Vous avez dit « tiers lieux » ?

Cet interview réalisé il y a trois ans,  illustre tout le potentiel pour nos territoires de telles structures, ainsi que la fragilité d’un modèle économique encore non mature qui a amené le télécentre de Trilport a fermé ses portes depuis. Un retour d’expérience  qui illustre tout l’intérêt de la mission animée par Patrick Levy-Waitz.  

Julien de Normandie, Secrétaire d’État auprès du Ministre de la Cohésion des territoires, avait confié à Patrick Levy-Waitz, président de la Fondation « Travailler Autrement » une mission autour des « Tiers Lieux » avec un double objectif : établir un diagnostic sur l’utilité ou non de telles structures pour nos territoires, et si oui, de proposer un plan d’action destiné à les développer, notamment dans  les espaces péri urbain et rural.

Après six mois de visites, de rencontres et d’échanges avec les acteurs de terrain sur tout le territoire (animateurs des tiers-lieux, collectivités locales, élus, acteurs économiques et sociaux …), la mission a répertorié en France près de 1800 tiers lieux dont 46 % se situent en dehors des métropoles et vient de rendre son rapport au Ministre.
De ce travail en immersion dans les territoires, Patrick Levy Waitz a tiré quatre enseignements majeurs :

  • L’émergence de ces tiers-lieux, loin d’être marginal, s’inscrit dans un mouvement de fond qui touche l’ensemble du territoire ;
  • Ces tiers-lieux sont localement porteurs de dynamiques économique et sociale très structurantes ;
  • L’essor de ces lieux préfigure celui des nouvelles manières de travailler (télétravail, travailleurs indépendants) ;
  • Enfin, en contribuant à développer des activités de proximité et à encourager les circuits courts, ces lieux sont des acteurs essentiels de la transition numérique et écologique dans les territoires.

Je suis ravi en qualité de référent numérique de l’Association des Petites Villes de France (APVF) d’avoir participé à cette réflexion collaborative pour laquelle nous avons réalisé une contribution.
Comme Patrick Levy Waitz nous pensons effectivement que les Tiers Lieux constituent  non seulement une opportunité pour nos collectivités et un outil utile pour combattre concrètement les fractures territoriales, mais qu’ils constituent potentiellement de véritables Carrefours des Possibles …
Nous soutenons cette initiative tant elle contribue à semer  des graines d’espoir dans des territoires qui trop souvent en manquent terriblement.

Pour télécharger le rapport 

Notes précédentes sur le sujet

La problématique des tiers lieux avaient déjà donné lieu à trois notes d’Entre Marne & Forêts.

Télécentre, le monde du réel est proche

Les télécentres émergent de l’horizon

Les télétravailleurs rêvent ils de télés centres « ubiques » 

« Objectif fibre » nous rend visite

objectif-fibre.jpgDans le cadre du lancement de son dernier guide dédié au raccordement des maisons individuelles neuves au réseau en fibre optique, Objectif fibre a organisé une visite de terrain à Trilport dans un ensemble pavillonnaire de logements sociaux pré-équipé réalisé par les Foyers de Seine-et-Marne (FSM), le bailleur de par la ville.

Saluons le travail de standardisation effectué par la plate forme interprofessionnelle qu’est « Objectif Fibre » et ce depuis sa création (2009). Elle fédére autour du déploiement généralisé de la fibre optique les acteurs privés et publics emblématiques de plusieurs filières qui ont enfin décidé de jouer collectif.   Le guide présenté aujourd’hui est la meilleure illustration de cet « esprit d’équipe », il vise à garantir la qualité, la pérennité et la conformité des réseaux déployés, notamment dans les territoires les moins denses.

Force est de constater que la fibre était jusque là, un signe extérieur de richesse des grandes villes, avantage concurrentiel et résidentiel réservé à leurs seuls habitants. Une situation intolérable dans une République dont l’égalité est une valeur clé et la citoyenneté de plus en plus numérique.
La manifestation de ce jour démontre que la fibre a pris enfin la clé des champs et s’intéresse désormais au monde péri urbain et rural, ce dont le Maire que je suis ne peut que se féliciter. Trilport petite ville de 5000 habitants est représentative s’il en est, des spécificités de ces territoires péri urbains, voir ruraux, puisque composée de plus de 1 500 pavillons sur 2 200 logements !

La fibre est plus qu’un lien de lumière, elle constitue un véritable  trait d’union, entre tout un chacun et la planète. Les usagers qu’ils soient habitants ou acteurs économiques ne demandent que le minimum, presque rien : être connecté 365 jours sur 365, 24 heures sur 24 heures, en continu, avec un débit leur permettant de disposer de tous les services numériques, il en nait de nouveaux chaque jour.
Une simplicité apparente qui cache de fait une très grande complexité et l’intervention d’une chaine d’acteur multiple, dans laquelle chaque maillon est essentiel. C’est dire l’utilité d’un tel guide !

Lorsque l’on aborde le développement des usages numériques, deux maitres mots s’imposent à tous et partout : convergence et interopérabilité, car nous sommes en présence d’un véritable éco système qui s’affranchit des océans et des frontières.

Le déploiement de la fibre optique est pour le pays et le développement de ses territoires un enjeu stratégique essentiel et prioritaire qui démontre la formidable capacité de mobilisation, mais également d’innovation, de la France. Ce challenge hautement technologique engage à la fois son présent mais aussi la grande partie d’un devenir qui ne peut être que numérique, tant dans le déploiement des infra ou des superstructures, que dans celui des usages ou des objets connectés, domaines dans lesquels notre pays est aux avants postes.

Mais une telle manifestation signifie bien plus, tant pour notre commune que ce territoire  …

 

 

 

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Combler la fracture numérique

Aucun élu ne peut aujourd’hui envisager sérieusement le développement de son territoire et l’épanouissement de ses habitants, sans connexion au réseau à Très Haut débit. La fibre optique, est un robinet désormais essentiel et vital, porteur de vie et d’énergie qui permet de transformer des déserts territoriaux en terre d’espoir et de dynamisme.

La Seine et Marne constitue un vrai paradoxe. Si ce département francilien, situé à proximité de la ville capitale, a deux villes nouvelles connectées au Grand Paris, l’essentiel de ses communes sont durablement victimes de trois fractures : territoriale, sociale mais aussi numérique. Situation qui a amené le Conseil Général sous l’impulsion de Vincent Eblé et Bertrand Caparroy a agir avec efficacité et dynamisme dans le domaine numérique, par le déploiement d’un réseau de fibre optique sur l’ensemble du département (Réseau d’Initiative Publique), puis la création il y a quelques semaines d’un Syndicat Mixte d’Aménagement Numérique.

La ville de Trilport, du fait des limites techniques et physiques de l’ADSL, faisait jusque là partie des communes sinistrées au niveau numérique avec notamment une  éligibilité au 3Play absolument catastrophique. C’est dire que nous avons accueilli avec beaucoup d’enthousiasme la proposition de l’opérateur ORANGE de faire de la Communauté d’Agglomération du Pays de Meaux (CAPM), dont notre commune fait partie, dans le cadre du Programme National Très Haut Débit, une zone appel à manifestations d’intentions d’investissement (ou AMII). Dans ce cadre, l’opérateur historique s’engage à déployer sur l’ensemble des 18 communes de l’agglomération, sur ses fonds propres (avec la participation de SFR) un réseau FFTTH avec l’objectif d’équiper 100% du l’agglomération d’ici fin 2019.
le Président de la CAPM, Jean François Copé a confié le suivi de la convention avec Orange et l’élaboration du calendrier de déploiement, à la Commission Développement Numérique animée par Olivier Morin à laquelle je participe. Cette dernière a décidé d’accorder la priorité aux communes les plus mal desservies, dont Trilport au premier rang.
L’avancement actuel du déploiement engagé, qui a démarré en 2012, permettra, d’ici à la fin de l’année, selon les techniciens d’Orange, de rendre raccordable plus de 60% des logements, et d’ici décembre 2015, 100% de la commune, ce qui constitue une vraie opportunité d’autant qu’à priori les travaux avancent à bon rythme.

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Une visite de terrain symbolique à plus d’un titre
 
Il est singulier qu’Objectif fibre est choisi pour illustrer le lancement de son guide une opération de logements sociaux.
Ce programme constitué d’un petit collectif (8 logements) et de quatre pavillons, s’intègre dans un partenariat entre le bailleur social FSM et Orange. Il témoigne de l’intérêt d’une parfaite collaboration entre acteurs de l’immobilier et opérateurs pour faciliter le déploiement de la fibre optique. FSM a intégré, très en amont dans la réalisation de cet ensemble, le pré-équipement en fibre optique de chaque pièce des logements.
Le stade du FFTH est dépassé, la fibre irriguant non seulement le domicile mais chaque pièce !
Quelques mots sur la collaboration entre la ville et ce bailleur. Elle est basée sur des valeurs communes, dont l’innovation, mais surtout une approche qualitative  du logement social.
L’opération de la rue Aveline, sélectionnée par « Objectif fibre » est emblématique de notre partenariat, car bâti autour de la notion d’accessibilité, au sens global et transversal du mot :
  • Accessibilité résidentielle, avec la création de 12 locatifs sociaux,
  • Accessibilité multi générationnelle, un quart des logements livrés sont aménagés pour des personnes séniors dans le cadre de la mise en place du label Habitat Seniors Services
  • Accessibilité numérique enfin, avec le pré-équipement en fibre optique de chaque pièce
Cette réalisation modeste, 12 logements, est une réponse concrète aux fractures évoqués précédemment : sociale, territoriale et numérique mais aussi générationnelle …
La fibre contribue ainsi à rendre la ville mais aussi la vie chaque jour plus accessible au plus grand nombre, quelque soit sa situation.

Télécentre, le monde du réel est proche


visuelTL-300x234.jpgJ’ai participé début novembre à une conférence organisée par la Région Ile-de-France et son agence numérique « la Fonderie » consacrée aux Mutations du travail. L’émergence 
du travail à distance et la multiplication de «tiers lieux » (télécentres, smartcenter, espaces de co working …) sont autant de marqueurs de la révolution culturelle, sociale et économique qui bouleverse notre société.

Une thématique déjà abordée dans deux notes précédentes (Les télétravailleurs rèvent ils de télécentres « ubiques », Les télécentres émergent de l’horizon), tant ce sujet s’impose peu à peu dans notre vie quotidienne et dans celle de l’attractivité des territoires.

Le schéma traditionnel qui depuis la révolution industrielle régissait les relations professionnelles, que ce soit dans l’entreprise ou l’administration, basé sur le principe d’unité de temps et de lieu a vécu.
Il suffit pour s’en convaincre d’observer les usagers des transports en commun qui penchés sur leur Smartphone ou leurs tablettes dialoguent et surfent en s’affranchissant allègrement de toutes limites spatiales ou temporelles. Le temps de l’ubiquité numérique est arrivé.

Le développement du travail à distance est un enjeu global qui participe à l’aménagement d’un territoire plus durable, contribue à diminuer les émissions de gaz à effets de serre, donne la capacité aux salariés de travailler hors les murs de leur entreprise, ce qui, sous certaines conditions, permet de mieux concilier vie privée et professionnelle, de réduire le  stress et le temps perdu dans les transports et de mener plusieurs activités y compris familiales.
C’est aussi là que le bât blesse quelquefois, car dans ce cas comment séparer vie privée ou professionnelle ?

L’écart domicile-travail s’accroît. En 1950 la distance quotidienne parcouru par un français était de 5 kilomètre, elle est de 45 km aujourd’hui ! Et que dire des temps de transport, les franciliens y passent en moyenne plus d’une heure (deux fois plus qu’en province).Selon Bruno Marzloff , du Groupe Chronos, les enjeux des mutations du travail pour un territoire comme l’île de France représentent un gain de temps quotidiens dans les transports domicile / travail de 17 minutes en province et 34 minutes en Île de France.

L’employeur s’y retrouve aussi : organisation plus souple, flexibilité accrue, charge locative moins élevée, baisse de l’absentéisme, gain de productivité…
Cette mutation nécessite cependant un préalable : redéfinir les relations hiérarchiques et sociales dans l’entreprise. Le salarié n’est plus jugé sur son présentéisme mais sur des objectifs de travail ; l’encadrement, doit intégrer cette nouvelle donne, définir de nouvelles méthodes de gouvernance ou de médiation et surtout y être formé. . .

Pour Bruno Marzloff il est important d’évaluer les enjeux des externalités positives du travail à distance (réduction des risques psycho-sociaux, augmentation de la productivité…) et de les confronter aux problématiques de gestion « rationnelle » des organisations.
Les nouvelles méthodes de management à mettre en place doivent tenir compte également de la déspatialisation et des risques d’isolement des salariés. 
L’apparition de « tiers lieux » apparait comme une piste pertinente permettant de préserver l’intimité (le domicile n’est pas assimilé au lieu de travail), le lien social, de mutualiser les ressources, favorise créativité, synergie, innovation et intelligence collective (« fertilisation croisée »).

Aujourd’hui une trentaine de ces espaces collaboratifs existent en Île-de-France, pour l’essentiel situés à Paris. Ouverte en 2008 à Paris 2e, La Cantine a été la première à montrer la voie.

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Les Télé centres émergent de l’horizon …

reseau.jpgUn télécentre doit il contribuer à résoudre la fracture numérique auprès de publics fragilisés, ou bien constituer un équipement dédié aux « professionnels » qu’ils soient indépendants, salariés de TPE, grandes entreprises ou d’administrations ?  Ces deux objectifs apparaissent plus complémentaire qu’antagonistes, chacun étant digne d’intérêt, mais encore faut il que chaque structure se positionne clairement sur le type d’usages privilégié.

L’étude de marché menée par Seine-et-Marne Développement et le cabinet LBMG Worklabs auprès de 27 grandes entreprises franciliennes (dont Areva, Atos, Cap Gemini, Dassault, IBM, SFR, Siemens, Vivendi …) et 150 TPE-PME et indépendants de Seine-et-Marne affiche sans ambigüité la couleur : la cible recherchée est bien le monde professionnel. C’est l’objet de ce billet, nous reviendrons prochainement sur l’autre cible, même si des structures mixtes peuvent également être envisagées. Car il faut rester circonspect, l’expérience des Smart Work Centers d’Amsterdam, démontre que le succès économique n’est pas toujours au rendez vous et que le plus souvent il résulte d’une combinaison très concrète : qualité du business plan, implication des porteurs du projet, valeur ajoutée apportée aux télétravailleurs du secteur.

Incontestablement en France, la réflexion autour de ce nouveau concept émerge, prioritairement portée par les territoires,  qu’ils soient ruraux  ( vercorscantal …)  : lutte contre le désenclavement et la fracture numérique, ou péri-urbains avec pour cible la limitation des transports quotidiens des habitants, souvent supérieurs à 3 heures par jour (notamment dans la grande couronne). Toutes les études témoignent de l’intérêt du concept : tant pour le salarié (voir la note précédente), que pour les entreprises, de plus en plus confrontées à la nécessité de réduire leurs charges de fonctionnement et d’agir en faveur de l’environnement (responsabilité environnementale et sociale).

Rapide focus sur ce nouveau concept, qui avant de pouvoir incarner un modèle économique  « viable », doit représenter une réelle valeur ajoutée apportant des réponses pertinentes aux besoins de ses utilisateurs tant sur le concept, que les couts ou la nature des services proposés …

 

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Les télé travailleurs rêvent ils de télécentres « ubiques » ?

telecentre.jpgConstat banal : en vingt ans, internet a bouleversé modes de vies, repères culturels ou économiques, et l’appréhension même de la notion de temporalité.
La révolution numérique provoque une véritable «accélération dans l’accélération » rendant caduque les schémas traditionnels ayant rythmé nos vies depuis le XIXe siècle, et basés sur le concept d’unité de temps et de lieu.

Nous entrons dans une nouvelle dimension, marquée par le nomadisme croissant qui caractérise nos modes de vie actuels, mais aussi un autre phénomène : le citoyen d’aujourd’hui a la capacité d’être présent dans plusieurs lieux en simultanée, grâce notamment à lé technologie numérique, une véritable quadrature du cercle à la limite de la schizophrénie. Nous voici dans l’ère de l’ubiquité, du moins numérique ou virtuelle.

Nous renoue avec un vieux précepte, cher à Aristote : « La richesse consiste bien plus dans l’usage que dans la possession ». Théorie confortée par le développement du numérique et l’émergence de nouveaux modèles économiques basés sur le partage (usage ou temps d’utilisation). Ce bouleversement concerne les usages numériques mais également d’autres domaines comme celui des mobilités (vélo ou auto partage …).

Il est désormais possible d’amener son travail chez soi, de se déplacer en travaillant, ou encore de travailler à distance, grâce au « télétravail », ou « e-travail »; appellation  qui nous éloigne de la glorieuse époque du Minitel. Ce dernier revêt deux réalités différentes, selon qu’on le pratique à partir de son domicile ou de locaux dédiés (télécentre, coffee shop, coworking space …).

Il m’apparaît utile d’apporter quelques éléments de réflexion, avant de revenir dans un prochain billet sur l’étude menée par le Conseil Général de Seine et Marne, via son agence de développement économique, Seine et Marne Développement sur la thématique du télécentre, d’autant que, dans le cadre de l’éco quartier « L’Ancre de Lune », nous travaillons sur un projet similaire depuis plus d’un an.

Rappelons que malgré les appels d’offres de la DATAR des années 1990 («NTIC et services innovants pour l’aménagement du territoire», « Télétravail, nouvel aménagement du territoire » …), le e-travail reste peu développé en France. Ce concept n’est pas qu’une simple évolution technologique, mais bien  un véritable bouleversement des modèles organisationnels ou managériaux et codes sociaux en vigueur dans l’entreprise. Une mutation qui présente atouts et inconvénients mais surtout, beaucoup d’incertitudes, tant ses composantes sont multiples, voire systémiques, et liés à des questions techniques (équipement, infrastructures) mais aussi culturelles et sociales.

Des incertitudes qui interpellent …

Le « e travail » va-t-il pouvoir se développer ?
Si oui, est il utile de créer des télécentres ?
Ces derniers sont ils un effet de mode, une étape intermédiaire ou bien un modèle économique viable et pérenne ?

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Danger : La fracture numérique s’élargit grave

culture_digitali_image.1223316089.jpgUne des tables rondes des 14èmes Assises de l’Association des Maires d’Ile-de-France, était consacrée à la fracture numérique chez les élus. Simple constat, entre les thèmes quasi futuristes abordés par les intervenants et le quotidien vécue par la grande majorité des internautes, l’écart s’élargit, quasiment similaire à celui existant entre réalité réelle et réalité virtuelle,  c’est dire !

Evacuons la problématique « élus » du débat, qu’il serait réducteur de limiter à la seule communication politique, même aprés l’irruption du Web 2.O et le développement vertigineux des réseaux sociaux et leurs avancées !  Un élu est un internaute consommateur comme un autre (besoins / frustation ) mais également un acteur qui a la capacité d’influer directement les politiques publiques. Ces dernières se doivent d’intégrer désormais, non seulement les avancées technologiques considérables du net, mais les mutations profondes qu’elles induisent. Il faut agir à la fois sur les contenus et les tuyaux !

Prochaine étape annoncée, l’internet mobile. Selon le cabinet Forrester, en 2013 il y aura plus de « mobinautes » que d’internautes. Bernard Benhamou, Délégué au Usages de l’Internet, estime que =ce nouveau contexte révolutionnera les usages et sera créateur d’emplois, car reposant sur des services de proximité difficilement délocalisables. Comme illustration, il a présenté «Proxima Mobile» premier portail de services d’intérêt général fédérant des applications gratuites accessibles depuis les téléphones mobiles.

Le smartphone en liant nomadisme, vidéo et géo localisation ouvre effectivement des perspectives de développement quasi infinies : localisation en temps réel, obtention d’informations actualisées relatifs aux points d’intérêts situés sur place ou à proximité (commerces, monuments …), ajout d’éléments virtuels (concept de réalité augmenté) …
Autant de champs d’applications qui impacteront directement et durablement territoires, éducation, loisirs et modes de pensée. Cette mutation rend la situation actuelle plus intolérable, car discriminatoire, d’autant que la notion même de haut débit diffère selon la perception de chacun : état, opérateurs, collectivités ou internautes …

Le Très Haut-Débit (ou THD) est désormais un passage obligé, au regard des usages émergents (visioconférence, télémédecine, travail à distance, développement du « cloud computing », voir plus loin) trés exigeant en bande passante. Bientôt, ce ne seront plus les hommes qui se déplaceront mais l’information !
En Ile de France le THD se limite pour l’heure à Paris et quelques communes des Hauts-de-Seine : densité de population, proximité des centres de décision, présence d’un réseau d’égouts (pour Paris) favorisent le déploiement de la fibre optique et le développement d’une offre privée concurrentielle attractive. Concernant le reste de la région, c’est un vrai désert avec tout juste quelques oasis numériques !

Nous sommes à des années lumière du Très Haut Débit pour tous … Pourtant ce déploiement est un enjeu politique vital les technologies de la connaissance et de l’information étant une des rares pistes de création de valeur ajoutée pour l’économie européenne.

Où en sommes nous ?

 

 

 

Le tableau ci dessous montre l’importance de la bande passante en matière de technologie de l’information. Derrière la qualité du « tuyau », son débit optimal, c’est en fait toute l’évolution d’internet qui est concerné …
Entre les premières connections d’un Internet balbutiant qui ne concernaient que du texte, les besoins d’aujourd’hui (musique, photos, fichiers …) et surtout de demain (images en haute définition), le futur se conjugant étrangement avec le présent, sont radicalement différents et les notions de Haut débit, Très Haut Débit déterminantes par bien des égards … encore faut il bien les définir.

 

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La norme « officielle » du haut débit en France est fixée à 512 Ko (soit le débit minima de l’ADSL). Elle ne satisfait plus l’internaute lambda depuis longtemps, et encore moins le professionnel, cette technologie ayant atteint visiblement ses limites. C’est pourtant trop souvent le seul débit accessible.

Pour le Très Haut débit, la situation est beaucoup plus délicate. Retenons comme valeur limite basse : 4 Mbps, ce débit étant compatible avec l’offre « triple-play » des opérateurs : téléphone, internet, télévision. Rappelons cependant qu’elle ne permet pas le téléchargement rapide de films, le multi tâches en simultanée (envoyer un fichier très lourd et écouter de la musique en »streaming »…) ou de visionner un film en Haute définition. Deux solutions techniques sont envisageables pour atteindre ce débit  :

  • Le FTTH (fiber to the home), qui revient à câbler en fibre optique du début à la fin, jusqu’à l’abonné. C’est la solution technique la plus performante et la plus pérenne mais elle implique le déploiement d’une nouvelle infrastructure.
  • La montée en débit, qui consiste à amener la fibre optique jusqu’au sous-répartiteur et d’accéder ainsi à la sous-boucle locale de France Télécom (lorsque celle ci est dégroupée) pour utiliser ensuite le réseau de cuivre jusqu’à l’abonné. Solution plus rapide à mettre en oeuvre et moins coûteuse, mais présentant l’inconvénient majeur de ne pas permettre de montée en charge à terme. Si agir sur la sous-boucle permet localement d’améliorer la situation, ce palliatif se révèle donc coûteux et ne peut s’envisager que là où il n’est pas possible d’envisager le FTTH à long terme. D’autant que la loi de modernisation de l’économie (LME) impose dés 2010 de pré-câbler en fibre optique les immeubles neufs (plus de 25 logements), et tous les logements collectifs en 2011. La fibre optique sera ainsi au même plan que le téléphone, l’eau ou l’électricité.

L’Internet à très haut débit va-t-il enfin être accessible rapidement au plus grand nombre ? Rien n’est moins sûr, vu les montants financiers en jeu. Selon la Datar, il faudrait entre 18 et 30 milliards d’euros pour desservir la France en Très haut débit.
En partant d’une hypothèse basse (les 18 milliards) 80% de la population serait desservi en FTTH (les zones urbaines), le reste du territoire étant couvert en technologies hertziennes (LTE/4G, dividende numérique…) ou autres. Une effort financier estimé tout de même à 500 millions d’euros par an sur quinze ans ! Dans ce cas de figure seuls 25% à 40% de la population aura accès à la fibre optique en 2014.

Concernant le déploiement, deux scénarios sont pour l’heure envisagées: un réseau par opérateur ou un réseau mutualisé. Dans ce cadre l’ARCEP a proposé de diviser le pays en trois zones: Zone 1 (plus de 5 millions de foyers) regroupant les « zones denses », objectif prioritaire des opérateurs privés du fait des couts de déploiement moins importants et des perspectives de rentabilité rapides, dans ce cas de figure seuls les derniers mètres (la partie verticale) seront mutualisés (guide de l’ARCEP), zone 2, « moyennement dense »,  dont le périmètre n’est pas encore fixé par les opérateurs, et la zone 3, « peu dense » pour laquelle seule l’intervention publique peut changer la donne selon les techniques alternatives.

Il est nécessaire cependant de relativiser les bénéfices attendus par le déploiement de la fibre optique dans les conditions actuelles du marché. Plus de dix-huit mois ont été nécessaire pour que France Télécom, SFR, Bouygues Telecom, Iliad et Numericable accordent leurs position afin d’établir un « cadre réglementaire » de déploiement de la fibre optique dans les zones les plus denses, pourtant les plus rentables a priori. C’est dire que le retour sur investissement n’est pas assuré

Concernant les zones 2 et 3, ne rêvons pas, pour faire simple, soit le déploiement est rentable pour les opérateurs privés à court terme, soit non. Dans ce dernier cas, les habitants ne peuvent compter que sur la seule puissance publique (Etat, collectivités …) pour agir. L’Etat à grand renfort de communication prévoit 2 milliards d’euros dans le cadre du fameux « grand emprunt » pour le déploiement de la fibre, ce chantier étant estimé par France Télécom, entre 20 et 40 milliards d’euros…

Déployer le THD zone par zone comme le suggère l’ARCEP, élargirait encore plus la fracture numérique entre « ville et campagne », seule une approche globale et coordonnée est indispensable afin de permettre de mutualiser les couts de déploiement et d’infléchir le modèle économique et d’intégrer des mesures de péréquation incontournables.

Autrement dit, les collectivités territoriales devront s’impliquer car le Très Haut débit représente un enjeu incontournable d’attractivité territoriale, une infrastructure « vitale » …

D’autant que le développement du THD mobile exige également une infrastructure appropriée afin d’assurer la montée en puissance exigées par les nouveaux besoins de l’internet mobile (débits de l’ordre de 100 Mega bitq à 1 gigabit/ seconde) ce que ne permet pas le 3G actuel contrairement au 4G. Débits qui ne pourront être atteints que par Wi Max ou les ondes libérées par le passage de la télévision analogique à la télévision numérique (le fameux « Dividende numérique ») via la TNT. Deux questions sont encore en suspens dans ce domaine : la couverture effective des territoires et le coté sanitaire (impact des ondes sur la santé).

 

Il est impératif de définir un véritable « Schéma Directeur Territoriaux d’Aménagement Numérique » qui intègre à la fois un mixt des solutions techniques adaptées comme de nouvelles clés de financement : subventions et garanties d’emprunt, incitations fiscales afin de privilégier la fibre sur le cuivre, meilleure rémunération au niveau des contenus de l’infrastructure …

Sans volonté politique et sans l’action résolue de la puissance publique (Etat comme collectivités), la France risque fort de voir la fracture numérique s’ élargir entre ville et campagne et prendre un retard dans son développement économique préoccupant.