et des chemins de traverses, mais qui surtout incitent enfin les habitants, où qu’ils vivent dans cette bonne terre de France, à avoir confiance en demain et surtout dans les autres…

Il nous faut  « rallumer les étoiles » auprès de cet électorat déçu, désabusé, éteint, pour vaincre l’étoile noire frontiste et proposer des lendemains qui chantent aux oreilles de nos concitoyens, qui leur donnent l’énergie, la force de contribuer à bâtir ensemble, un avenir plus serein, solidaire et durable

 

Liens

Le débat de l’émission

Le Web Doc « Vie de Maire »

L’Association des Petites Villes de France

 

Tristes topiques

IMG_0688.jpgLes tristes résultats de ce week end, sont de la même veine que ceux des municipales de l’an dernier, une véritable hécatombe ! Le nombre de duels FN / UMP auxquels nous avons assisté, notamment en Seine et Marne, laisse à tout républicain plus qu’un goût amer dans la bouche et chacun  gardera  de ce dimanche un souvenir douloureux.
L’enjeu local était en théorie l’objectif central du scrutin, il a  laissé place à un test de popularité national, occasionnant beaucoup de dégâts humains, un gâchis territorial sans nom, et un résultat final en trompe l’œil tant il maximalise les résultats de l’UMP (du fait de la division de la gauche) et ne traduit pas concrètement l’incontestable montée du FN. Cette poussée  n’est ni une fatalité, ni inexorable, encore faut il se donner réellement les moyens concrets de la combattre.

Ces élections doivent interpeller tous les partis républicains, sans exception aucune, y compris et surtout ceux qui se sont auto englués dans un NiNi irresponsable et coupable. Un résultat qui confirme mon opinion sur le fait  que si un élu ou un politique veut réellement changer la vie des autres, il doit d’abord la partager pour la comprendre tout court ! C’est aussi une leçon de ce scrutin.
Trop de politiques, qu’ils soient de la gauche du PS, de son centre, ou de sa « dite droite »  pour se limiter à ce seul parti, sont totalement hors sol, ancrés et arc boutés a des priorités qui souvent se trouvent à des années lumière de celles de leurs concitoyens …  Aussi ne faut il pas s’étonner si, un jour, ces derniers décrochent et se détournent d’un discours qui non seulement ne leur parle pas, ne les respecte pas, tant dans sa formulation que dans ses objectifs ou priorités !

Alors que faire, aujourd’hui et demain ?

Pour le PS et ses militants l’équation est on ne peut plus simple : Réagir et rebondir ou mourir … Trouver la capacité de se rassembler, malgré les soubresauts de ces derniers mois, ou dépenser ce qui nous reste d’énergie à se diviser, s’éparpiller au quatre vents de la discorde et de la polémique, pour in fine, ne plus rien peser dans le débat politique national et n’avoir le sentiment d’exister que par la force des ressentiments ou des ambitions déçues !
De ma petite fenêtre de petit élu local, une vraie colère, jusque là contenue, monte. Elle m’apparait encore plus légitime après ce triste week end, j’ai le sentiment d’un gâchis incommensurable. Une colère froide, libératoire mais à priori inutile, tant espérer qu’un jour l’effet « bottom up » de la réalité du terrain atteigne des états majors parisiens isolés dans leurs tours d’ivoire (souvent d’ailleurs pour jouer un remake de : « Petits Meurtres entre amis ») semble vain.
Pour être clair, mon propos ne concerne pas spécifiquement ce gouvernement ou un courant particulier du PS, car je pense sincèrement, que là n’est pas le nœud du problème, l’origine du divorce et de la fracture avec le citoyen est non seulement bien plus profonde mais elle s’élargit encore après ce scrutin.
Aussi j’ai de plus en plus de mal à me retrouver dans ces lignes de partage, souvent factices, que sont les courants du PS, quand le leader remplace l’idée, la réponse formatée (pour ne pas dire l’élément de langage) l’interrogation, la certitude la nécessaire remise en cause et le commentaire au final l’analyse ou la perspective, tous les doutes sont permis.
Un divorce dont le PS n’a pas l’exclusivité, vu les « scores » réalisés par les autres formations de gauche, qui n’avaient lors de cette campagne, à priori, qu’une seule obsession, éparpiller les voix des électeurs avec les conséquences que l’on connait, pour  « casser du PS »! Reléguant du même coup, l’objectif pourtant central du scrutin : gérer des départements afin de proposer à nos concitoyens une politique plus sociale, solidaire et durable.
Constatons que ces forces politiques, dites « alternatives », n’ont guère déplacé les foules, bien au contraire ! Vu le résultat des urnes, un constat s’impose, arithmétique. Les Français sont loin de réclamer à corps et à cri une politique plus à gauche; leçon que devrait méditer certains de mes camarades …

Voilà pour le constat.

 

Nous devons collectivement, et au plus vite, nous retrouver et surtout nous ressourcer pour « réallumer les étoiles » comme l’écrivait si joliment Apollinaire. Encore faut il pour apercevoir la voie lactée, éteindre les sunlights médiatiques et parasites qui nous aveuglent et éblouissent tant de petits égos exacerbés les empêchant de ne percevoir autre chose que leur seul reflet, dans des miroirs cathodiques pathétiques tant ils sont egotiques.
Tels des narcisses du XXIeme siècle, captivés de leur seul reflet, ils recherchent la minute d’éternité médiatique, ou au choix le quart d’heure de célébrité plus que relative, que leur offrent sans retenue et si facilement les chaines de la TNT …

Il serait bon que chacun retrouve le minimum d’humilité et d’humanité nécessaire, renoue avec la proximité concrète et j’ose le dire l’esprit de camaraderie, tout en s’imprègnant de la réalité locale vécue au quotidien par leurs concitoyens, en ayant une oreille attentive pour les alertes lancées par les sentinelles de proximité que sont les élus locaux PS en place (dont la valeur provient aussi désormais de leur rareté croissante), avant de vouloir donner des leçons à la planète entière ou de lancer des mesures déconnectées du sol qui entraînent le chaos.

Ne nous trompons pas de combat, engageons nous au service de nos concitoyens pour concrètement changer leur vie chaque jour : pas après pas, si nécessaire même si cela fait réformiste ou « petit bras » de la révolution.
Cette démarche, je l’assume, pire même je la revendique, tant j’ai le sentiment, comme Maire, de transformer au final plus la vie de mes concitoyens que bien des orateurs médiatiques, adversaires auto proclamés de la finance et du grand capital, excommuniant à tour de bras, grands donneurs de bons points en « socialisme théorique et réthorique » devant l’éternel, ! Il est vrai qu’avec eux la droite peut dormir tranquille sur ces deux oreilles !

Encore devons nous admettre, que le monde se transforme de plus en plus vite, que ne pas avancer signifie reculer et prendre le risque, in fine, de ne plus peser sur notre destinée, celle du pays, de l’Europe ou de la planete.
Encore devons nous rappeler que nous ne sommes rien sans les autres, et plus que tout, être persuadé que la priorité absolue à accorder à l’urgence environnementale n’est non seulement pas négociable, mais doit devenir la matrice d’un projet politique ambitieux pour le XXI eme siècle comme le moteur d’un nouveau type de croissance durable et surtout équitable qu’il nous faut construire au plus vite …

Si je peux comprendre aisément la réaction d’amis désabusés et écœurés par les résultats (trop qui n’avaient pas démérité, loin s’en faut, l’ont payé cash !) qui lâchent l’affaire, à titre personnel, je ne m’y résous pas, préférant agir plutôt que de voir mourir ou se déliter les valeurs auxquelles je crois et de plus en plus. Ce second tour FN / UMP me restera longtemps au travers de la gorge et je ne veux surtout pas avoir à choisir en 2017 entre un Sarkozy et une Le Pen !
Je privilégierais, comme toujours, le mode d’action local, mais ne m’interdirais pas désormais d’intervenir en mode plus global, faisant entendre une voix aussi légitime finalement que celles inondant et encombrant sans retenue l’univers médiatique, une toute petite valeur ajoutée en quelque sorte.

 

 

 

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Les mamelles de Tiresias

 

« Puis l’on entendit de grands cris parmi toute l’armée

ILS ÉTEIGNENT LES ÉTOILES À COUPS DE CANON

Les étoiles mouraient dans ce beau ciel d’automne
Comme la mémoire s’éteint dans le cerveau
De ces pauvres vieillards qui tentent de se souvenir
Nous étions là mourant de la mort des étoiles
Et sur le front ténébreux aux livides lueurs
Nous ne savions plus que dire avec désespoir

ILS ONT MÊME ASSASSINÉ LES CONSTELLATIONS

Mais une grande voix venue d’un mégaphone
Dont le pavillon sortait
De je ne sais quel unanime poste de commandement
La voix du capitaine inconnu qui nous sauve toujours cria

IL EST GRAND TEMPS DE RALLUMER LES ÉTOILES »

 

Guillaume Apollinaire

Avant toute chose : Faire obstacle au FN

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Dimanche je voterais en mon âme et conscience et sans réserve contre le Front National.

J’aime trop la république, les valeurs que mes grands parents et parents m’ont inculqué pour me tromper de combat …

A ceux qui à droite, pronent le « Ni Ni », je répondrais simplement que l’histoire ne leur a rien appris, que les valeurs de la république ne se négocient pas, qu’ils ne s’honorent pas en prenant ainsi une position à des années lumière de l’idéal gaulliste, entrenant un flou qui ne peut les mener in fine qu’à leur perte.

Aux électeurs de gauche, qui interloqués et révoltés par le non positionnement honteux de l’UMP, se refusent à choisir entre « peste et choléra », je leur conseille de lire la tribune de Boris Cyrulnik, le père du concept de résilience nous y parle surtout de résistance, son histoire personnelle donne quelque peu de poids à ses propos …

Je comprends le désarroi de trop d’électeurs désabusées qui avec le sentiment d’être des oubliés de la république se tournent en désespoir de cause vers les promesses sans lendemain du parti frontiste. Je me refuse à les juger en m’arrêtant aux conséquences, je préfére m’attaquer directement aux causes du mal qui ne sont pas uniquement irrationnelles, mais malheureusement aussi très concrètes.
Je veux simplement leur rappeler qu’un scrutin local n’est pas un sondage d’impopularité nationale. Dimanche prochain, les électeurs désigneront des élus chargés de gérer, dés le lendemain de l’élection, des départements, dont le mandat est destiné à améliorer le quotidien des habitants, ce que trop souvent aveuglés par une colère que je peux comprendre, certains ont tendance à oublier et en désespoir de cause se tournent vers une photo d’inconnus dont ils ne connaissent rien et un simple logo… perspectives pour le moins réductrices …

Le vote de la semaine dernière illustre la fracture croissante entre Politique et citoyen, fracture béante et angoissante, dont les états majors parisiens doivent saisir à la fois la gravité, l’urgence et le risque démocratique.
La politique plus que jamais doit, non seulement se rapprocher de la vie réelle, mais en être l’incarnation, et ne plus rester la chasse gardée d’un sérail d’élèves de grandes écoles et de collaborateurs de cabinet isolés dans leur bulle médiatique et égotique,  laissant à une technostructure hors sol la maitrise des dossiers.

Aussi, je n’ose imaginer la situation dans toutes ces villes et villages, notamment les plus pauvres, lorsque les baisses de dotations successives auront ébranlé durement ou détruit les digues de solidarité que les élus locaux s’efforcent de maintenir encore, envers et contre tous, malgré les aléas ou coups du sort que nous réservent certaines décisions en provenance de Paris !!!

Pour finir sur une note plus poétique, quelques vers de la magnifique poésie de Louis Aragon : « La rose et le réséda », repris hier par Christiane Taubira :

« Quand les blés sont sous la grêle
Fou qui fait le délicat
Fou qui songe à ses querelles
Au coeur du commun combat
Celui qui croyait au ciel
Celui qui n’y croyait pas »

 

 

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La vie de Boris Cyrulnik « dérape quand, alors qu’il a 2 ans, son père s’engage dans le 22e régiment des volontaires étrangers. A partir de ce moment-là, sa mère se retranche en elle-même. Elle le confie à l’Assistance publique, avant d’être arrêtée le 18 juillet 1942.
Ses parents mourront au camp d’extermination d’Auschwitz. « Comment vivre avec eux puis soudain sans eux ? Il ne s’agit pas d’une souffrance ; on ne souffre pas dans le désert, on meurt, c’est tout », analyse-t-il. De ces années, il ne se souvient de rien. Enorme trou noir de non-vie. Ses souvenirs reviennent quand son institutrice vient le chercher à l’Assistance. « Pour m’apprivoiser, elle avait apporté une boîte de morceaux de sucre et m’en donnait. »

Voici son appel pour un vote républicain …

« J’ai connu des régimes totalitaires, pendant et après la Seconde Guerre mondiale. On sait maintenant comment ils se préparent : il faut d’abord désigner des boucs émissaires de façon à orienter l’agression contre les étrangers et les parasites sociaux en affirmant que le gouvernement précédent les a laissés s’installer. Quand l’émotion est ainsi provoquée, les foules subjuguées sont faciles à manipuler.

Les discours totalitaires agissent sur les sentiments bien plus que sur la raison. Ils ne tiennent pas compte de la réalité qui est toujours plus nuancée et difficile d’accès.

A l’opposé, les débats démocratiques donnent la parole à plusieurs conceptions du monde. Ils sont plus laborieux, ils exigent des échanges et parfois des compromis, mais ils évitent les dictatures et les radicalisations sociales.

Je ne pensais pas qu’un jour, j’entendrais à nouveau des discours totalitaires qui renaissent dans le monde et en France.

Il est plus que jamais nécessaire de prendre position pour défendre nos valeurs républicaines. »

Boris Cyrulnik – 24 mars 2015

19 mars 2015 : « à Claude Gauthier, avec respect … »

dix-neuf.jpgVouloir « effacer » l’histoire est une obsession partagée par tous les obscurantismes et tous les totalitaires, qu’ils soient de l’Etat Islamique ou de métropole, ignorant que le temps est un tamis implacable et que l’homme n’est que sable qui passe.

Robert Ménard, compagnon de route du Front national, Maire de Béziers, en a fait son combat, dévoilant par la même son vrai visage, comme le peu de considération qu’il a de la république.
Sa décision de débaptiser la rue du « 19-Mars-1962 » et de lui attribuer le nom d’un participant au putsch des généraux et de l’OAS, illustre son manque de respect pour la mémoire de ceux dont les noms gravés en lettres d’or ornent nos monuments aux morts et illustre son incommensurable vacuité…  Un élu ne fait que passer et doit quelque soit son ego, prendre en compte cette temporalité, pour le moins éphémère.

Il ne m’appartient pas de juger du bien fondé de donner le nom d’une rue au « Commandant Hélie Denoix de Saint-Marc », militaire courageux, ancien résistant, qui après avoir participé au putsch des généraux, a assumé ses actes avec dignité, mais je veux faire part de mon indignation devant une mauvaise action destinée à entretenir une polémique partisane indigne et inutile à des fins uniquement médiatiques.

 La commémoration du 19 mars, ne célèbre ni une « repentance », ni la défaite de quiconque, elle honore simplement la mémoire de nos compatriotes tombés pour la France, de l’autre coté de la Méditerranée, comme celle de « Claude Gauthier », habitant de Trilport, dont j’ignore s’il était de gauche ou de droite, partisan ou non de l’Algérie Française, mais dont je sais qu’il est mort loin des siens, au nom de son pays, le notre, dans cette terre de soleil et d’azur ou tant de rêves et de vies se sont fracassés.

 Nous devons plus que tout, combattre de vieux démons enfouis au plus profond, assumer l’histoire de notre pays avec lucidité, assumer ses  ombres comme ses lumières. En rappelant que les évènements d’Algérie ont été un horrible conflit qui a marqué à vie des générations de français : une guerre de feu, de sang et d’horreur, guerre que nos politiques ont trop longtemps refusé d’admettre officiellement et dont l’Algérie ne s’est jamais réellement, elle, remise (cf le texte de Kamel Daoud).
Vouloir instrumentaliser cette douleur collective toujours présente, tragédie humaine ayant si longtemps divisé  le pays par le passé, pour en faire une misérable manœuvre politicienne est du niveau de son auteur : minable … Ce n’est pas non plus le meilleur hommage que l’on peut rendre à Hélie Denoix de Saint-Marc.

 Pour les élus, il s’agit simplement de commémorer pour mieux se souvenir afin d’entretenir ce devoir de mémoire au combien utile, qui nous permet de vivre le présent éclairés des leçons du passé afin de construire un avenir plus serein, dans le respect de la démocratie, deux mots que les obscurantistes ignorent et combattent

 

A suivre un très beau texte de Kamel Daoud, écrivain algérien : « Ni m’exiler, ni me prosterner »

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Ni m’exiler, ni me prosterner

Kamel DAOUD

 

Peut-on sortir de la névrose algéro-française ? Car c’est une névrose.
On la reconnait à ceci : le visage est terne des deux cotés, l’affect est vif, la vérité est ténue, la fable est monstrueuse et l’avenir est une feuille morte photocopiée. La névrose se reconnaît à ses traces de pas dans votre tête : elle tourne en rond pendant que vous tournez à vide. Envie d’écrire le monde, d’élargir la fenêtre à la taille de l’océan.

Que pense de moi le japonais penché sur une rime ancienne ou un moteur nouveau ? Que dit la terre du feu sur mon prénom ? Suis-je connu par les glissements neigeux au pôle ou la femme aux hanches larges à Dakar ? Quelle est l’image de mon algériannité dans le brouhaha des divers et des mesures ? Comment sortir de cette longue guerre qui me remplit la bouche de cendre et de totems jacasseurs ? Je rêve d’un poumon neuf et d’un verbe inné. D’aller marcher pieds nus sur un monde de galets. Comment ? Je pouvais parler de mon livre là où j’allais : mes mots auraient été écoutés, nourris ou écartés comme des feuillages sur un chemin de jungle.

Mais parler en France pour un algérien ou en Algérie pour un Français équivaut à tirer un continent avec ses dents. Tout est lourd, même l’humour. Tout a triple sens et quatre cimetières. Tout est pénible, lent, mouvant, chargé, risible et sent le renfermé. C’est un monde mort qui ne cesse de parler. Un lien pourri. Je ne veux pas refaire la guerre ou m’exiler. Juste raconter sans que cela ne soulève des tombes. Dire la feuille quand elle se courbe. Une aube qui ne trouve personne pour l’écouter et qui s’en va. Un ciel qui cherche son reflet sur toute terre possible. Raconter le monde en commençant par un prénom. Dire des histories d’amour et de rire. Des histoires de quartiers et de voisins. Me libérer.

Car au fond, les colons quittent à chaque fois ce pays mais nous laissent prisonniers de nous-mêmes : arabes, français, espagnols, vandales, ottomans. Ils s’en vont puis ne nous quittent plus et nous enferment parmis leurs morts. Et on les porte et emporte. Je rêve de la libération du verbe et du rêve algérien. De la quiétude souriante en bienvenue. D’une profonde confiance en soi. De la possibilité de regarder la mer comme un seuil et pas comme une porte fermée. Je rêve de désirer le monde, pas une guerre, une vengeance ou un mur ou un enfermement ou un effondrement ou une conversion en ablutions. Je rêve d’un pays dont le présent sera plus imposant que la mémoire. Je rêve de sortir de cette prison qui a le dessin d’une confrontation sans fin. Un pays. Une femme. Une descendance proche et éparpillée.

Pénible. Comment se débarrasser de ce lien morbide ? Raconter le monde dans une autre langue que celle du souvenir voulu ou subi ? Je veux être un écrivain japonais mais étant en même temps un algérien sur de soi et des siens. Difficile à faire comprendre cette nuance irréductible qu’est le rêve de ma libération.

Je ne veux plus de l’Histoire.

Elle veut toujours ma mort et mes mots. Elle ne me tolère pas vivant. Je ne veux pas me protester ni me soumettre.

Je veux juste vivre ma terre. Ni vers l’est, ni vers le nord.

 

? Kamel DAOUD ? Janvier 26, 2015

Etre utile à vivre et à rêver

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Les élections locales qui donneront leurs verdicts dans quelques jours, risquent d’apporter de fausses réponses nationales, beaucoup d’observateurs craignant un vote défouloir, à de vrais problèmes locaux.
Il est bon de rappeler que les élus des 22 et 29 mars devront avant tout gérer des départements, ce que trop d’électeurs que je rencontre ont tendance à oublier.
Depuis le scrutin municipal de l’an dernier, tout semble se brouiller aux yeux de nos concitoyens, ils risquent d’apprendre à leur dépens qu’un vote local n’est pas un sondage d’impopularité mais bien la désignation d’élus qui devront assumer un mandat destiné à améliorer leur quotidien, il y a toujours des lendemains aux soirées électorales.

Ce problème de représentation politique illustre la fracture croissante entre le Politique et le local dont chacun, surtout nos responsables, doit saisir à la fois la gravité et le risque démocratique. La politique plus que jamais doit, non seulement se rapprocher de la vie réelle, mais en être l’incarnation, et ne plus rester la chasse gardée d’un sérail d’élèves de grandes écoles et de collaborateurs de cabinet laissant à une technostructure hors sol la maitrise des dossiers.

L’occasion de saluer la disparition d’un élu local, qui toute sa vie n’a jamais oublié le monde du réel et dont le travail au quotidien a permis de réconcilier nombre de nos concitoyens à l’action politique, surtout lorsqu’elle est authentique, légitime, et plus que tout utile,  je veux bien évidemment parler de Claude Dilain.
Elu exemplaire s’il en est, humain et humaniste, homme simple mais déterminé, il nous manque cruellement tant il a fait honneur à son mandat local en agissant au quotidien et en portant la voix des oubliés de la république.
Il a démontré que l’humilité, le doute, l’engagement sincère, et plus que tout l’écoute, permettent concrètement de changer la vie au quotidien, y compris et surtout celle des plus humbles, des exclus de la « France invisible » et sont autant de  clés pour ouvrir des perspectives de monde meilleur à partager.
Il a agit à l’endroit même, ou certains n’avaient fait qu’attiser et semer par des déclarations irresponsables, haine, division, colère et désespérance. Montrant avec sérénité la force du faire et de la vague inlassable et à contrario la faiblesse du dire et de l’écume médiatique ou sémantique éphémère.

Claude Dilain a représenté plus que quiconque la noblesse de l’action politique lorsqu’elle est au service de tous et non un outil de promotion à usage personnel. Sa meilleure école a été celle de la vie vécue, de celle qui jour après jour nous façonne et nous amène à nous construire concrètement, avant de vouloir prétendre construire pour les autres.
Trop de nos politiques aujourd’hui sont à des années lumière de cette démarche authentique, prisonniers d’une bulle médiatique ou d’un microcosme clos, véritable chambre d’écho et de réverbération pour les égos de quelques uns et d’exaspération pour les citoyens. Arrivés aux responsabilités, ils se coupent de ces sentinelles de proximité que sont les élus locaux, qui placés en première ligne sont pourtant autant de lanceurs d’alerte vigilants.
Les digues de solidarité entretenues au quotidien à grand peine par ces « petits élus », malgré tous les aléas et obstacles placés sur leurs routes, permettent de maintenir encore le minimum de lien et de cohésion sociale qui fait république, là où c’est le plus difficile mais certainement le plus utile, là ou les communes sont trop souvent le dernier acteur public présent et actif (« s’il n’en reste qu’un ! »), des digues de solidarités qui risquent de lâcher et de laisser en plan des citoyens de plus en plus paumés qui se sentant abandonnés votent alors pour le parti du désespoir.
La montée du FN n’est pas irrémédiable, ce n’est ni une fatalité, ni un argument de congrès ou une posture de tribune. Il doit exister certainement plusieurs réponses pour l’endiguer ou la combattre, sur lesquelles beaucoup de nos responsables planchent « activement » en y consacrant moult argumentaires théoriques, moi je n’en connais qu’une, simple, urgente, qui devrait interpeller toute la classe politique nationale : « Retour vers le réel » …

Ce réel qui habitait Claude Dilain et était au centre de son engagement politique, ce réel qui l’a amené a interpellé durement la classe politique dans une tribune politique célèbre en 2010.

Je lui dédie ce texte d’Etienne Roda Gil, qui symbolise magnifiquement son action au service des autres, car il a été avant tout UTILE à VIVRE  ET surtout et plus que tout à REVER …

 

 

 

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Utile
Etienne Roda Gil

 

A quoi sert une chanson, si elle est désarmée ?

Me disaient des chiliens, bras ouverts, poings serrés.

Comme une langue ancienne qu’on voudrait massacrer,

Je veux être utile, à vivre et à rêver.

 

Comme la lune fidèle, à n’importe quel quartier,

Je veux être utile à ceux qui m’ont aimé,

À ceux qui m’aimeront et à ceux qui m’aimaient.

Je veux être utile à vivre et á chanter.

Dans n’importe quel quartier, d’une lune perdue,

Même si les maitres parlent et qu’on ne m’entend plus,

Même si c’est moi qui chante à n’importe quel coin de rue,


Je veux être utile à vivre et á rêver.

À quoi sert une chanson, si elle est désarmée ?

L’innovation,quête du Graal ou posture?

decentralisation.jpgMarylise Lebranchu, Ministre de la Décentralisation a confié à Akim Oural, Maire-adjoint de Martine Aubry à Lille, un rapport sur les conditions du développement de l’innovation territoriale avec l’objectif de “sortir de la conceptualisation et concrétiser l’innovation territoriale”, rien de moins …
Participant à cette étude coordonnée par le Secrétariat Général à la Modernisation de l’Action Publique (SGMAP) au titre de l’Association des Petites Villes de France,  dont je suis un des référents (au titre du numérique), il me semblait utile d’esquisser quelques pistes de réflexion concernant une thématique qui inspire l’action quotidienne de beaucoup d’élus locaux.

Il est heureux pour nos concitoyens que les collectivités n’aient pas attendu cette initiative, utile au demeurant, pour innover. Si les communes ne sont pas des acteurs exclusifs des dynamiques territoriales, elles en constituent cependant des acteurs majeurs et reconnus; y compris lorsqu’elles doivent s’adapter à un contexte inédit, en « mode complexe », où se cumulent la perte drastique de ressources financières  pourtant indispensables à leur action quotidienne (moins 1/3 des dotations de l’Etat en 4 ans, excusez du peu)  pénalisant principalement celles qui disposent du moins de ressources, impactant economie et emploi local, l’augmentation des difficultés sociales des habitants, l’abandon des services de l’Etat, la mise en place des rythmes scolaires (prés de 200 euros par enfant) et l’aggravation croissante des fractures territoriales.

Si l’action territoriale se déroulait jusqu’à ces dernières années dans un contexte régulé, hiérarchisé, structuré, aux repères pérennes et identifiés, cette époque est désormais révolue et a laissé place à un environnement composé d’écosystèmes locaux soumis à des tensions multiples, aux dynamiques parfois divergentes et des contraintes nouvelles à surmonter entrainant de nécessaires régulations permettant d’arriver à de nouveaux équilibres plus ou moins durables …

Nos territoires sont confrontés à l’accélération et à la multiplication des mutations en cours, ceci dans un contexte de crise budgétaire qui laisse les plus démunis, exsangues. Il faut malgré tout apporter des réponses concrètes, en temps réel, aux habitants comme à l’Etat.
Problématique que l’on pourrait résumer on ne peut plus simplement : comment gagner en agilité, réactivité, solidarité et durabilité avec des ressources moindres et des contraintes supplémentaires ?

Si une des réponses est l’innovation territoriale, chacun sait qu’elle ne pourra tout résoudre, loin s’en faut ! Comment la planifier ou la prévoir, alors que par nature elle est imprévisible rt que c’est le plus souvent en dehors des sentiers battus (« outside the box ») qu’elle apparaît ?
Il n’est pas possible de la décréter du sommet vers la base (On / Off), tant elle émerge du terrain (logique ascendante, « bottom up ») apportant des réponses concrètes et adaptées à une problématique qui concerne d’abord un bassin de vie.

 

Voici quelques propositions destinées à la favoriser …

 

 

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