Dotations : pour éviter le tsunami

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Contester l’ampleur, le rythme et l’équité des baisses de dotations y compris dans les médias nationaux ou locaux ne signifie pas pour autant refuser de contribuer à réduire la dette publique, tant son niveau n’est plus soutenable.

L’endettement du pays atteint désormais 2 000 milliards d’euros et représentera dans quelques semaines 100 % de la richesse nationale soit 30.000 euros par Français !
Rappelons pour ceux qui auraient la mémoire courte que la dette a doublé entre 2002 et 2012, passant de 930 à 1860 milliards d’euros, dont 600 milliards pour le seul quinquennat de Nicolas Sarkozy ! Son remboursement constitue désormais la première dépense du pays.

Les taux d’emprunt historiquement bas (2%) étant supérieurs à la croissance (1%), la dette publique augmente mécaniquement chaque jour, situation délicate qui amène le gouvernement à tout faire pour garder des taux compétitifs, d’autant que la croissance est toujours atone …
Toute augmentation peut compromettre l’équilibre du budget, une hausse de +1% imposerait de trouver 30 milliards d’euros supplémentaires pour refinancer la dette !

Il faut sortir de ce cercle vicieux, et au plus vite, les élus locaux en ont conscience, comme ils ont conscience de la nécessité de maitriser la dépense publique, beaucoup s’y emploient et n’ont pas attendu 2014 pour agir (cf ma dernière note) !
Encore faut il que cela soit fait avec raison, mesure, circonspection, constance et surtout équité. J’ai la conviction que le scénario initial de baisse prévu par le gouvernement jusqu’en 2017, ne pourra être mené à terme sans conséquence douloureuse, tant il n’apparaît ni soutenable, ni raisonnable notamment pour les communes aux ressources les plus faibles.
Il ne sera pas non plus sans conséquence sur l’investissement public et l’emploi local, et ce au plus mauvais moment, comme sur la cohésion sociale du pays, et ce dans des secteurs géographiques déjà très fragilisés où les habitants ont plus que besoin de services publics locaux de proximité.
Ces baisses de dotations accentueront la discrimination entre citoyens selon leur lieu de résidence, une perspective inacceptable pour tout républicain !

Le chemin de crête est étroit, mais des pistes de réponse concrètes selon moi existent :

  • Il est urgent de mettre en place des dispositifs de redistribution efficaces, pérennes et surtout équitables
  • Il me semble essentiel de favoriser au plus vite les investissements liés à la transition énergétique, tant ils sont porteurs d’économies structurelles sur le court, moyen et long terme …

Enfin un moratoire suite au budget 2015 semble inévitable, tant je crains la casse territoriale, beaucoup de communes soient dans un état budgétaire très préoccupant dés 2015, notamment les communes aux recettes insuffisantes.

Je vous propose d’aborder de manière concrète quelques pistes de réflexion personnelles

 


 

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Le Premier Ministre affirme que la «péréquation horizontale» initiée depuis 2012 permettra de compenser les effets négatifs des baisses de dotations pour les communes les moins riches.
Revenons donc sur cette notion de « péréquation » essentielle, lorsque l’on aborde la problématique des finances locales. Il s’agit d’un mécanisme de redistribution destiné à réduire les écarts de richesse et les inégalités entre collectivités  (le site vie publique souligne que que 5% des collectivités – soit 1 800 communes – possédaient à elles seules 80% des bases de la taxe professionnelle) qui sont quelquefois flagrantes !

Cette péréquation peut être :

  • verticale via l’Etat, par le biais de dotations versées aux collectivités les plus pauvres au regard de leurs ressources et de leurs charges,
  • horizontale sur la base d’une solidarité entre les différentes collectivités. Les ressources fiscales des plus riches étant reversées aux moins aisées

Elle n’est pourtant dans les cas que trop souvent théorique …

 

Une péréquation  « horizontale », discutable

Pour le gouvernement, la péréquation initiée depuis 2012 grâce au Fonds de Péréquation des ressources Intercommunales et Communales (FPIC) qui attribue aux collectivités défavorisées une partie des ressources des plus « riches » compense les  baisses de dotations annoncées.
C’est inexact, car le compte n’y est pas, et de loin ! Le montant du FPIC étant plafonné à 570 millions d’euros, contre 3,7 milliards de baisse de dotations pour 2015 !

Si ce dispositif constitue incontestablement un pas vers la bonne direction il présente de sérieux points faibles ; outre qu’il devrait porter plutôt sur les écarts de ressources que de dépenses, ce qui n’est pas le cas, son attribution porte à discussion : une commune « pauvre » dans une intercommunalité  «riche» peut se retrouver contributrice alors qu’une autre commune au budget similaire dans une intercommunalité « pauvre » sera  bénéficiaire et il existe d’autres cas de figure tout aussi insolites !

Les élus bénéficiaires ne peuvent également considérer cette « manne » comme pérenne tant son attribution est aléatoire, et elle ne peut, à ce titre, figurer dans un Plan Pluri Annuel d’Investissement, d’autant qu’avec le mouvement brownien initiée par la réforme territoriale, et la création de nouvelles intercommunalités et  métropoles, qui peut prédire la situation de chaque collectivité vis à vis du FPIC d’ici 2017 ?
Certaines études d’experts tendent même à démontrer qu’avec l’émergence d’une métropole, la ville de Paris pourrait ne pas être contributeur, un comble !

 

 L’absence de péréquation dite « verticale »

L’état ne peut faire l’économie d’une refonte totale de sa politique de dotations, en choisissant des clés de répartition plus adaptées, à l’aune des défis que les territoires doivent relever aujourd’hui, et non sur ceux de la France d’avant hier, et qui doit absolument tenir compte des solidarités à préserver entre «France des métropoles » et « France périphérique » (cf Giully) afin de compenser des disparités territoriales de plus en plus flagrantes.
Il s’agit de créer une véritable péréquation verticale, jamais mise en place jusque là ! Pour moi, la question de l’équité est essentielle tant elle a été bafouée, et doit être remise au coeur des critères d’attribution des dotations et aides de l’Etat surtout lorsque la situation budgétaire est contrainte !

L’Etat doit tenir compte des recettes des collectivités, dans un autre registre pour illustrer ce propos, est il utile par exemple, que les communes les plus riches (Issy les Moulineaux, Neuilly sur Seine) bénéficient pour la mise en place de la réforme des rythmes scolaires, au regard des difficultés budgétaires du pays, du même montant d’aides financière par enfant que des communes moins fortunées (au hasard Trilport ou des villages du 77, sans locaux, moyens ou logistiques pour cette mise en place) ? Permettez moi d’en douter …

Pour résoudre, malgré les difficultés rencontrées, la problématique complexe et douloureuse de la fracture territoriale, nous devons passer d’une culture de l’égalité formelle, de plus en plus théorique, à une culture de l’équité concrète.

 

Investir aujourd’hui pour économiser aujourd’hui, demain et après demain

Rappelons que nous importons chaque année, 70 milliards d’euros d’énergies fossiles, en économiser 30% se traduirait par un gain annuel de 20 à 25 milliards d’euros pour notre balance commerciale dont une part importante d’économies pour les budgets de nos collectivités.

Des économies à la fois structurelles et surtout cumulatives, autrement dit plus vite et plus le pays investira, plus il économisera. D’autant que tous les spécialistes s’accordent sur un point, le prix de l’énergie ne va pas cesser d’augmenter dans les prochaines années.

Autre élément d’analyse, social, celui de la précarité énergétique qui ne cesse de croitre vu la crise. Selon l’INSEE 3,8 millions de ménages ont un taux d’effort énergétique supérieur à 10 % de leur revenu, 3,5 millions déclarent souffrir du froid dans leur logement et 621 000 ménages souffrent des deux formes de précarité.
Ajoutons pour être complets que beaucoup vivent dans des secteurs ruraux et péri urbains, des territoires très touchés par les baisses de dotations.

Ajoutons à ces arguments, financiers et sociaux, l’état de la planète et la part prépondérante dans le mix énergétique des énergies carbonées, principales sources des émissions de gaz à effet de serre et reconnues de ce fait comme les principales perturbateurs climatiques.

Il est urgent et stratégique pour des raisons économiques, sociales et environnementales d’investir massivement pour renforcer l’efficacité énergétique du pays, surtout dans les secteurs les plus énergivores. Paradoxalement les baisses de dotations engagés obèrent les capacités d’investissement de leurs collectivités.

L’Association des Petites Villes de France propose que le Fonds de Compensation de la TVA (compensation de 15,761 % versées aux communes de la charge de TVA des dépenses réelles d’investissement faites 2 ans auparavant) soit versé immédiatement et en intégralité aux collectivités afin de les inciter à investir dés 2015, notamment dans les dépenses liées à l’efficacité énergétique.
Ces sommes pourraient être complétées utilement par des fonds européens et diriger vers des investissements liés à la transition écologique autour de dépenses  fléchées : isolation, implantation de chaudières ultra performantes, installation de réseaux de chaleur, mais aussi renouvellement du parc d’éclairage public.
L’éclairage public constitue le premier poste de dépense d’une commune en énergie, en moyenne la moitié de sa consommation électrique (soit 23 % de sa facture énergétique globale et 39 % de sa facture d’électricite)?.

Dans ce registre je tiens à saluer le dispositif d’emprunt vert à 40 ans et à 1,75% de la Caisse des Dépôts et Consignations intégrée à la loi sur la transition énergétique.

Dans le cas ou le gouvernement poursuivrait les baisses de dotation,  il pourrait dédier une part des 11 milliards d’économies prévues à un fonds d’investissement consacrée à l’accompagnement de la Transition énergétique, en privilégiant les axes d’action abordés précédemment.

De telles mesures relanceraient l’activité économique locale, faciliteraient le développement de nouvelles filières (matériaux bio sourcés, énergies …), et le soutien de la Banque Publique d’Investissement permettrait d’avoir un effet multiplicateur et levier.
D’importantes économies structurelles seraient ainsi réalisées dans chaque collectivité, et ce dés 2016, permettant de diminuer les émissions de gaz à effet de serre et le déficit commercial du pays.
Je suis persuadé qu’en les adoptant le pays réaliserait des économies conséquentes permettant sans doute dans le moyen terme (20 à 40 ans) de faire plus d’économies que  la baisse des dotations initiée, tout en armant économiquement le pays dans des industries environnementales de pointe, un éco système économique stratégique aujourd’hui et surtout pour  les prochaines années.
La croissance verte n’est pas qu’une figure rhétorique !

 

 

Trois principes selon moi doivent mener à des inflexions sérieuses de la politique initiée :

  • Les vraies économies sont par essence structurelles et doivent être réfléchies, pérennes, efficaces et inscrites dans le long terme, non désordonnées, conjoncturelles et « courtermistes ».
    Mener un effort massif et urgent sur les économies d’énergie est un axe fort d’action qui donner axes résultats économiques, sociaux et environnementaux, visibles et concrets dés 2016
  • Nous devons placer l’équité au cœur de notre politique territoriale. Il ne peut y avoir une France à plusieurs vitesses et des citoyens de seconde zone, relégués, déclassés ou pire invisibles. Ce serait faire le lit du Front National et être aux antipodes des valeurs que nous portons.
    Il est vital de préserver dans ces territoires les liens de proximité et de solidarités entretenus par les politiques publiques locales.
  • Il faut remettre de la confiance, de la stabilité et de la sérénité dans les relations entre Etat et collectivités. Les élus pour participer à l’effort de redressement du pays, contribuer à la relance économique et agir au quotidien au service de la cohésion sociale, doivent savoir où ils vont et les moyens dont ils disposent pour mener leur action. Ce n’est pas possible actuellement.

 

Le gouvernement doit prendre toute la mesure des conséquences du mouvement qu’il vient d’initier.

L’idée d’un moratoire suite au budget 2015, permettant de dresser plus sereinement et objectivement un état des lieux de la « santé budgétaire des collectivités » (notamment de celles aux ressources les plus faibles) constitue une piste de réflexion constructive.
Ce moratoire permettra d’adapter ou d’infléchir certaines décisions si nécessaire, mais donnera également le temps  de mettre en place de nouveaux dispositifs de péréquation plus équitables, selon moi indispensables.
Sinon je crains le pire, et la tentation d’une fuite en avant afin de ne pas voir la réalité du terrain, entrainera un effet domino qui pourrait déstabiliser dés 2016 beaucoup de collectivités, et déclencher de fait un véritable tsunami territorial que nous pouvons encore éviter.

 

 

 

 

 

Dotations aux communes : avis de Tsunami annoncé

FR3.jpgC’est un véritable tsunami budgétaire qui va s’abattre sur nos territoires dans les prochains mois.
Le plan d’économies de 50 milliards lancé par le gouvernement, justifié vu l’état de nos finances publiques et le poids de la dette, impactera directement les collectivités qui y contribueront à hauteur de 11 milliards d’euros d’ici 2017  ! 
Mais l’ampleur de ces baisses, comme le rythme imposé par le gouvernement risque de mettre à mal les communes les plus fragilisées, une situation inacceptable !

En 2014 la baisse des dotations s’est élevée à 1,5 milliard (sur 41,5 milliards), elle atteindra l’an prochain plus du double (3,7 milliards) provoquant des dommages collatéraux évidents aux collectivités que ce soit sur : 

  •  L’investissement, avec une baisse d’activités préjudiciable à l’emploi de proximité, vu le contexte économique local plus que dégradé,
  •  L’autofinancement, laminé à un niveau tel que leurs marges de manœuvre s’en trouveront plus que réduites, 
  • Les services dispensés aux habitants. Les communes les moins riches seront dans l’obligation d’en supprimer, c’est pourtant dans leurs territoires qu’ils sont le plus nécessaires !

De nombreuses communes, jusque là sans problème, vont se retrouver inexorablement plongées dans le rouge, et bien malgré elles ! Certaines le sont déjà bien que cela ne se sache pas encore. Rappelons que contrairement à l’Etat ou aux collectivités allemandes (au passage) les budgets de nos collectivités sont eux équilibré et leur endettement maitrisé ne finance que les dépenses d’investissement.
La mise sous tutelle par le Préfet, cas de figure exceptionnel, qui ne concernait jusque là que les villes mal gérées, risque de devenir bientôt quasi banale; ce sera alors au représentant de l’Etat de décider des dépenses à supprimer ou impôts à augmenter ! Selon l’Observatoire des Finances Locales, 600 communes sont aujourd’hui sur le fil du rasoir, risquant de basculer dans le rouge dés 2015, du fait d’un manque de ressources, l’effet domino guette …

Quoiqu’en pensent les « sages » de la Cour des Comptes ou les experts de Bercy, la réalité des collectivités territoriales est multiple, du fait des écart de richesse entre les communes. A l’égalité théorique formelle, mieux vaut selon moi l’égalité réelle qui privilégie l’équité, avec de telles décisions, nous en sommes à des années lumière !
La baisse de dotations concernera toutes les communes, mais impactera principalement celles aux recettes  insuffisantes, qui n’en sont plus, pour faire image, à tailler dans le gras de leurs dépenses (représentation, communication, cabinet …), ou au niveau du muscle (baisse des investissements) mais carrément « à l’os » !

Si pour certains Maires l’interrogation est de choisir quelle dépense secondaire diminuer ou supprimer, pour d’autres le choix est plus existentiel : comment assurer la cantine, payer le personnel à la fin du mois, appliquer la réforme des rythmes scolaires, entretenir les écoles, trottoirs et routes, investir pour accueillir de nouvelles familles (écoles notamment)  ou mener la transition énergétique afin de pouvoir, enfin, réaliser des économies substancielles sur le court, moyen et long terme !

C’est le refus de cette perspective qui est à l’origine de ma mobilisation, comme Maire, citoyen, membre de l’Association des Petites Villes de France. A ce titre j’ai répondu aux sollicitations de médias (France Télévision, Europe 1 …) venus m’interroger sur les conséquences concrètes de ces baisses. Prise de parole publique que j’assume vu les incidences pour la vie quotidienne de mes habitants de décisions dont je conteste à la fois l’ampleur, le rythme et plus que tout l’équité.

Les digues de solidarité que nous entretenons au quotidien à grand peine, malgré tous les aléas et obstacles placés sur notre route afin de maintenir un minimum de cohésion sociale là où c’est le plus difficile et où les communes sont trop souvent le dernier acteur public présent et actif ( « S’il n’en reste qu’un ! ») risquent de lâcher d’un coup. Ce qui serait terrible pour des habitants se considérant déjà délaissés devenant du coup encore plus «invisibles» ! Les conséquences en seront dramatiques pour des territoires délaissés dans lesquels vivent de plus en plus de familles fragilisées. Contexte que les lecteurs de ce blog connaissent ayant fait l’objet à de maintes reprises de billets consacrés à la fracture territoriale ou à la « France périphérique » (rappel de ces notes à la fin).

 Pour planter le décor, rien ne vaut le réel. Aussi, avant d’explorer des perspectives d’ordre plus général et de faire des propositions concrètes (il y en a !), voici la situation d’une commune parmi d’autres, évoquée de manière synthétique mais dynamique, car un budget est avant tout une dynamique !

Ville dont je connais assez bien les caractéristiques cependant puisque c’est celle dont je suis le Maire, Trilport. 

 

 

 

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Trilport est une ville seine et marnaise de 5 000 habitants,  « péri urbaine », située dans la grande couronne francilienne. Située entre Marne et Forêts et dotée d’une gare SNCF, elle bénéficie d’un magnifique patrimoine naturel, assez unique.

La ville doit, afin d’être en conformité avec la loi SRU, se développer et construire de nombreux logements sociaux, ce qui nécessitera la mise en place de structures et d’équipements, en nombre et qualité. Son endettement, malgré une politique d’équipement très active ces dernières années, reste mesuré, inférieur à la moyenne nationale.

Trilport : (717 € / habitant), 
Moyenne nationale des villes de 3500 à 5000 : 800 €, de 5000 à 10 000 habitants : 881 € 

 

Un problème de recettes, comme tant d’autres communes …

La ville a un talon d’Achille, ses recettes, deux raisons principales : le passage à l’intercommunalité qui encaisse les recettes de zones d’activités dont la ville continue cependant d’acquitter les charges d’emprunt, et la faiblesse des dotations d’Etat, de très loin inférieures à la moyenne nationale. 

Trilport : 150 euros / Habitant (2013 : 736 739 €).
Moyenne nationale des villes de 3500 à 5000 : 192 € (soit – 28%), de 5000 à 10 000 habitants : 203 € (soit -35% ) 

Ces dotations représentent aujourd’hui 18% des recettes (4 115 760 €), 50% pour les impôts locaux alors qu’en 2004 (année à laquelle je suis devenu Maire) elles représentaient 22,5% (45% pour les impôts) !

Dotations, qui aux yeux de beaucoup d’élus reconduisent chaque année les inégalités entre français selon leur lieu de vie, ne tenant compte ni du contexte local, de la situation financière des communes au regard de ses recettes potentielles, ou des objectifs auxquels la collectivité doit répondre ! Faut il rappeler que ce sont les recettes qui déterminent la nature, la qualité et la diversité des services et équipements mis à disposition des habitants. « Dis moi combien tu gagnes et je te dirais combien tu dépenses » ! 

Pour faire simple, les villes abritant les sièges sociaux des entreprises ont les recettes, celles qui accueillant les familles des travailleurs les dépenses ; c’est binaire, schématique je vous l’accorde, mais cela se vérifie chaque année ! Situation qui cependant s’améliore depuis peu (2012) avec la création du Fonds de péréquation (FPIC), j’y reviendrais dans ma prochaine note, car tout n’est pas si clair !

 

Quid de la dépense publique ?

Le manque structurel de recettes de la commune est comblé en partie, grâce à une chasse aux subventions pro active et à un contrôle de gestion rigoureux de la dépense publique

Pour faire sens, depuis 15 ans nos dépenses (hors charges de personnel) n’ont augmenté que de 4,3 % (euros courants !) malgré l’inflation, le développement de la ville, l’arrivée de nouveaux habitants, une politique d’équipement ambitieuse et la mise en place de nouveaux services municipaux dont ceux de la jeunesse, de la Petite Enfance ou de la Police Municipale. Maire depuis 2004, je sais de quoi il en retourne.

Autre illustration, nos dépenses de fonctionnement 2013 sont inférieures à celles de 2012 ! Performance d’autant plus remarquable comparée aux services proposés aux habitants ! 

A Trilport la dépense par habitant s’élève à 818 euros.
Moyenne nationale des villes de 3500 à 5000 : 851 €, de 5000 à 10 000 habitants : 1 015 € 

La baisse des dotations cette année atteint 30 000 € (4% des dotations) et pourrait s’élever d’ici 2017, 200 000 voir 300 000 euros (hypothèse basse ou haute) ! La commune devra faire face à l’augmentation du prix de l’énergie, l’inflation et à de nouvelles dépenses telles la mise en place des rythmes scolaires, estimée à 170 euros par enfant (pour le budget 80 000 euros / an), dont seulement 40 000 € sont pour l’instant compensés par la CAF et l’Etat et rien ne garantit la pérennité du fonds d’amorçage.

 

Quelles perspectives attendre ?

Je suis persuadé que les baisses de dotations prévues ne pourront être menées à terme sans conséquences dramatiques pour les français vivant dans les collectivités les moins riches, à moins d’une véritable catastrophe sociale qui est une perspective intolérable dans une république qui se doit de considérer l’équité comme valeur fondamentale. Il n’est pas acceptable que la discrimination entre citoyens selon leur lieu d’habitation s’élargisse à un tel point, la ligne de fracture est atteinte !
Faut il rappeler que  les petites villes qu’elles soient rurales ou péri urbaines, ne disposent pas des structures ou dispositifs correcteurs issus de la politique de la ville dont bénéficient et c’est une bonne chose, les « grandes villes » dotées de quartiers sensibles ! Elles connaissent pourtant les mêmes difficultés et accueillent de plus en plus de familles en difficulté, toutes les dernières études et enquêtes l’attestent !

Il serait utile que les « sages » de la Cour des Comptes ou « experts » de Bercy, si prompt à semer le discrédit ou à jeter l’opprobre sur la gestion des élus locaux, arrêtent de généraliser et se limitent à commenter les conséquences, mais se penchent enfin sur les causes, dont celui du manque d’équité notamment des dotations (principalement la DGF) de l’Etat ! Ces dernières devraient tenir compte de la vie d’aujourd’hui, non des rentes de situation d’hier et surtout être plus équitable qu’égalitaire !
Est il normal, par exemple, que pour la mise en place des rythmes scolaires, les communes les plus riches, sans problème de ressources et de financement, bénéficient du même montant d’aide de l’Etat que celles ne disposant que de très peu de moyens pour assurer cette mise en place ?

J’ai une conviction forte. Le scénario initial de baisse prévu par le gouvernement ne pourra tenir sans casse sociale et territoriale,  tant au niveau de l’ampleur, du rythme ou de la répartition de l’effort exigé.Il risque de mettre à mal la cohésion sociale du pays à laquelle nous sommes tous attachés. J’ai également une autre conviction, les collectivités ne peuvent s’exonérer d’un effort sérieux sur la dépense publique qui doit diminuer significativement que ce soit sur le court, le moyen et le long terme, il en va de l’intérêt supérieur du pays. Nous devons passer d’une culture de l’égalité formelle et théorique, à une culture de l’équité concrète.

Heureusement des pistes de réponse crédibles et concrètes existent, encore faut il avoir la volonté de les mettre en place, elles feront l’objet de la prochaine note …

 

 

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De la boite à coucou à la boite de Pandore

boite a coucous.jpgJe prie mes fidèles lecteurs d’excuser un coup de gueule très inhabituel sur ce blog, il fait suite au coup de blues et de massue de ces derniers jours, mais en guise d’excuse, j’avancerais qu’il est parfois thérapeutique de lâcher quelques décibels, histoire d’évacuer …

Il serait bon que chacun reprenne ses esprits, que les ambitions individuelles, des uns et des autres, s’effacent devant l’intérêt supérieur du pays, que les responsables atteint « d’autisme », bunkerisés dans les certitudes de leur tour d’ivoire (petites ou grandes) se (re)connectent avec la France du quotidien et du concret, sinon les prochains lendemains risquent  d’être sanglants pour les couleurs et  « valeurs » que nous portons ! La responsabilité de cette catastrophe «industrielle» sera  alors collective et partagée.

Petit élu local, je mesure le fossé qui s’élargit et nous sépare de plus en plus de nos concitoyens. Nous ne sommes plus loin de l’implosion (entre nous) et de la fracture (avec les français) ce qui est beaucoup plus préoccupant.
Contrairement à ce que beaucoup de mes camarades déclament sous tous les modes, ce n’est pas le fossé entre partisans de « l’Offre » et ceux de « la Demande », ou de « la rigueur » (sérieux, austérité…) et de « la relance », qui exaspèrent nos concitoyens, mais tout simplement le manque de crédibilité qui émane de l’offre des partis politiques, dont le PS que ses portes voix soit frondeurs ou non pour être clair, et la capacité de ces partis à résoudre les problèmes du pays et des français : emploi, dette, croissance, et surtout solidarités qu’elles soient sociales ou territoriales…

Intuitivement les français savent qu’il faut à la fois relancer l’emploi et l’économie et agir sur la dette, pressentent les conséquentes dramatiques qu’une simple augmentation des taux auraient sur le budget du pays. Chacun sait que la ligne de crête est étroite et que le vent souffle haut et fort, surtout à cette altitude, alors autant préserver l’esprit de cordée indispensable pour éviter tout dévissage !
Si le chaos ambiant qui règne depuis des mois se poursuit, il y a fort à parier que le PS devienne la tête de gondole des partis à jeter et rejeter pour quelques années ! Un paradoxe alors que c’est à lui de réparer les dégâts des gouvernements précédents, ce que les français auront oublié. Nous avons portant déjà donné il y a quelques mois lors des municipales et des européennes …

Nous ne sommes pas élus pour nos chamailler sur des postures pré congrés, régler des comptes qui n’en sont pas, mais pour résoudre collectivement les problèmes des français et changer leur vie au quotidien, pour l’améliorer, cela va de soi !

Quelle solution  restera t’il alors au pays, si un tel « bordel ambiant » se poursuit ?

 

 

 

 

Je rage de voir tant de gâchis, alors que tant de français doutent de l’avenir et souffrent au quotidien, sans perspective aucune ! Nous devons absolument nous ressaisir, renouer avec nos fondamentaux, retrouver le sens du collectif, porter un projet commun de nouveau partagé, sans calcul de carrière préalable, d’arrière pensées politiciennes d’arrière garde ou de positionnement tactique pré congrés.

Rappelons que la destinée des uns et des autres dépend du succès ou de l’échec des trois prochaines années.  ?Prenons un peu de hauteur, vu le niveau et la qualité des débats, des tweets et des petites phrases nous avons de la marge avant de risquer le vertige !
Pour aller vers un idéal qu’il nous faut redéfinir,  nous n’avons plus de projet concret bâti sur le monde d’aujourd’hui depuis belle lurette, encore faut il pour cela comprendre le réel.
Cela ne vous rappelle personne ? Pourtant beaucoup l’ont cité avec emphase il y a quelques mois et surtout accommoder à toutes les sauces  !

Quelles sont nos positions, simples, claires, audibles, crédibles, face aux révolutions en cours ? Excusez du peu tant elle se bousculent au portillon : omniprésence d’internet, mondialisation, crises régionales multiples, développement du terrorisme, multi culturalisme, multiplication des catastrophes naturelles, bio éthique, nécessité de bâtir une Europe qui tienne enfin la route, et surtout plus que tout, adaptation au changement climatique et aux décisions que le réchauffement implique ?
Cherchez l’erreur ? J’aurais plutôt tendance à penser qu’il nous faut surtout changer de focale, arrêter de nous regarder le nombril ou de sombrer dans l’hystérie collective, et rechercher le cap à suivre !

Encore faudrait il renouer avec le brin de sérénité qui nous manque tant aujourd’hui, tempérer un peu ses propos dans des médias qui font plus fonction de chambre à distorsion que de chambre d’écho. Cessons de nous chamailler sur les points de détails, les logorées sémantiques, les postures sans fin, histoire d’avoir le sentiment illusoire d’exister médiatiquement quelques minutes notamment sur les chaines de la TNT (« 15 minutes of fame »).
Manifestement Warhol n’est pas tout à fait mort ! En oubliant jamais que tout ce qui est excessif et insignifiant.
Je vous en conjure camarades, arrêter les petites phrases (c’est pas moi, c’est l’autre), brandissez moins de certitude ! Ressentir doute et humilite est à mes yeux plus une qualité qu’un défaut ! Se poser les bonnes questions est préférable à apporter de mauvaises réponses ! A croire que l’histoire ne nous apprend rien …

Seuls, nous ne représentons pas grand chose, ou si peu, ?alors arrêtons de donner des leçons à la planète entière, un peu d’humilité et de relativisme ne fera de mal à personne, et surtout de la parole passons enfin aux actes concrets,car  pour être universel, mieux vaut le dialogue que le monologue.

Il serait bon pour le pays, que nous soyons enfin à la hauteur de la responsabilité politique historique que nous portons. Nous n’avons qu’une seule issue, réussir l’alternance de gauche que nous représentons (Manuel, Benoit, Arnaud sont de gauche comme beaucoup d’autres, arrêtons le délire, et la machine à excommunier style Mélenchon).
Pour ce faire que les uns et les autres se branchent de nouveau sur le monde réel, et au plus vite ! Je peux leur en faire visiter un bout, s’ils le souhaitent ou sont en manque, mais plus que tout, qu’ils laissent oukases, certitudes et égos au vestiaire, afin de se fondre dans l’œuvre collective.

Sinon, j’ai bien peur que nous soyons plus proche de la boite à baffes que de la boite à coucou des guignols, même si le ridicule ne tue pas …

Autant de boîtes qui me font penser à celle plus funeste de Pandore que nous venons d’entrouvrir ces derniers jours !

Spéciale dédicace amicale à Philippe T, et à tous les élus de proximité qui chaque jour mouillent la chemise en première ligne, loin des sunlights …  

 

Les territoires 3.0 : Mobilis in mobile

carte SNCF.jpgNous sommes les héritiers d’une société en voie de disparition dont les repères sont pourtant toujours gravés dans nos gènes, tant ils étaient immuables jusque là. Mondialisation, crises successives,  multiplication des échanges avec les pays émergents, omniprésence d’internet, autant de révolutions qui ont tout bouleversé.
La terre est redevenue « plate », pour reprendre le titre d’un célèbre livre (Friedman) d’il y a quelques années, un nouveau monde émerge et bouscule ce faisant les schémas traditionnels d’une société pyramidale, verticale, quelque peu immobile …

Devant une telle mutation, quelle place, dans ce qui n’est jusque là qu’un débat technique sur l’organisationnel, doit on réserver à l’homme, afin de lutter contre les menaces que sont la ghettoïsation, le repli identitaire, le communautarisme, le délitement de la vie démocratique, l’absence de débat de fond,  la montée du consumérisme et de l’individualisme ?
Car il y a problème ! Nous appartenions jusque là à des « communautés » uniques, bien cloisonnées, délimitées par des repères identifiés, mais aujourd’hui nos appartenances sont multiples, de quoi avoir le tournis ou le vertige tant la société est fracturée, éclatée et de plus en plus déshumanisée.

La question identitaire se pose, elle est centrale. Encore faut il rappeler que l’identité se construit autour d’une dynamique, véritable trajectoire entre un point de départ et une destination : le cap à atteindre. Ne la réduire qu’à nos seules racines mène à une impasse, vide de sens, et source de conflits sans fin, car l’identité se construit au fil du temps et des évènements.
C’est toute la problématique actuelle : sans cap à atteindre comment bâtir un « vivre ensemble » commun que l’on soit en capacité de partager ? S’il est bon de savoir d’où l’on vient, il est essentiel de savoir où l’on va …

En 2012, une équipe de géographes a étudié pour la Datar «les systèmes urbains français», explorant les différentes configurations susceptibles de faire évoluer  politiques d’aménagement et gouvernances. Hypothèse retenue : pour appréhender fonctionnement et dynamique territoriale intégrer l’étude des «liens» comptent autant que les périmètres des pôles. Suite à leurs travaux une nouvelle représentation des territoires est apparue, permettant de « visualiser » les dynamiques animant nos territoires, l’incidence des différents espaces temps qui cadencent nos vies, ou simplement le degré d’urbanisation du pays.
Au delà de ses paysages ruraux la France est devenu un archipel d’aires urbaines, tant les usages et besoins des habitants, exprimés ou ressentis, sont exclusivement urbains.
Mais comment représenter des bassins de vie évolutifs par essence, qui s’affranchissent allègrement des «frontières» administratives traditionnelles ? La réponse traditionnelle jusque là est celle de conteneurs successifs, véritables poupées russes s’emboitant les unes aux autres, dois je souligner que la réforme territoriale proposée aujourd’hui conforte ce vieux schéma, agrandissant seulement les périmètres (seuil des 200 000 ou des 20 000 habitants actuellement brandis par la technostructure), ce qui ne répond pas forcement à la problématique et menace à terme d’éloigner le citoyen du projet commun, j’y reviendrais.

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Les territoires à l’heure du big bang

photo 3-1.JPGLa Terre tourne, de plus en plus vite et subit une véritable «accélération dans l’accélération» ! Le sémaphore de Claude Chappe de la France révolutionnaire de 1789 a disparu depuis belle lurette, remplacé par internet ou la 4G et les chevaux qui délimitaient autrefois les périmètres des départements révolutionnaires regardent désormais passer des voitures électriques.
Cette « nouvelle donne » n’est plus un scoop pour nos concitoyens depuis un bail, tant ils sont conscients de vivre une période charnière. Jamais le monde n’avait évolué aussi vite : mondialisation, développement des pays émergents, omniprésence d’internet, urgence écologique… Un véritable « changement de temps et d’espace » pour reprendre l’expression chère à Léonard de Vinci !

Face à ce bouleversement, redéfinir l’organisation politique et administrative du pays a incontestablement du sens; et si depuis de nombreuses années beaucoup estiment prioritaire d’engager une mutation, reconnaissons que seul Deferre l’a initié, mais c’était en 1982, une autre époque déjà …
Pourtant la France se transforme en profondeur, implicitement sans le reconnaitre, du coup elle développe lourdeurs, paradoxes ou fractures, loin de représentations désormais désuètes. La modernisation initiée par François Hollande amorce un  mouvement de fond, dans lequel certains principes doivent cependant prévaloir : efficacité, démocratie, et surtout équité sociale, tant la fracture territoriale est aujourd’hui cruellement présente !
L’organisation territoriale doit être l’outil (et non constituer l’objectif) qui permet l’épanouissement des habitants, qui sont, où qu’ils vivent, des citoyens à part entière de la république !

Le but de la réforme initiée ne doit pas être de réaliser des économies à court terme mais bien d’apporter au pays plus d’agilité, de fluidité, et de solidarité afin de le placer en capacité de répondre aux enjeux d’aujourd’hui et de demain et de donner la faculté à ses habitants de s’y épanouir.
Aussi, il convient tout en maintenant un rythme soutenu, sans confondre vitesse et précipitation pour autant, de mener cette mutation en cohérence en veillant à renforcer la cohésion sociale du pays, de plus en plus abimée aujourd’hui. La clé de voute d’une telle réforme ne peut être le périmètre, j’y reviendrais, mais bien les moyens, compétences et capacité d’action affectés aux différents acteurs territoriaux.

Une nouvelle carte politique se dessine peu à peu, insidieusement, accentuant la fracture croissante entre les métropoles et une France «périphérique» de plus en plus déclassée et mise à l’écart. Phénomène amplifié par la raréfaction de l’argent public et la dégradation des ressources des communes, notamment des moins riches, du fait de baisses de dotations qui les atteint plus que les autres; elles sont pourtant positionnées   en première ligne afin d’amortir les effets de la crise et de constituer les digues de solidarité indispensables à la cohésion du pays, digues qui menacent aujourd’hui de rompre à tout moment …

La vision traditionnelle d’une organisation territoriale pyramidale, monolithique et identique partout dans le  pays, repose sur une vision étriquée et réductrice de la république, faussement égalitaire qui sanctuaires de fait des périmètres souvent dépassés; périmètres défendus bec et ongles par des barons locaux dotés d’une vision patrimoniale  « statique » qui montre cruellement ses limites aujourd’hui !
Cette vision est mise en brèche par une nouvelle approche pro-active, basée sur les flux (personnes, intellectuels et culturels, économiques et financiers … ), et une analyse systémique se nourrissant des complémentarités, liens et synergies qui tissent le pays. Un territoire est avant tout une dynamique.

L’Etat n’est plus le  «maître des horloges» d’antan, vestige d’une conception mécaniste de la société désormais dépassée, mais doit trouver un second souffle afin d’apporter à l’éco système territorial les moyens et la capacité de maintenir son « homéostasie ». La société de l’information et les mobilités dans laquelle nous vivons désormais est proche d’une organisation neuronale (voir cognitive).
Si notre République est une et indivisible, la France est avant tout  terre de contrastes, ce qui nécessite une approche différenciée tenant compte de ses spécificités comme de l’espace temps : structures, moyens alloués, nécessité de maintenir des collectivités intermédiaires (conseils départementaux) afin de maintenir la cohésion indispensable des territoires les plus fragilisés.
Si l’on y prend garde, le sentiment de déclassement risque fort de se développer dans les territoires qui souffrent le plus durement aujourd’hui, avec à la clé de multiples conséquences, pour certaines exprimées lors des derniers scrutins, car  «Eloignés du peuple, le peuple s’éloignera d’eux» (Edgar Morin) …

Autant dire que la réussite « sociale » du big bang territorial est cruciale.

Alors quelle est la structure territoriale à privilégier ? région, département, intercommunauté, commune ?

 

 

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Un « archipel d’appartenances » 

La nouvelle carte des régions et le scénario de la disparition éventuelle des départements suscitent beaucoup de réactions enflammés (enfin, surtout des élus, pour les autres …) notamment sur les notions d’appartenance ou d’identité territoriale. Sommes nous plutôt département ou région ?
Petit rappel historique …

Issu de la Révolution française, le département répondait à un objectif politique : remplacer les anciennes provinces royales par une organisation territoriale maillant le pays et basée sur une logique militaire. Certaines provinces françaises étaient alors en sécession. C’est pourquoi chaque département s’est constitué autour d’une « ville garnison » permettant aux armées de la République d’intervenir si nécessaire en cas de trouble.
Depuis 1790, il faut reconnaitre que la greffe identitaire a prise, le département constitue pour les français un repère territorial authentique, unique échelon de référence pendant très longtemps des politiques publiques de proximité conduites par les Préfets. Sa création a marqué jusqu’à récemment la victoire des jacobins sur les girondins, partisans d’une organisation décentralisée du pays .

Les régions ne sont apparues (et encore au niveau administratif) qu’en 1956, le plus souvent dotées de périmètres artificiels, sans doute pour éviter tout excès autonomiste ! Avec des limites le plus souvent sans légitimité qu’elle soit historique ou culturelle. Des régions bien plus petites que leurs homologues allemandes ou espagnoles, au propre (périmètre) comme au figuré (compétences et capacité d’action). Elles ne jouent un rôle politique que depuis les élections régionales de 1986, leur poids stratégique en matière d’aménagement du territoire, de mobilités et de développement économique s’est considérablement renforcée depuis !
Le but de la réforme est de les adapter au « format européen » afin que de nains, elles deviennent des acteurs à part entière !

 

La délicate question de la méthode

La méthode utilisée par François Hollande a suscité beaucoup de critiques, de tous bords, en premier lieu de « grands élus » socialistes. Chacun sait que réformer le pays est périlleux, notamment lorsque la situation budgétaire est difficile, pour ne pas dire critique, et que l’on touche à certains pré carrés, ou « zones d’influence ». Chaque morceau du puzzle France déplacé réveille brusquement l’idée de frontières, de  patrimoine et devient alors source de conflit avec les élus locaux.
Permettez moi d’évoquer un souvenir personnel. En 2012, Marylise Lebranchu, nouvelle Ministre d’Etat en charge des lois de décentralisation vient nous présenter sa feuille de route, cinq responsables (tous PS) des principales associations d’élus (régions, départements, métropoles, grandes villes ou petites villes) l’ont alors entouré, chacun défendant une conception de l’organisation territoriale dans laquelle sa collectivité avait une place de choix. Autant dire que devant tant de visions différentes, la tâche de la Ministre n’était pas simple !
Moralité, rien n’a bougé … Depuis deux ans, un blocage complet, qu’il convient de dénoncer.

Débuter ce big bang territorial en plaçant de « vraies » régions au centre du jeu me semble cohérent et adapté aux exigences de la situation, du moment et des enjeux ! Cette méthode présente l’avantage d’être techniquement et politiquement moins contraignante, n’entrainant ni démembrement, ni redécoupage des départements et respectant à peu de choses prés les prochaines échéances électorales.
Pourtant la nouvelle carte adoptée a causé la colère de nombreux « barons locaux », principalement de gauche, et a donné lieu à des débats passionnés entre « pour » et « antis », développant les uns comme les autres, des arguments bien évidemment « de fond » : économiques, culturels, historiques, géographiques ou encore politiques !
Permettez moi de ne pas me positionner sur la question des périmètres, là n’est pas selon moi, le nœud du problème, d’autant qu’ils évolueront encore jusqu’en 2016. La question centrale demeure celle des compétences et des capacités d’action (moyens) attribuées aux différentes collectivités.

Limiter de facto l’intérêt supérieur du pays aux seules métropoles, régions et intercommunalités ne me semble pas adapté, tant la France est aujourd’hui faiblement métropolisé, ce qui constitue sans doute une bizarrerie, mais peut devenir paradoxalement un atout, j’y reviendrais.
Rappelons que sur les dix dernières années, la croissance de la population urbaine a été de 5 %, contre 9,5% pour celle des campagnes, du fait du développement considérable du secteur péri urbain. Il n’y a donc pas de modèle territorial absolu, les logiques diffèrant selon les contextes locaux.

 

Un impératif absolu : développer la solidarité sociale et territoriale

Le contraste est frappant entre les métropoles, vitrines d’une mondialisation assumée (40% de Français y vivent et génèrent plus de 60% de la richesse nationale) et les autres territoires (cf Davezies et Giully) dont certains, économiquement et socialement « à la ramasse ».

Vouloir organiser la France uniquement autour de ses métropoles correspond à une demande de la technostructure,  une vision « macro » qui risque de renforcer non seulement le sentiment d’exclusion de beaucoup de nos concitoyens, tant le modèle métropolitain délaisse la France dite « périphérique », mais aussi de nous couper de futures pistes de croissance prometteuses (matériaux bio sourcés (bois, chanvre, lin …), économie circulaire, agro alimentaire, circuits courts… ) dans lesquelles la France dispose de sérieux et nombreux atouts potentiels.

Si pour les zones métropolitaines, la présence du département ne semble plus utile, pour les secteurs ruraux et péri urbains il en est différemment, le fait intercommunal n’étant pas assez présent ou développé pour que la structure intercommunale soit en capacité de prendre concrètement le relais,notamment dans des domaines aussi sensibles que ceux de la protection sociale, de la petite enfance, de la vieillesse, de l’ingénierie, des mobilités ou des infrastructures (routes,  développement numérique…), il apparait indispensable de maintenir alors, une structure intermédiaire.
Tel est le cas selon moi, j’assume cette figure de style, en Ile de France, du « département de Seine et Marne » qui devrait avoir la capacité d’exister encore quelques années, tant il a un rôle important pour accompagner « positivement » le développement de la métropole de Paris sans transformer notre territoire, porteur de vraies potentialités, en simple exutoire chargé des réserves foncières, des décharges publiques et autres « équipements structurants » du même acabit.

Pour que le big bang territorial initié développe une France plus agile, fluide, efficace, mais aussi solidaire, il faut nous affranchir d’une vision trop « macro », mécaniste, quelque peu simpliste (logique de seuils), réductrice et monolithique, en provenance directe de la capitale, finalement très jacobine, et assurer à l’Etat les moyens comme la logistique lui permettant de conduire les nécessaires régulations et inter relations sur le territoire afin d’être un garant actif de l’équité sociale pour tous les citoyens de la république, quelque soit leur lieu de résidence.

Pas à dire, nous avons du pain sur la planche, d’autant que l’ère des Territoires 3.0 approche,  ce sera l’objet de la prochaine note  …

 

 

Télécentre Nomade Office : Bienvenue à « Fab Land »

telecentre-mini-1.jpgLe télécentre de Nomade Office inauguré lundi dernier à Trilport, est un équipement novateur à plus d’un titre, mais avant de présenter plus en détail cette réalisation, je veux saluer la remarquable aventure humaine qui a accompagné sa création.

Le soutien des collectivités a été déterminant, rien n’aurait été possible sans l’engagement financier de la Région et du Département dont il faut saluer le sens de l’anticipation, ou  encore le rôle d’assembleur joué par  la ville de Trilport, mais il faut surtout rendre hommage à l’équipe qui anime et « habite » ces lieux, et depuis de nombreux mois poursuit une véritable chimère, Graal quasi inaccessible : ouvrir le premier télécentre péri urbain d’Ile de France, sous la forme d’une entreprise de l’Economie Sociale et Solidaire !

Le collectif piloté par Cathy Veil a franchit tous les obstacles semés sur sa route, les uns après les autres,  véritable chemin de croix qui en aurait décourager plus d’un. Les embuches rencontrées étaient de tout ordre : financières, juridiques, administratives, techniques enfin, n’ont pourtant pas empêché cette ouverture, elle l’ont simplement retardé de quelque mois. Ils ont démontré que l’esprit d’équipe et celui d’entreprise peuvent renverser des montagnes, avec Nomade Office nous sommes déjà dans l’ère de l’économie agile, collaborative mais aussi déterminée.


Le jour d‘une inauguration tout à l’air simple, même si depuis Léonard de Vinci nous savons que la simplicité est une « sophistication suprême » qui cache le plus souvent une grande complexité et la présence d’une chaine d’acteurs multiples, dans laquelle chaque maillon est essentiel, les propriétaires de cet immeuble de bureaux y compris. Il faut saluer la confiance qu’ils ont toujours manifesté pour ce beau projet, un équipement unique, qui constitue un véritable condensé de l’intelligence collective de ce territoire auquel nous sommes si attachés.

La fibre optique est un lien de lumière, un trait d’union, un réel coefficient multiplicateur dont personne ne nie la puissance potentielle, mais elle ne constitue qu’un élément de ce télécentre, au même titre que le chanvre cultivé ici et transformé à quelques kilomètres, le bois local, le design, et surtout l’intelligence collective qui habite ces lieux, qu’elle soit portée sur les usages numériques, l’architecture, nous sommes devant un aménagement intérieur d’une efficacité énergétique exemplaire, en bio sourcé local s’il vous plait, ou communicante. Une communication authentique, fraiche, innovante, décalée et surtout porteuse de sens et de signifiant.

Si ce télécentre est unique par bien des aspects, il le doit avant tout à son collectif, la créativité est présente dans chaque maillon d’une chaine aux talents multiples qui a su apporté une touche véritable d’humanité, tant cet espace cumule les avantages du domicile et du bureau :  lieu convivial, humain, chaleureux, « cocoon » associé à une atmosphère et des services très professionnels…

Nous sommes en présence d’un véritable démonstrateur de ce que peut apporter aujourd’hui cette terre de Brie à l’Ile de France en innovation et valeur ajoutée …

Quels enjeux pour notre territoire ?

 

 

 

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Aujourd’hui, aucun élu ne peut imaginer le développement et l’épanouissement de son territoire sans accès aux usages numériques, tant le numérique est un robinet qui amène la vie y compris dans les déserts territoriaux les plus reculés.

Il faut saluer la vision de politiques comme Jean Paul Huchon et Jean Paul Planchou pour l’Ile de France,  Vincent Eblé, Gérard Eude et Bertrand Caparroy pour la Seine et Marne, qui avec volontarisme, détermination, complémentarité, ont agit ensemble pour lutter concrètement contre les fractures sociale, territoriale et numérique qui frappent notre territoire.
Jusque là signe extérieur de richesse de quelques grandes villes privilégiées, avantage concurrentiel et résidentiel déterminant réservé à leurs seuls habitants ou entreprises, l’économie numérique a pris la clé des champs pour arriver  jusqu’à Trilport, petite ville très représentative des difficultés croissantes que subisssent le monde péri urbain.
C’est un véritable défi social, économique, culturel mais aussi sociétal que l’ouverture de ce télécentre nous appelle à relever, mais pour beaucoup d’entre nous, il n’y a pas de fatalité, mais des opportunités à saisir ou à construire.

L’émergence de «tiers lieux », comme les Télécentres, est un marqueur de la mutation culturelle, sociale et économique en cours qui bouscule et bouleverse notre société,  révolution dont nos territoires ne seraient être absents ; tant ils leur faut surfer sur ce «Tsunami numérique » pour tout simplement exister, aujourd’hui, et encore plus demain.
La révolution numérique provoque une «accélération dans l’accélération » qui rend caduque beaucoup des schémas traditionnels qui ont rythmé la vie de nos sociétés depuis des siècles, basés sur le concept d’unité de temps et de lieu.
Nous sommes entrés dans une nouvelle dimension, marquée par le nomadisme croissant qui caractérise nos modes de vie actuels, mais aussi un autre phénomène,  plus bouleversant, l’ubiquité numérique ! Le citoyen d’aujourd’hui a la capacité d’être présent dans plusieurs lieux au même moment !

Le développement du travail à distance est un enjeu global, qui participe tout autant à l’aménagement d’un territoire plus durable, contribue à diminuer les émissions de gaz à effets de serre, donne la capacité à des salariés de travailler hors les murs de leur entreprise, et sous certaines conditions de mieux concilier vie privée et professionnelle, en réduisant stress et temps perdu dans les transports.
Encore faut il séparer vie privée ou professionnelle afin d’éviter tout effet d’aliénation ! Les  télécentres sont des réponses adaptées permettant de préserver intimité, de produire du lien social, de mutualiser des ressources, de favoriser créativité, synergie, innovation et intelligence collective afin d’aboutir à une «fertilisation croisée».
Et que dire des temps et des conditions de transport, notamment aux heures de pointe ! Beaucoup de Trilportais y consacrent en moyenne prés de trois heures par jour. Le simple fait de diminuer de 3% la fréquentation des gares franciliennes lors de certains créneaux horaires, du matin et du soir, ferait économiser à la collectivité des millions d’euros. Ce n’est pas le Syndicat des Transports d’Ile de France qui me démentirait

Il est à la fois singulier, encourageant et symbolique que cette inauguration se déroule sur ce site appelé à devenir l’un des équipements structurants de l’éco quartier de Trilport, l’Ancre de lune.
L’intérêt pour notre ville, mais plus globalement le territoire, est évident : développer l’attractivité résidentielle et économique de Trilport, promouvoir un nouveau modèle de développement, économe en ressource et en émissions de CO², créer les emplois de demain reposant en partie sur l’intelligence collective que nous serons en capacité de produire, mais aussi améliorer la qualité de vie quotidienne des habitants comme l’efficacité des entreprises locales, notamment les plus petites.
C’est l’esprit de la ville durable dont l’éco quartier de l’Ancre de lune et ce Télécentre, notamment par ces partis pris environnementaux très novateurs et disruptifs, les matériaux bio sourcés et les circuits courts ont été privilégie, constituent une vitrine.

Encore faut il, qu’il fonctionne durablement et que cette initiative remarquable soit viable économiquement. C’est  la responsabilité de chacun, de chaque acteur du territoire (collectivités, entreprises, particuliers, Etat …) et pour cela, passage obligé, il est indispensable  que d’autres Télécentres poussent, comme autant de graines d’avenir et de développement raisonné, afin de constituer un réseau structuré et labellisé maillant nos territoires … Dans le numérique, aujourd’hui plus qu’hier deux maitres mots s’imposent : convergence et interopérabilité.

Si les télécentres représentent un « changement de temps et d’espace » comme l’aurait écrit Léonard De Vinci, celui de Trilport conçu et créé par Nomade Office, est porteur indiscutablement de l’ADN de cette terre de Brie, et surtout de ses potentialités.

Certains aujourd’hui parlent de « Fab Labs », concernant le télécentre de Trilport je parlerais plutôt  de «Fab Land», tant ce territoire est riche en talents et en promesses d’avenir …

 

 

Précédents billets consacrés au phénomène des Télécentres

Télécentre, le monde du réel est proche

Les télétravailleurs rêvent ils de télécentres « ubiques »

Les télécentres émergent de l’horizon