Ligne P : fracture consommée ?

 

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Dans un billet daté de février dernier, j’évoquais la rencontre organisé par Guillaume Pepy, Président de la SNCF avec les Maires des villes de la ligne P (dont Trilport), entretien qui m’avait laissé entrevoir quelques perspectives d’amélioration dont je m’étais fait l’écho, imprudemment cependant, tant la réalité aujourd’hui est malheureusement toute autre.

Nous assistons depuis cet été à une dégradation inacceptable des conditions de transport, pourtant loin d’être idéales jusque là : retards, suppressions de trains, propreté, travaux …  Mais plus que tout, c’est la multiplication du recours aux trains courts lors des heures de pointe, avec tout son cortège de conséquences sur les conditions de voyage (dont beaucoup inadmissibles), qui exaspèrent au plus haut point les usagers dont certains passent prés de 2 heures par jour dans ces trains; et cela sans comptabiliser le métro ou le RER !
Il faut concrètement partager de tels moments pour comprendre tout le ressenti et la colère légitime de voyageurs qui se sentent considérés comme du véritable « bétail » (sic). Aucun sas de décompression, les transports ferrés sont déjà en mode « Metro heure de pointe » dés leur gare de départ !

J’ai adressé à Guillaume Pepy il y a quelques semaines un courrier pour protester comme élu et usager, de cette situation inacceptable qui n’a que trop duré. Petite note positive cependant depuis septembre, le Pass Navigo à prix unique qui atténue une inégalité territoriale devenue de plus en plus pesante et discriminante au fil du temps.

Il est dommageable que tous les efforts consentis depuis 2008 par la Région et le STIF soient ainsi remis en cause par ces dysfonctionnements. Les mesures mises en place, telles le cadencement, l’arrivée de nouvelles rames, la rénovation des voies et des quais mais aussi la tarification, induisent de nouveaux usages de mobilités chez nos concitoyens notamment le week end ou en soirée mais elles font apparaître paradoxalement aujourd’hui en creux, toutes les faiblesses et lacunes d’un réseau sous dimensionné et obsolète qui n’arrive pas à suivre cette montée en puissance. L’obsolescence étant, ne l’oublions pas, la cause principale de la multiplication des incidents rencontrés ligne P.
Cette ligne ferroviaire est représentative des contrastes de l’Île-de-France à l’heure du Grand Paris, elle devrait à ce titre inspirer les candidats aux régionales en les incitant à élargir leur focale jusqu’aux franges les plus lointaines de la région, afin de positionner la problématique des transports de la grande couronne comme une priorité absolue.
Je n’ose suggérer à Monsieur Pepy de prendre quelques minutes pour gouter aux délices d’un aller simple Trilport / Paris aux heures de pointe dans de telles conditions. Si l’on veut prendre les choses du bon coté, il est vrai que lorsque les usagers après un tel périple arrivent enfin à leur travail  ils se sentent libérés ! Mais est il normal de promouvoir l’émancipation par le travail avec un tel procédé ?

Rappelons que longue de 252 km, fréquentée chaque jour par 85 000 usagers, nombre en constante progression, la ligne P dessert 36 gares sur 3 départements et s’étire à plus de 90 km de Paris, allant jusqu’à Château-Thierry ou La Ferte-Milon. Imaginons les analyses que pourraient en tirer Emmanuel Vigneron, sociologue rendu célèbre par ses travaux sur les variations de l’espérance de vie au fil du RER B, ou encore Christophe Giulluy, le spécialiste des fractures entre France des métropoles et France périphérique tant elle illustre la discrimination territoriale du pays et bien des problèmes que rencontrent le péri urbain.
Rajoutons encore une couche, la ligne P est la dernière en Ile de France à avoir des voies encore non électrifiées (Provins / Trilport à La Ferté Milon) ! Anachronisme qui impose des contraintes de gestion de parc, complexes et couteuses, des rames ayant une faible capacité et le recours à des navettes bus de substitution lorsque ces dernières tombent en panne ou en raison du rythme des saisons : été (chaleur, canicule), automne (les feuilles qui tombent à la pelle), hiver (froid, gel et neige), ce doit être également une des raisons pour laquelle les usagers apprécient tellement  le printemps,

Question simple mais importante pour le quotidien de milliers d’usagers de la Grande Couronne :  comment améliorer leur quotidien durablement dans une situation qui aujourd’hui est pour le moins compromise ?

Voici quelques pistes de réflexion dans le cas ou nos décideurs seraient en manque d’inspiration …

 

 

 

 

 

Sanctionner plus durement le recours au trains courts, d’autant qu’il constitue désormais un paramètre de gestion face aux problèmes d’obsolescence du parc machines

  • Dans la palette des indicateurs qualitatifs, susceptibles d’entrainer pour les opérateurs des pénalités financières tels : régularité, ponctualité, humanisation et présence en gare, le recours aux trains courts doit être pénalisé beaucoup plus significativement. Non seulement il contribue à la dégradation du service de transport, constitue une véritable atteinte à la dignité des usagers mais entraine potentiellement des problèmes de sécurité tant les quais et les rames sont bondés
  • Concernant les statistiques qualitatives, il faut relativiser l’importance donné aux indicateurs de niveau de qualité de service positifs, dés que ceux ci résultent d’une globalisation des données par ligne, réductrice de fait. Cette lecture nuit effectivement à une analyse circonstanciée concernant la qualité effective du service accompli sur l’ensemble de la ligne; les dysfonctionnement apparaissant souvent sur les mêmes segments, localisés  généralement en fin de ligne; en ce domaine ce sont les points faibles du dispositif qui importe surtout lorsqu’ils sont lourds de conséquences pour les usagers impliqués malgré eux ! Lorsque les usagers de Lizy s/ Ourcq, Trilport ou de la Ferté sous Jouarre s’entendent dire que les indicateurs de la ligne P sont « plutôt » bons, ils peuvent légitimement penser que l’on se moque d’eux
  • Créer un observatoire des lignes, ouvert aux usagers, accessible par internet qui intègre le reporting des incidents, les montées et descentes par gare, les pénalités infligées, les actions correctives mises en place, la progression ou non des opérateurs en terme de qualité de service sur l’ensemble des lignes. Il faudrait créer un véritable open datas sur cette thématique des mobilités afin de mieux cerner les points faibles du système global.

 

Demeurer extrêmement vigilant sur les limites du « Très Grand Paris Express »

  • L’effort de rénovation à mener en Grande Couronne est colossal, tant au niveau des voies, rames, quais, gares ! De plus en plus d’habitants y vivent, qui représentent autant d’usagers supplémentaires en puissance pour un réseau saturé qui menace de thrombose tout le système de transport régional.
    Usagers et élus ont peur de voir l’essentiel des moyens financiers, surtout en période de diète budgétaire, se concentrer sur le seul réseau du Grand Paris; personne n’ayant oublié comment le réseau de Grande Couronne a été sacrifié lors des décennies précédentes à l’autel du tout TGV, ou du tout Météor.
    D’autant que le « super réseau statosphérique » prévu pour la nouvelle métropole possède son lot de zones d’ombre : sous estimation des infrastructures souterraines, impact financier de la mise en place des reports multimodaux non pris en compte …L’addition risque fort d’être non seulement salée, mais sans commune mesure avec celle initialement envisagée.

 

Prendre en compte les spécificités périurbaines

  • Electrifier les lignes SNCF qui ne le sont pas encore est un minimum. C’est bien évidemment une question d’équité territoriale mais aussi la condition sine quantum qui permettra sur la ligne P de simplifier et fluidifier la gestion d’un parc aujourd’hui hétéroclite, mais également d’ assurer une montée en puissance et en charge lors des heures de pointe pour des centres urbains et gares de plus en plus fréquentées (bassin de vie supérieur à 100 000 habitants) qui aujourd’hui n’ont pas d’autres solutions potentielles en offres avec une population qui ne cesse de progresser !
  • Faire de la multimodalité un enjeu stratégique. Chaque nœud de réseau constitué par une gare, est au centre d’un éco système local de mobilités, qui pour s’épanouir ne doit pas rester au seul stade du concept. Il y a urgence pour ce qui concerne la grande couronne, dont un des maillons faibles est bien la clé d’entrée du réseau de mobilités comme de la chaine des acteurs qui compose ce dernier.
    Le système actuel, celui des « pôles gares» n’est pas satisfaisant : trop administratif, complexe, long à mettre en place puis à mettre en oeuvre, une véritable usine à gaz … Dés qu’un partenaire ne veut pas jouer le jeu (notamment l’opérateur de mobilités qu’était RFF,  champion toutes catégories à ce jeu), c’est tout le processus qui est bloqué. Il faut non seulement un pilote, mais également un facilitateur et un arbitre, permettant d’assurer le respect d’échéanciers raccourcis et d’assurer une gouvernance resserré permettant des décisions rapides suivies d’actions concrètes.
    A mon sens beaucoup de choses sont à revoir sur les dispositifs et procédures en place afin de les rendre plus fluides, agiles, « cognitifs » (notion d’éco systèmes locaux) et surtout réactifs …
  • Assumer le « fait routier » en privilégiant une approche par logique de ligne : le stationnement (vélo, voiture) comme le recours aux bus sont des éléments indissociables de la chaine des mobilités. Si l’usage de la voiture individuelle n’est pas pour l’heure le plus écologique, en grande couronne il reflète une réalité concrète. Elle occasionne pour les « communes à gare SNCF » tout un lot de contraintes et une gestion qu’elles ne sont pas en capacité, surtout lorsqu’elles sont petites, de supporter seules.
    Il est nécessaire de créer pour l’usager un « pack mobilités », intégrant le prix du stationnement au titre de transport (création d’un Navigo Plus), de services complémentaires « add on » et de privilégier pour la gestion des parkings eune logique de ligne (services ajoutées, synergie, investissement permettant de développer la capacité d’offre de stationnement : aménagements, travaux …), afin que les opérateurs spécialisés soient véritablement en appui des collectivités, dont la gestion de ces espaces n’est ni la mission ni la vocation.
    Dans le même esprit, il faudrait développer les pratiques de co-voiturage grâce à une politique d’incitation agressive : emplacements réservés sur les parkings, tarification préférentielle (parking offert si 3 places occupées dans la voiture …).
  • Elaborer un nouveau modèle de Transport à la Demande (TAD), pouvant apporter des réponses originales tant dans les secteurs ruraux, que dans certains quartiers urbains (en complément de l’offre en place) basé sur des concepts innovants reposant en grande partie sur le dividende numérique. Il est possible d’apporter une réponse institutionnelle alternative et socialement régulée à l’Uberrisation tout en utilisant le numérique. Ce secteur représente une piste de croissance potentielle vertueuse, pouvant offrir un complément d’offres particulièrement compétitive et souple afin de renouveler la vision traditionnelle et monolithique du TAD, non seulement sur les périmètres de desserte, mais également sur les amplitudes. L’asymétrie entre offre et demande pouvant être comblées par la souplesse et la complémentarité.

 

Limiter la montée en charge lors des heures de pointe

Diminuer la fréquentation des réseaux de transport lors des heures de pointe, du matin ou du soir, est synonyme d’amélioration directe, concrète et durable des conditions de transport. Baisser la fréquentation ne serait ce que de 3% représenterait pour la collectivité des sources d’économies substancielles, que ce soit en fonctionnement comme en investissement et une amélioration sensible de la qualité de vie et des transports pour des millions d’usagers. Plusieurs axes d’action et leviers peuvent accompagner une telle évolution (révolution) des comportements :

  • Développer le télétravail : il est essentiel et important de soutenir les tiers lieux ou télécentres qui se développent afin que les utilisateurs potentiels (entreprises, administrations, institutions, salariés) pérennisent leur existence via des conventions ou des partenariats, des labellisations, des systèmes d’abonnement préférentiels, la mise en place de contrôle des présences effectives, la création de centrales de réservation.
  • Contribuer au lissage des amplitudes d’ouverture des services, opérateurs, entreprises, universités …

 

Chacun peut le constater, il n’existe pas de fatalité en ce domaine ou de réponse unique, mais bien un faisceau d’actions complémentaires à court, moyen et long terme, à mener par les différents acteurs qui composent et animent la chaine des mobilités.
C’est un enjeu social, économique mais également culturel, car la mobilité est non seulement le droit d’accéder au travail, aux études, mais aussi aux loisirs.
Une des richesses de l’Ile de France, partagées d’ailleurs par beaucoup d’intercommunalités seine-et-marnaises est la diversité de nos paysages, la mobilité doit impérativement tenir compte de la géographie des territoires. Chez nous, ils vont  de la métropole, à l’urbain, puis au rural en passant par le péri urbain …
Plusieurs défis sont à relever de ce fait, dans un contexte budgétaire plus que contraint, ce qui est d’autant plus pénalisant devant la dynamique territoriale en cours depuis plus de 20 ans, notamment dans le 77…  Dans un tel contexte, ne pas progresser est synonyme de régression.
Paradoxe de taille, plus la chaine  des mobilités est complexe à mettre en œuvre, car il s’agit bien d’éco systèmes locaux en interaction cognitive (le copier / coller s’apparente en ce domaine à la faute professionnelle), plus d’acteurs interviennent et de mode de mobilités se combinent (rupture de charges), plus tout doit apparaitre le plus simple aux yeux des usagers, c’est entre autre la mission du STIF.

Je considère pour ma part que l’échelle pertinente pour l’Ile de France dans le domaine des mobilités, mais pas exclusivement, ne peut être que métropolitaine. Jean Paul Huchon avait raison, l’avenir proche lui rendra justice, le « périmètre pertinent » de la métropole du Grand Paris, est, du fait de la nature des liens entre Grande Couronne et métropole notamment, la Région elle même …

 

 

 

SNCF : La « P », ligne de fracture

gare de Trilport.jpgJe me suis rendu à l’invitation de  Guillaume Pepy, Président de la SNCF,  à un repas qui se tenait au siège social de l’entreprise à Saint Denis, avec les élus Seine et marnais des villes abritant des gares de la ligne P conviés dans ce cadre, à un dialogue informel et direct. Il était pour l’occasion entouré de son état major et de Mme Bardy Directrice d’exploitation du STIF.

La ligne P est représentative des contrastes portaient par l’Ile de France. Partant de Paris Est, elle dessert 36 gares localisées dans 3 départements, transporte 85 000 voyageurs / jour sur 252 km de ligne et s’étire à plus de 90 km de Paris, allant jusqu’à Provins, Chateau Thierry ou La Ferté Milon; autant dire qu’elle traverse de bout en bout notre Région pour se rendre jusqu’à ses franges les plus lointaines, aux confluences des régions voisines.

Je ne peux imaginer ce qu’en tirerait le chercheur  Emmanuel Vigneron célèbre pour ses travaux sur les variations de l’espérance de vie le long du RER B (« la ville, la vie, la mort dans Paris et ses banlieues au long du RER B »), une enquête sur cette ligne apporterait certainement des résultats également surprenants, sur les espaces de solidarité, les bassins de vie, les réalités quotidienne du transport en mode urbain, péri urbain ou rural.

Réalité qui n’a manifestement ni les mêmes contours, ni la même saveur, entre ceux disposant d’un train tous les quart d’heure pour un voyage de 15 minutes pour se rendre au coeur de Paris et les autres. Pour faire simple, sans être caricatural pour autant, plus le voyage est long, plus les conditions de transport sont galères et plus le ticket coute. Grand merci à la région d’avoir enfin décidé un Pass Naviro à prix unique sur l’Ile de France dés septembre prochain. Au moins cette inégalité disparaitra !

Les difficultés évoquées lors de ce repas sont à l’unisson de ces différences géographiques, plus que des nuances d’appréciation.

Pour vous en convaincre, poursuivez la lecture de cette note, plongée dans l’Ile de France profonde …

 

 

 

 

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France des métropoles et France périphérique 

Les « indicateurs de performance » de l’entreprise, face à de tels contrastes sont tous sauf signifiants. Ils pourraient même apparaitre pour certains usagers (Ferté Milon notamment) pour de la provocation; ne révèlant pas la même réalité, ils ne peuvent servir de thermomètre ou de balise pour guider les actions prioritaires ou les correctifs à mener. Illustration : 78% des clients sont à priori satisfaits, ce qui est bien au dessus de la moyenne transilienne, à pondérer lorsque l’on sait que  6 gares sur 36 (Chelles à Trilport) concentrent 50% des voyageurs; résultat qui provoquerait pour le moins des réactions agacées d’usagers utilisant tous les jours ce mode de transport.

Entre les élus bien lotis dont les demandes portent sur les services additionnels à implantés dans des gares déjà bien desservies et totalement accessibles et ceux qui confrontés aux réalités concrètes de la France « périphérique » espèrent simplement disposer de trains réguliers, ponctuels, si possible confortables, propres, chauffés et complets pour affronter les 50 minutes quotidiennes qui les séparent de Paris (sans oublier le retour SVP),  il y a plus qu’un monde de différence !

Soulignons que la ligne P est la dernière en Ile de France à disposer de lignes non électrifiées (Gretz / Troyes et Trilport / La Ferté Milon). Situation qui impose à la SNCF des contraintes quotidiennes de gestion de parc complexes et couteuses, le recours plus que raison à des navettes bus pour remplacer les rames en panne (aprés une journée de boulot, c’est super) et trop souvent à une gymnastique s’apparentant quelquefois à du « bricolage » pour constituer une rame complète, trouver une motrice en ordre de marche, en désabillant une ligne déjà mal en point au bénéfice de l’autre, selon la pression des usagers ou des élus.

Cette situation anachronique ne correspond ni aux objectifs de développement , notamment démographique, exigés par l’Etat au titre de la loi SRU et la Région, dans son Schéma Directeur ni à la vision d’espace de solidarité qu’ont les élus régionaux de l’Ile de France. D’autant que deux paramètres sont en constante augmentation chaque année le nombre d’usagers et le nombre d’habitants.

 

A l’est rien de nouveau ou si peu 

Force est de constater que la plupart des annonces concrètes faites lors de ce repas ont surtout concerné l’Ouest, ce qui ne surprendra pas les Seine et Marnais avec l’arrivée du Grand Paris et le prolongement d’Eole à la Défense, en plaçant Chelles à 34 minutes et Tournan à 53 minutes.

Il est d’ailleurs pour le moins paradoxal de voir son nouveau Maire, Brice Rabaste, rappeler l’importance pour la Seine et Marne d’avoir obtenu deux gares du Grand Paris, dont celle de Chelles (grand merci à Jean Paul Planchou) alors qu’il a décidé de tourner le dos à ce département pour rejoindre Paris Métropole … Mais c’est une autre histoire …

Le responsable des infrastructures présent a abordé le scénario, à priori à l’étude, d’introduire un matériel alternatif aux rames inox, dans une hypothèse de « non électrification ».  Cette évocation m’a amené à intervenir et à préciser que ni les élus locaux, ni les usagers n’accepteraient un tel scenario, nous ne demandons pas l’aumone, mais simplement d’être traité comme tout francilien. Notre horizon futur ne peut se limiter au seul grand Paris …

Ce qui est un fait établi est que l’unité de mesure des annonces concernant le Grand Paris ou Eole est le milliard d’euros alors que celle des électrifications des deux dernières lignes francilienne est la dizaine de millions.

 

La disparition de Réseau Ferré de France (ou RFF)

Autre évocation beaucoup mieux ressentie,  celle de la réunification de la gestion des infrastructures en une seule entité, aucun élu ne regrettera la disparition de Réseau Ferré de France. Cette entreprise, pour faire simple était un facteur de blocage sur la plupart des dossiers d’aménagement dans lesquels elle intervenait (pôles gares notamment); sa volonté de « valoriser » son foncier, quasi obsessionnelle, s’illustrait par des positionnements pour le moins dicutables.

Sa responsabilité sur le retard du dossier du pôle gare de Trilport est largement engagée. Elle se faisait représenter lors de réunions portant, excusez du peu, sur l’amélioration des accés à la gare afin de la transformer en Pôle multi modal,  par Nexity, avec quelquefois des demandes carrément caricaturales.

C’est désormais du passé et comme le dit une chanson, faisons en table rase

 

Merci à la SNCF d’avoir organisé ce moment de dialogue direct, ou j’ai pu, entre poire et fromage, faire valoir notre détermination à obtenir l’électrification jusqu’à La Ferté Milon, remonter les problèmes de stationnement rencontrés dans nos villes et villages, des pistes sont à l’étude, comme celle d’intervenir sur les quais des différentes gares jusqu’à la Ferté sous Jouarre afin de permettre à leurs habitants de connaitre les délices du Francilien.

Des engagements ont été pris et des messages ont été émis, mais comme Saint Thomas …

 

 

 

La ligne « P » en bref

36 gares sur 3 départements, 42 communes desservies

85 000 voyageurs / jour

252 km de ligne, elle va jusqu’à 94 km de Paris

2 branches non électrifiées

6 gares sur 36 (Chelles à Trilport) concentrent 50% des voyageurs

Statistiques moyennes

78% des clients satisfaits en 2014, 10 pts au dessus de la moyenne Transilien. Ce n’est pas forcemment le sentiment qu’en ont les voyageurs de la Grande couronne !

 Travaux

2014 : 2eme phase de modernisation Trilport / La Ferté Milon, Trilport / Chateau Thierry : remplacement de 5 OOO metres de rails.

2015 : dernière phase de modernisation (renouvellement voies, ballast et traverses) de Trilport / La Ferté Milon

 

 

Les territoires 3.0 : Mobilis in mobile

carte SNCF.jpgNous sommes les héritiers d’une société en voie de disparition dont les repères sont pourtant toujours gravés dans nos gènes, tant ils étaient immuables jusque là. Mondialisation, crises successives,  multiplication des échanges avec les pays émergents, omniprésence d’internet, autant de révolutions qui ont tout bouleversé.
La terre est redevenue « plate », pour reprendre le titre d’un célèbre livre (Friedman) d’il y a quelques années, un nouveau monde émerge et bouscule ce faisant les schémas traditionnels d’une société pyramidale, verticale, quelque peu immobile …

Devant une telle mutation, quelle place, dans ce qui n’est jusque là qu’un débat technique sur l’organisationnel, doit on réserver à l’homme, afin de lutter contre les menaces que sont la ghettoïsation, le repli identitaire, le communautarisme, le délitement de la vie démocratique, l’absence de débat de fond,  la montée du consumérisme et de l’individualisme ?
Car il y a problème ! Nous appartenions jusque là à des « communautés » uniques, bien cloisonnées, délimitées par des repères identifiés, mais aujourd’hui nos appartenances sont multiples, de quoi avoir le tournis ou le vertige tant la société est fracturée, éclatée et de plus en plus déshumanisée.

La question identitaire se pose, elle est centrale. Encore faut il rappeler que l’identité se construit autour d’une dynamique, véritable trajectoire entre un point de départ et une destination : le cap à atteindre. Ne la réduire qu’à nos seules racines mène à une impasse, vide de sens, et source de conflits sans fin, car l’identité se construit au fil du temps et des évènements.
C’est toute la problématique actuelle : sans cap à atteindre comment bâtir un « vivre ensemble » commun que l’on soit en capacité de partager ? S’il est bon de savoir d’où l’on vient, il est essentiel de savoir où l’on va …

En 2012, une équipe de géographes a étudié pour la Datar «les systèmes urbains français», explorant les différentes configurations susceptibles de faire évoluer  politiques d’aménagement et gouvernances. Hypothèse retenue : pour appréhender fonctionnement et dynamique territoriale intégrer l’étude des «liens» comptent autant que les périmètres des pôles. Suite à leurs travaux une nouvelle représentation des territoires est apparue, permettant de « visualiser » les dynamiques animant nos territoires, l’incidence des différents espaces temps qui cadencent nos vies, ou simplement le degré d’urbanisation du pays.
Au delà de ses paysages ruraux la France est devenu un archipel d’aires urbaines, tant les usages et besoins des habitants, exprimés ou ressentis, sont exclusivement urbains.
Mais comment représenter des bassins de vie évolutifs par essence, qui s’affranchissent allègrement des «frontières» administratives traditionnelles ? La réponse traditionnelle jusque là est celle de conteneurs successifs, véritables poupées russes s’emboitant les unes aux autres, dois je souligner que la réforme territoriale proposée aujourd’hui conforte ce vieux schéma, agrandissant seulement les périmètres (seuil des 200 000 ou des 20 000 habitants actuellement brandis par la technostructure), ce qui ne répond pas forcement à la problématique et menace à terme d’éloigner le citoyen du projet commun, j’y reviendrais.

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Ne redevenons pas les oubliés du Grand Paris !

trilport-motrice-agc.jpgDepuis l’arrivée de Jean Paul Huchon comme Président du STIF, force est de constater que pour la grande couronne les conditions de transport ferré ont évolué positivement, que ce soit au niveau du matériel (nouvelles rames) que des prestations grâce à la mise en place du cadencement et des évolutions tarifaires.

Mais au regard du retard à rattraper, 30 ans de non investissement sur le réseau, l’effort à fournir est toujours considérable, jugez en plutôt !
Aux heures de pointe (7h à 8 heures) les usagers des gares de Trilport et de Meaux ont le sentiment d’être déjà dans le métro tant ils sont serrés, signalons à toutes fins utiles que le trajet dure environ 40 minutes, avant de retrouver le vrai métro !

Le manque de confort est évident, il est principalement du à un manque de capacité significatif de l’offre aux heures de pointe, situation qui avec l’augmentation constante et croissante des usagers ne va pas s’arranger dans les prochaines années … Si aucune amélioration n’est apportée d’ici peu, le pire est encore malheureusement à venir et anéantirait tous les efforts considérables consentis par la Région et le STIF depuis 2006 pour améliorer le quotidien des usagers.

Il n’y a pas trente six solutions

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Mobilis in mobili (2)

 

0062.jpgRevenons sur les changements qui bouleversent peu à peu l’offre en transports tant ils modifient nos repères quotidiens en replaçant la question de la mobilité, au centre non seulement de l’organisation urbaine et de l’aménagement du territoire mais de notre vie en général.

Se déplacer est une nécessité absolue qui conditionne l’accès au travail, à l’éducation, à la culture, à la santé, et de manière plus globale à toute vie sociale.
Cette faculté ne peut être considérée comme une fin en soi, nos déplacements quotidiens étant directement liés à une activité et non au seul désir de parcourir une distance; il s’agit ici, pas seulement d’épanouissement individuel mais bien d’une obligation vitale, tant pour le citoyen que pour le dynamisme et l’agilité d’un territoire, dont l’efficacité tient également à la capacité qu’il donne à ses habitants de se déplacer de manière efficace.
Plus que jamais, notre société est en mouvement (mobilis in mobili »), c’est ce qui arrive à la Région Ile de France depuis 2006, y compris désormais en grande couronne.

Notons que si le lien entre accès efficient (cout / durée) à un réseau de transport performant constitue une valeur ajoutée pour les entreprises et l’économie, les infrastructures de transport représentent un coût significatif (investissement comme fonctionnement) et demeurent « peu rentables » sur le court terme. C’est pourquoi la puissance publique finance cette fonction qui constitue un véritable avantage comparatif territorial. Réalité qu’il est bon de rappeler aux tenants d’un ultra libéralisme qui démontre furieusement ses limites ces derniers temps, considèrant trop souvent la puissance publique comme une charge financière et un frein au développement économique. Il faut quelquefois voir au delà du bout de son nez, aussi long soit il …

Une des particularités de l’Ile de France, et non la moindre, est la présence du STIF (Syndicat des Transports d’Ile de France, nous y reviendrons dans le prochain billet). C’est incontestablement comme partout en France, la volonté des élus régionaux de changer une donne passablement compromise, afin d’enclencher un véritable mouvement de fond dans le domaine des mobilités qui a permis de faire évoluer un contexte qui semblait jusque là figée et de créer des perspectives meilleures.

En Ile de France, une des origines de ce mouvement est la réflexion initiée autour du Schéma Directeur Régional. Ce dernier, fruit d’un travail collectif piloté remarquablement par Mireille Ferri témoigne d’une nouvelle approche, liant développement territorial, intensité urbaine et mobilités. Il a permis de déboucher sur un document stratégique qui souligne l’importance de structurer un territoire autour des nœuds de son réseau de transport collectifs; ce qui permet en contre point de protéger également  espaces naturels et agricoles.
Une réflexion qui nous aura fait gagner beaucoup d’années, mais qui pour être mis en œuvre nécessite un préalable : avoir un réseau de transport performant.

C’est bien là que le bas blesse, conséquence logique du manque d’investissement tant de l’Etat, que de la SNCF depuis plusieurs décennies dans le réseau de banlieue. Situation devenue critique (cf ce blog) du fait du manque de moyens consacrés tant en fonctionnement qu’en investissement.
Incontestablement le changement de gouvernance au STIF a été le point de départ de ce que l’on peut réellement qualifier de « reconquête » : cadencement, acquisition de nouvelles rames, investissement dans les gares, création de lignes de tramway, rénovation des voies et ballasts, avec la particularité de consacrer la moitié des investissements à la grande couronne (volonté affirmée de Jean Paul Huchon).

Vague de fond qui s’est propagée aux acteurs  de la mobilité :

–  La SNCF renouant avec les territoires et les mobilités de proximité mais aussi avec ses racines, après deux décennies consacrées quasi exclusivement au développement du TGV. Remise en cause interne qu’il convient de saluer, accompagnée du soutien financier de la région et du STIF. L’entreprise nationale qui jusqu’en 2006 avait démontré un certain « autisme » face aux demandes des usagers et des élus (cf ce blog), a depuis entrepris une vraie révolution culturelle et s’investit de nouveau vers l’avenir en travaillant à bâtir de vraies perspectives, tant pour les usagers que son personnel …

– Les autres opérateurs, qui ont initié un mouvement de concentration, notre transporteur local historique (Marne et Morin) après avoir avalé tous ses concurrents a été racheté par le groupe Transdev et accélérer la constitution de réseaux suffisamment dimensionnés pour répondre aux enjeux transversaux de la nouvelle dimension que revêt désormais la problématique des mobilités beaucoup plus globale  : Keolis, Transdev, RATP …

Se déplacer est enfin redevenue un enjeu politique, au sens noble du terme, tant cette capacité  est liée au temps qui passe, au temps à gagner, à la liberté de se mouvoir avec agilité dans l’espace, tant pour son épanouissement personnel que celui de la société. Une capacité vitale qui nous caractérise depuis que l’homme est homme.

Peu à peu, irrémédiablement, le paysage des mobilités évolue, mute, un nouveau paradigme se dessine, avec l’émergence d’un nouvel acteur, la collectivité …

 

 

 

Réel changement de paradigme

Si les transports collectifs constituent un service d’intérêt général, ce dont aucun usager ne doute, ils fonctionnent pourtant avec des entreprises privées, d’où le concept « d’Autorité? Organisatrice ». Son origine remonte à la construction des premières lignes de tramway électrique (fin XIXe siècle); un montage juridique qui sépare de manière étanche, deux fonctions : une politique touchant à la définition du service public de transport (organisation, architecture, priorités, modalités) dévolu à l’autorité organisatrice, une carrément technique, la concession, portant sur la mise en œuvre concrète du service.

Cette architecture a été consacrée par la loi d’orientation sur les transports intérieurs (LOTI, 1982),  conférant la mission d’autorité organisatrice aux seules collectivités, excepté en Ile de France. Ce n’est effectivement qu’en 2004, que cette région, la seule jusque là demeurant sous le régime du décret de 1949, est passé sous la direction des élus, (en fait 2006, après quelques péripéties cf blog, et autre billet ).

Mais le changement de paradigme ne se limite pas au seul leadership décisionnel, il concerne également le développement des territoires et l’émergence de nouveaux besoins en mobilité.`

Si la France n’est plus rurale, elle n’est toujours pas « citadine» au sens strict du terme. Notre pays est littéralement léopardisé par les « aires d’influence urbaines ». Aujourd’hui 95% des français vivent sous l’influence des villes et plus d’un français sur deux hors du périmètre des transports urbains. Les zones rurales ou « sub, péri ou inter urbaines » accueillent de plus en plus de nos concitoyens, et développent quelques caractéristiques communes : faible densité de population, habitat dispersé, besoins en déplacements  multiples et omniprésence de l’automobile individuelle, due le plus souvent à la quasi absence de desserte collective.

Cette situation nécessite de combiner plusieurs modes de transport, d’autant que la ville centre n’a souvent plus l’attractivité d’antan, le développement territorial qui s’impose est de plus en plus multipolaire et s’affranchit de plus en plus du scenario de transport urbain qui prévalait jusque là (mono mode, de masse et pendulaire), plus du tout adapté à la nouvelle donne territoriale.

 

Définir et initier un projet de territoire « mobile »

Il est important pour chaque territoire de concilier dans son projet de développement, dynamique territoriale (économique, culturelle …), démarche environnementale (limitation des émissions de gaz à effets de serre), renforcement de la cohésion sociale et mobilités.
Pour ce faire il est nécessaire d’être en capacité d’identifier les particularités de chaque espace, présents ou futurs, afin de pouvoir les investir selon leur destination, les mettre en relation, tenir compte de leurs contraintes ou atouts, afin de  donner à la fois du sens et des perspectives.

Approche transversale et globale qui amène à réfléchir différemment, en prenant de la hauteur et permet d’analyser plus sereinement l’organisation de nos sociétés, leur développement, la nature des liens entre habitants ou usagers des territoires et inévitablement l’organisation des mobilités. Etape préalable inidspensable pour pouvoir être en capacité de projeter cet ensemble dans un futur proche afin d’anticiper plutôt que subir.
C’est tout l’intérêt des démarches de planification transversale, telle celle initiée en Ile de France avec le Schéma Directeur Régional et sur d’autres territoires autour des SCOT, PLH, PLD….

Il y a la « carte (présente), les territoires » et leurs liens  … Mais aussi la carte en devenir, à écrire. Les liens aujourd’hui ne sont plus simplement uni ou bi directionnel, mais quasi neuronaux. La force d’un territoire, notamment lorsqu’il est multi polaire est la vitalité et la qualité de ses échanges, qu’ils soient internes ou externes.

Pour illustrer ce propos, le projet de territoire de notre agglomération a associé les travaux autour du SCOT et du PLD, afin d’initier une démarche globale et systémique, qui pourrait constituer dans les prochaines années un vrai levier de développement territorial.
Signalons l’apport qualitatif des bureaux d’études qui ont accompagné ces réflexions et permis grâce à leur approche quasi provinciale, de proposer un schéma de développement, certes atypique pour la Région Ile de France, mais me semble t’il trés adapté aux caractéristiques de notre territoire face au changement climatique et à la nécessité de preserver les espaces naturels et agricoles : reliefs, présence de cours d’eau, espaces agricoles et naturels, présence de communes rurales, péri urbaines, centre …

Nous devons proposer une organisation globale reposant sur plusieurs modes de mobilités : transport « de masse » pour la ville centre, dimensionné à sa fréquentation (projet de Transport en Commun en Site Propre), articulation entre liaisons bus et réseau ferré et création de pôle multimodaux d’échanges pour le péri urbain et transport quasi individuel (transport à la demande), là ou la demande est actuellement trop individualisé et les flux d’usagers trop limité pour une offre classique en bus. Systèmecertes  complexe à mettre en place mais qui aux yeux des futurs usagers doit paraître transparent, nous y reviendrons dans le prochain volet de cette série.

Car l’enjeu dans nos territoires est de « combattre » l’usage intensif de la voiture, et pour cela guère le choix, il faut bâtir une offre de transport adapté à chaque contexte, une offre efficiente, articulée et complémentaire permettant de constituer une vraie alternative au « tout voiture ».

 

 

Annexes

 

Défis et orientations du Plan de Déplacement Urbain d’Ile de France

1.Agir sur les formes urbaines, l’aménagement et l’espace public

2.Rendre accessible l’ensemble de la chaîne de déplacements

3.Construire le système de gouvernance responsabilisant les acteurs

4.Faire des Franciliens des acteurs responsables de leurs déplacements

5.Rendre les transports collectifs plus attractifs

6.Agir sur les conditions d’usage des deux-roues motorisés

7.Redonner à la marche de l’importance dans la chaîne de déplacements

8.Donner un nouveau souffle à la pratique du vélo

9.Rationaliser l’organisation des flux de marchandises et favoriser le transfert modal

10.Agir sur les conditions d’usage de l’automobile

Mobilis in mobili (1)

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Cette note fait suite à une intervention  à l’école des Ponts, où j’avais été invité afin de plancher sur une problématique quelque peu ésotérique : « Quelle stratégie à déployer concernant les déplacements en Ile de France à l’horizon 2012 ? Les réponses du nouveau PDU », tout un débat … Que nous pouvons traduire par cette simple interrogation : quel est votre ressenti d’élu sur l’évolution des déplacements en Ile de France ?…

L’objectif de ce premier billet est de rappeler le contexte et la réalité de 2003, représentative de la représentation qu’avaient, et qu’ont encore pour une grande partie d’entre eux les élus de la grande couronne, de l’organisation des transports dans la Région Capitale.
J’aborderais plus précisément dans les prochains billets les bouleversements qui ont concerné cette problématique et explorerait quelques pistes de prospective …

Mon intervention se faisant face à un public averti, constitué de fins connaisseurs du contexte, il m’a semblé plus judicieux de ne pas entrer dans le détail des dispositifs en place ou dans le commentaire « théorique » des défis et orientation  du Plan de déplacement Urbains d’Ile de France. J’ai plutôt proposer à l’auditoire une analyse personnelle sur le bouleversement considérable qui a concerné ce secteur depuis moins de 10 ans, en me situant sur une focale résolument grand angle, celle de la grande couronne, notamment de la Seine et Marne et avec le point de vue de l’élu de base que je suis.

Le titre d’un récent best seller pourrait résumer en partie ce propos : « la carte, le territoire » auquel il faudrait rajouter immédiatement « et leurs mobilités » tant ces différentes questions sont étroitement mêlées et imbriquées.
Pour travailler sur un nouveau mode de développement, notre société redécouvre enfin les vertus de la géographie et l’importance du regard du géographe comme de sa méthode fondée sur la «reconnaissance des espaces qui investissent les lieux, qui les mettent en relation, qui leur donnent du sens » …

Nous redevenons « mobile dans l’élément mobile », telle la devise du Nautilus cher au Capitaine Nemo (« mobilis in mobili … »). Les mobilités sont de nouveau au cœur du développement de nos sociétés, du fait de la lutte contre les émissions de G.E.S mais aussi des conséquences négatives de l’étalement urbain sur l’efficience de nos déplacements. La place et le statut pris jusque là par l’automobile individuelle sont enfin remise en cause, ce qui amène à explorer de nouvelles grilles de lecture de l’organisation urbaine.

En Ile de France, malgré des progrès certains, nous le verrons, la frustration grandit, et les besoins s’accentuent. Incontestablement nous assistons à une « accélération dans l’accélération » du degré d’exigence de nos concitoyens.
Ils ont un sentiment très fort d’immobilisme alors qu’un simple coup d’œil dans le rétroviseur rappellerait les progrès significatifs réalisés depuis 2003. Nous réglons aujourd’hui la facture de plus de trente années de sous investissement, tant au niveau des infrastructures, de leur fonctionnement que des projets mis en œuvre.  Situation qui replace de facto au premier plan la notion de cout global, mais cette fois ci, appliqué au développement des territoires.
Une quadrature qui dans le contexte budgétaire actuel, ne sera pas simple à résoudre, mais qui est avant tout un choix politique et un investissement pour que les habitants de notre société soient   plus que jamais « mobiles dans l’élément mobile » !

Entrons dans le vif du sujet, avec le  rappel de la situation ante 2011 …

 

 

 

Quelques éléments de contextualisation de l’ordre du trés général …

A la création de notre Communauté d’Agglomération, en 2003 (18 communes et plus de 80 000 habitants) aucun élu n’avait alors de connaissance ou d’appétence particulière sur la problématique des transports en commun. Elle était abordée alors par nos communes, en ordre dispersé, sur le principe du « chacun pour soi ».

Notre intercommunalité, située dans la grande couronne francilienne, est le reflet miniature de l’Ile de France, terre de contraste s’il en est : une ville centre entourée d’une « première couronne » puis de villes plus rurales. Point remarquable à souligner, un patrimoine naturel exceptionnel, situé entre Marne, forêts et terres agricoles …

La problématique du transport y relève à la fois de l’urbain, notamment pour la ville Centre (50 000 habitants), et du très rural pour les communes plus petites (moins de 500 habitants). Pour faire caricatural cela va du transport « de masse »,  au transport «quasi individualisé».
Afin de compléter le topo, soulignons la présence de deux gares  (Paris à un peu plus d’une demi heure) et de routes trop souvent saturées par des perturbations dues au trafic automobile. « L’agglo » constitue un nœud de communication trés fréquenté de l’Est parisien, interface naturelle entre Ile de France et Champagne.

Si je me suis impliqué dans cette problématique, c’est du fait, non de mon parcours professionnel, ou d’un intérêt particulier pour ces questions, mais tout simplement en qualité d’élu d’une ville mobilisée sur cette problématique pour deux raisons principales : la présence d’une gare SNCF mono usage (sans aucune complémentarité avec le réseau de bus) et celle d’un bouchon, spécialité locale depuis les années 1960, conséquence de la présence d’un pont franchissant la Marne situé sur notre commune, ouvrage qui a constitué un enjeu stratégique des guerres avec nos voisins de l’Est; nous sommes effectivement placés sur la route d’Allemagne.

Ma désignation en tant que Vice Président en charge des transports au niveau de l’agglomération est certainement due à l’acuité de cette problématique pour ma ville et mon implication à faire avancer un projet de déviation qui soulagera lorsqu’il sera réalisé l’ensemble du territoire et à dynamiser le pottentiel représentait par la gare situé sur la commune.
Soulignons que cette problématique ne représentait pas à l’époque d’intérêt politique majeur, la situation semblant totalement bloquée, un contexte qui n’a pas du me desservir pour obtenir cette délégation.

 

Un des premiers dossier que j’ai eu à traiter est celui d’un «Contrat de pôle» relatif aux deux gares. Ce dispositif contractuel permet d’obtenir des subventions du Syndicat des Transports d’Ile de France, du Département, de la région et à l’époque de l’Etat (ne rêvez pas, les choses ont bien changé depuis) afin de financer des travaux d’amélioration des conditions de transports des usagers. Les travaux prévus alors dans la première version du Contrat de pôle était le désenclavement d’une gare afin que les bus puissent la desservir, et un agrandissement substanciel de leurs deux parkings.
J’ai découvert alors ce qu’était réellement une usine à gaz, j’y reviendrais.

Dans le même temps, une des deux lignes SNCF desservant ma ville périclitait « grave ». Beaucoup (usagers, élus, cadres de la SNCF) allaient même jusqu’à prédire son abandon et son remplacement par des liaisons bus.
Situation se traduisant par une multiplication d’incidents, retards, pannes, annulations avec pour conséquences l’exaspération croissante et la colère légitime des usagers (occupation de voies, pétitions…), un sentiment d’abandon très fort, concernant également élus ou personnels de la SNCF et la multiplication du nombre de voitures stationnant sur ma commune, située à un endroit stratégique. Un état de fait intolérable, plusieurs fois évoquées dans ce blog, comme celui de la gare située sur ma commune, pour laquelle il a fallut se mobiliser.

A noter, nous y reviendrons également, tant le contexte évolue et c’est tant mieux, la SNCF alors répondait trop souvent aux abonnés absents lorsque nous la sollicitons pour concrètement améliorer la donne.

Tout semblait bloqué, voilà pour situer le décor …

 

Puis, brusquement tout s’est mis en mouvement, et sur plusieurs niveaux …

Progressivement  la problématique des mobilités est redevenue un enjeu politique, et une priorité affichée du moins au niveau régional. Incontestablement, qu’on le veuille ou non, il y a bien eu en Ile de France au niveau des transport, un avant et un après Huchon.

Pour trois raisons principales :

  • Les investissements importants consentis dés son élection par Jean Paul Huchon, notamment sur la grande couronne, qui ont porté leurs fruits et ouvert sde nouvelles perspectives, le transport en commun redevenant une priorité politique assumée,
  • Le changement de gouvernance  du STIF, avec l’arrivée du politique comme chef d’orchestre. Un fait qui a marqué un point de rupture et initié un mouvement de fond, qui ne s’est pas arrêté depuis …
  • L’état déplorable des infrastructures et les « performances » inquiétantes du réseau qui exigeait d’intervenir.

Ce bouleversement n’a pas concerné que le STIF, mais également la SNCF et l’ensemble de la chaîne des transports et le « politique », qui a eu la démonstration qu’effectivement les choses pouvaient réellement changer, et que des perspectives existaient, la question des transport et de leur organisation redevenant dés lors un enjeu afin d’être …

« Mobilis in Mobile »

 

Annexes :  

Voir les notes précédentes relatives à cette thématique