Bonne nouvelle, l’éco quartier de Trilport est un des 160 éco quartiers sélectionnés par le Ministère de l’Environnement, voilà qui non seulement récompense le travail effectué sur ce dossier mais démontre l’intérêt du projet.
A ce titre, j’ai eu l’occasion d’assister à l’annonce du palmares national par Jean Louis Boorloo, himself, style « grand visionnaire et sauveur de la planète », mais également de participer à la première réunion de travail du Club opérationnel National, que nous avons intégré. Avant de revenir sur une réunion enrichissante et prometteuse, quelques réflexions d’ordre général, suite à la séquence qui vient de s’achever et aux différents appels à projets aux quels nous avons participé.
Qu’est ce qu’un éco quartier aujourd’hui en France ?
Une telle question peut amener aujourd’hui, soit aucune, soit au contraire pléthore de réponses, ce qui au final revient au même. L’absence d’un vrai label autorise toutes les appellations dont beaucoup abusives, nombre d’élus communiquant sur un éco quartier porté par un aménageur se limitant bien souvent à un « lotissement plus » avec quelques objectifs énergétiques, et encore …
Soulignons, nous y reviendrons dans une prochaine note, l’intérêt des démarches portées par le CERTU, le CSTB, l’ADEME et le travail de fond effectué par des collectivités territoriales dont Lille Métropole, par exemple. Je veux témoigner également de la qualité de l’approche de la région Ile de France au travers du concours des Nouveaux Quartiers Urbains, dont nous avons été lauréat. Le mode opératoire choisit et l’aide financière accordée permettent d’accompagner et de répondre concrètement aux problématiques de fond soulevées. Une candidature qui a renforcé deux certitudes: le besoin impératif d’expertise et de compétences plurielles à développer en amont et l’intérêt de travailler sur les 3 piliers du développement durable, dont notamment le pilier social.
Force est de souligner la complexité qui attend les élus désirant créer un éco quartier. Une vraie course d’orientation dans laquelle le coureur ne disposerait ni de GPS, ni de carte, ni de boussole, ce qui complique sérieusement la donne. Car cet objectif nécessite plusieurs types d’expertises.
La plus visible est liée à l’opération d’aménagement elle même : acquisition foncière, construction, architecture, montage juridique (concessions d’aménagement, cahier de prescription, procédures d’urbanisme : ZAC, lotissement …), dans le même ordre d’idée, le maintien ou le renforcement de la bio diversité, la gestion de l’eau, des déchets et de l’énergie, exigent des compétences spécifiques, chacun en est convaincu. Mais il ne faudrait pas obérer un pré requis déterminant, la réflexion de fond sur l’urbanisme et le ou les territoires (communal et supra communal). Un eco quartier est bien un « morceau de ville », qui a vocation à se développer, à rétro agir sur les quartiers environnants et inversement.
Il me semble essentiel de développer comme clé de voute, le projet social, qui apporte au territoire un supplément d’âme … A mon sens, pour réussir dans ce type de projet, un politique ne peut faire l’économie d’une analyse de fond de son territoire, qui lui permettra de réconcilier l’urbain à l’homme, mais également aux usages de la vie sociale mais et à la planète, il y a urgence …
Enjeu majeur des prochaines années, développer les liens entre les territoires, car tout est lié, surtout lorsque l’on parle environnement, le nuage de Tchernobyl ne s’est pas arrêté aux seules frontières hexagonales, et ce qui est vrai pour la géographie, l’est également pour les fonctions de la vie urbaine, il faut refuser le découpage par champ fonctionnel et traiter du tout …
Autre constat, peut être cynique mais avéré, le Développement Durable constitue désormais pour un politique, un passage obligé, un élément ostentatoire d’affichage, indispensable à sa com’. Il est et sera de plus en plus, soyons en convaincu au cœur du projet politique, car traitant du présent, du futur et des conséquences sur le moyen et le long terme … Une approche totalement en phase avec celle d’un éco quartier, qui induit quelques obligations : la gestion des compétences mutualisés, une gouvernance collective asé sur une auto évaluation et la gestion du temps, ou des temps …
Force est de constater que l’aide régionale acquise, nous aide concrètement aujourd’hui dans cet objectif, sans elle, rien n’aurait été possible, nous n’aurions pu réunir les compétences techniques plurielles qui permettront à ce dossier d’avancer, du moins je l’espère. A contrario le fait d’être un des 160 éco quartiers nationaux, ce qui n’est pas rien, demeure une vraie satisfaction, mais pour l’instant n’apporte rien de concret. Un constat certes matérialiste mais avéré; ce qui est dommageable à mon sens, notamment pour les petites collectivités, car c’est bien là aussi que se joue le devenir des éco quartiers.
C’est un des messages que je ferais passer dans le club opérationnel, car le soutien logistique est fondamental au regard de la complexité des enjeux et des thématiques portées par ce nouveau concept de l’organisation urbaine …
Mais comment définir ce fameux club opérationnel ?
Rappelons que ce club est une des actions du plan Ville Durable du MEEDDM et du programme « éco cités-eco quartiers » élaboré suite au Grenelle de l’Environnement, qui vise notamment à définir un référentiel « écoquartiers » d’ici 2012.
Afin d’éviter que ce document se limite à une approche uniquement technique et énergétique du développement durable et prenne en compte des problématiques plurielles (gouvernance, complexité des montages (procédures, financier, mixité sociale et fonctionnelle …) il a été décidé de lancer une « recherche action » permettant de faire remonter des informations utiles. Un des écueils, évidents à la lecture du palmarès 2009 est effectivement d’apporter une réponse qui ne se limite pas uniquement aux nouveaux projets urbains de grandes collectivités, mais de développer également des solutions adaptées à la réhabilitation, au renouvellement urbain, aux zones périphériques, et aux petites collectivités ne pouvant disposer d’ingénierie propre, contexte que je connais particulièrement.
Au menu de cette première journée : bilan de l’appel à projets, débat de portée générale (voir ci après), tables rondes sur les différentes approches actuellement utilisées, focus sur l’éco quartier « référence » (le lauréat, celui de Grenoble) et présentation de la feuille de route 2010.
Ce club opérationnel, répond à plusieurs objectifs : créer un réseau sur le territoire national, identifier et valoriser les pratiques vertueuses, repérer les progrès réalisés dans les 7 thématiques dégagées par le Ministère (Eau, déchets, biodiversité et nature en ville, mobilité, sobriété énergétique et énergie renouvelable, densité et formes urbaines, écoconstruction), élaborer un ou des référentiels communs, soutenir les collectivités en amont et faciliter l’émergence de nouveaux projets. Ce travail de fond sera porté par les 4 ateliers nationaux du club
1 – L’organisation de la maîtrise d’ouvrage, le pilotage et le montage d’un EcoQuartier
2 – Le citoyen et l’entrepreneur, moteurs de l’EcoQuartier (gouvernance et participation)
3 – L’EcoQuartier, levier vers la ville durable
4 – Les EcoQuartiers en milieu rural
Plusieurs cycles de conférences thématiques alimenteront également cette réflexion collective ainsi que la création d’un extranet. Une Conférence nationale de bilan, courant décembre 2010 marquera le point d ‘orgue de cette initiative.
L’analyse des dossiers de candidature traduit l’émergence de réelles tendances de fond allant dans le bon sens : le « penser global », la gouvernance et la participation des parties prenantes, les notions de densité et de formes urbaines, la mobilité intermodale et les mixités qu’elles soient sociale, générationnelle ou fonctionnelle, et la gestion du temps dans le pilotage des opérations.
A contrario, les réponses sur les déchets, la biodiversité et la mobilité sont encore très timides, et de vraies inquiétudes sur la faisabilité des projets apparaissent : prise en charge financière des équipements présentés comme éléments constitutifs du progrès en matière de développement durable (chaudière collective, récupérateur des eaux de pluie…), et gestion ultérieure … Trop peu de réponses ont été apportées semble t’il sur la participation citoyenne, et l’intérêt de rendre ces quartiers attractifs pour les habitants mais aussi pour l’activité.
Cette journée de travail a commencé par des débats soulignant quelques lignes force …
Développer une architecture du plaisir à vivre, afin de réhabiliter la ville et intégrer davantage les usages et les pratiques fonctionnelles dans l’organisation urbaine
Travailler sur la délimitation des villes et des territoires, insister sur le rôle essentiel des lisières et de l’agriculture péri urbaine … L’importance de retrouver le bonheur en ville et non seulement dans les prés, d’y protéger la bio diversité de la rendre « aimable et joyeuse » et ne pas abandonner un précepte simple : la ville doit retrouver une autoprotection et se reproduire sur elle même …
Changer d’échelle dans le dessin du territoire … Il n’y a plus de bastions médiévaux mais des territoires interconnectés relier par toutes sortes de liens et d’espaces de solidarité … « Pas de bâtiment durable sans quartier durable, pas de quartier durable sans ville durable et pas de ville durable sans territoire durable» …
Revenir sur la notion vitale de cout global: le bon marché coute plus cher au final mais un préalable cependant, faire durable demande de l’expertise, de l’ingénierie, des compétences et coute plus cher au présent, mais permet d’économiser pour le futur, nécessité de valoriser aujourd’hui les économies du futur, véritable révolution culturelle à initier …
Favoriser le reconversion et les mixités, déterminer des nouvelles centralités, développer la notion d’art urbain et de structuration des paysages
Vaste programme non ?
D’ores et déjà, le Club opérationnel devra répondre à de nombreuses interrogations liées :
A l’économie de projet : Qu’est-ce que (sur-)coûte un quartier durable ? Comment envisager la question d’une « économie de quartier » ? Quelle économie de la diversité, fonctionnelle, formelle et programmatique ?
A L’innovation urbaine : Quelles innovations technologiques sont acceptables ? Comment passer du prototype à la logique de reproductibilité ? Comment s’approprier collectivement le développement durable ?
Au droit et aux outils du développement durable : Comment passer du règlement à la règle du jeu ? Le développement durable, un outil politique moteur du projet urbain ? Quel(s) espaces communs sont réellement partagés et partageables ?
Aux services à la population : Quels nouveau rapports à la mobilités peuvent et doivent s’instaurer ? Quels réseaux et services collectifs sont transformés ou créés ?
Et à une question centrale portant sur les usages et sur les comportements : les français vont-il accepter de changer leur habitudes ?
Je reviendrais dans une prochaine note, sur les différentes approches présentées lors de cette journée car beaucoup d’enseignements sont à en retirer …